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peut contenir d’eau réduite, plus on y recueille de sel. Ainsi nous ne parlerons pas des dimensions, nous nous contenterons de décrire les diverses machines, & la maniere de s’en servir. Nous dirons seulement que dans les machines les mieux construites, & les mieux servies, on n’extrait guere dans 24 heures que 500 p. à 700 p. de sel.

Dans la machine exprimée Pl. III. on a fait les trois chaudieres de même mesure, c’est-à-dire de 8 piés sur 4 ; elles different par la profondeur. D1 a 18 pouces, D2 & D3 ont de 8 à 12 pouces. Elles sont posées sur trois fourneaux d’une inégale hauteur, de telle sorte que le bas de la chaudiere D1 soit à niveau da haut de D2, & de même pour D2 & D3, afin de pouvoir faire passer l’eau de l’une dans l’autre avec facilité, au moyen de robinets, si l’on veut s’éviter la peine de la transvaser avec des poches ou cuilleres.

Il faut que la maconnerie de la chaudiere D1, quoique la plus haute, ne le soit pas assez pour gêner le travail dans ladite chaudiere. La hauteur de B1 sera suffisante de 2 piés 6 pouces ; celles de B2 & B3 sont décidées par la condition que nous avons mise à la position des chaudieres. Supposant que les chaudieres D 2, D 3, ayent 8 pouces de rebord ; B2 = 30po8=22 & B3 = 22 po8 = 14 pouces. Si l’on vouloit donner à B3 & B2 plus d’élévation ce ne pourroit être qu’en exhaussant B1 ; & alors comme la hauteur de B1 pourroit devenir incommode au service de la chaudiere D1, on en seroit quitte pour exhausser le terrein vers la face ab, & faire le service de ce côté. Les dimensions des fourneaux en longueur & largeur, sont déterminées par celles des chaudieres. Chaque fourneau est séparé par un petit mur d’entrefend ; & il est inutile de dire que toute cette maçonnerie doit être construite en pierres bien propres à résister à l’action du feu, ou en briques. On pratique des tisars CCC, d’environ 18 pouces d’ouverture, à l’un des bouts des fourneaux, & des cheminées EEE à l’autre bout, pour établir le courant d’air.

On fait la dissolution dans la chaudiere D1 ; on évapore dans la chaudiere D2, & D3 sert de chaudiere de réduction. Il est difficile cependant qu’une seule chaudiere de réduction suffise à une évaporante, ou dans ce cas la besogne va un peu plus lentement. L’évaporante D2 ayant besoin du plus grand feu, il’est naturel de l’allumer au tisar C2, & dans ce cas je serois d’avis de pratiquer un cendrier d’environ 5 piés de profondeur, au-dessous du tisar C2, pour recevoir les braises, & en même tems pour favoriser la combustion. Si l’on chauffoit en charbon de terre, on substitueroit une grille aux barreaux qui servent à soutenir le bois, & on feroit le cendrier un peu plus profond. Il faudroit que la descente au cendrier, nécessaire pour en ôter les braises, n’eût que la largeur du tisar, afin de laisser encore assez de place pour se service de la chaudiere D2[1]. Les tisars C1 & C3, destinés seulement à contenir des braises, n’ont besoin ni de cendrier, ni d’une si aussi grande ouverture. Il suffiroit, je crois, qu’elle eût un pié, & au moyen des cheminées le courant d’air seroit assez considérable pour conserver un certain tems les braises dans toute leur ardeur. On pourroit même s’en passer en faisant dans chaque mur d’entrefend, une ouverture par laquelle il passeroit une portion du feu du tisar C2, qui tiendroit lieu des braises avec lesquelles on chauffe les fourneaux B1, B3. Il seroit à craindre, à la verité, que le feu ne fôt trop violent pour les chaudieres D1, D3,

qui en ont besoin de peu ; celle de réduction, pour les raisons ci-dessus énoncées, & celle de dissolution, parce que l’eau tiede favorise à la vérité, son usage : mais la moindre ébullition suffiroit pour empêcher l’eau de se clarifier.

Il seroit aisé de remédier à cet inconvénient au moyen de soupapes, placées à cet effet : une démonstration me fera entendre. Soit abcd le mur qui sépare le fourneau B1 du fourneau B2, e le trou de communication du feu. Je voudrois qu’entre deux barreaux de fer, gh, lm, faisant feuillure, ou deux feuillures formées en maçonnerie, fut placée une taule s quarrée, qu’on pût mouvoir de dehors, le long de la feuillure, au moyen du manche fi qu’on feroit passer par un flan n, pratiqué au mur du fourneau. En poussant la tôle jusqu’à moitié du trou, on le diminue d’autant, & conséquemment la chaleur doit diminuer, ne passant par la communication que la moitié du feu qui y passoit auparavant. On peut de même diminuer le feu des , &c. Il seroit possible de marquer toutes ces gradations sur la partie du manche qui sort du fourneau.

La soude, une fois lessivée, on la met dans des cases FFFF, où on l’arrose d’une certaine quantité d’eau, pour éviter la perte du peu d’alkali qui y seroit demeuré. On la laisse égoutter dans des bassins GGGG, faits au-dessous des cases ; & l’eau qui tombe dans les bassins n’étant pas encore assez saturée pour en faire l’évaporation, on l’emploie à faire la dissolution de la nouvelle soude, qu’on a mise dans la chaudiere de dissolution. La soude totalement privée de son sel, prend le nom de marc de soude.

Les cases ainsi que les bassins, sont construits en maçonnerie.

Lorsqu’on retire le sel de la chaudiere de réduction, on le met sur un ou plusieurs égouttoirs de tôle, qui donnent dans ladite chaudiere par un bout, & qui sont percés par ce même bout. On les dispose en pente pour favoriser leur opération, assez désignée par le nom qu’ils portent. Le sel qu’on y dépose, se décharge dans la chaudiere du peu d’eau qu’il a conservée ; & lorsque l’egouttoir est plein, on porte le sel avec des pelles, semblables à celles que nous avons décrites en parlant de la calcination des cassons ; on le porte, dis-je, dans des cases HHHH, destinées à le sécher & à le conserver sec au moyen du tisar I pratiqué dessous, & dans lequel on met de la braise.

Rien ne détermine les dimensions des égouttoirs & des cases à recevoir, tant le marc que le sel, que la quantité de matiere qu’on desire que les unes & les autres contiennent. Dans la Planche III. l’égouttoir a 5 piés de long, sur 4 de large, & un pié de rebord (Voyez le plan de l’égouttoir oprq, & son rebord stxy), & les cases ont 6 piés sur 4.

Un artiste qui s’est fait un nom, & qui a fait même époque dans la glacerie, il y a quelques années, gagnant la confiance plus par l’ostentation de son savoir, & la magnificence de ses expressions, que par sa science dans l’art, quoiqu’il ne manque pas d’ailleurs de connoissances physiques, a donné à la manufacture royale de S. Gobin, une nouvelle machine à extraire, dont on voit le détail Pl. IV. Sa machine est en fer de tôles fortes, clouées à côté l’une de l’autre. Le but de l’inventeur étoit de faire la dissolution & l’évaporation dans un même vase, de faire même le fourneau de la même piece ; au moyen de quoi, sans avoir besoin de maçonnerie que celle du massif propre à soutenir la machine, on devoit travailler.

Il fit un coffre de tôle dont on voit le géométral en ABCD, fig. 1. de 10 piés de long, sur 4 piés de large, avec la précaution de ne pas fermer son coffre du côté qui devoit porter à terre, comme on

  1. On forme ordinairement le tisar avec une ferrasse, ce qui favorise la combustion, parce que l’air n’ayant passage que par le cendrier, souffle le feu par-dessous & lui donne plus d’activité.