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Verre propre à faire l’opération de la ventouse, voyez Ventouse.

Verre de Russie, vitrum ruthenicum ; vitrum muscoviticum, glacies mariæ, (Hist. nat.) l’on a donné ce nom à un talc très-blanc, transparent comme du verre, qui se partage en feuilles très-minces, que l’on trouve en Russie & en Sibérie, & que l’on emploie dans ces pays pour faire les vîtres des fenêtres. Cette pierre a toutes les propriétés du talc, c’est-à-dire qu’elle sort du feu sans souffrir aucune altération, & les acides n’ont aucune prise sur elle.

Cette espece de talc se trouve sur-tout en Sibérie, dans le voisinage des rivieres de Witim & de Mama ; on appelle dans ce pays sliudniki ceux qui s’occupent à aller chercher le verre de Russie ; quand ils sont dans des endroits où l’on soupçonne qu’il y en a, ils commencent par mettre le feu aux herbes & aux broussailles des environs, afin de dépouiller le terrein, pour que le soleil en frappant dessus leur fasse découvrir ce talc qui est luisant. Il se trouve par lames ou tables engagées dans une roche fort dure, qui est un quartz jaunâtre mêlé de spath ; c’est peut-être une espece de faux granite. Ce talc n’est point en couches suivies ni par filons, on en trouve des lames répandues sans ordre. Ces lames ont quelquefois trois à quatre piés en quarré, & quelques pouces d’épaisseur. La dureté du rocher dont ces pauvres ouvriers ne peuvent point venir à bout faute d’instrument, & parce qu’ils ne savent pas le faire sauter avec de la poudre, fait qu’ils ne vont point chercher le talc bien avant : d’ailleurs M. Gmelin conjecture que ce talc a peut-être besoin du contact de l’air pour sa formation.

Le talc le plus estimé est celui qui est blanc & transparent comme de l’eau de roche ; on ne fait pas si grand cas de celui qui est verdâtre. On a aussi égard pour le prix à la grandeur des morceaux ; l’on en trouve quelquefois qui ont trois à quatre piés en quarré. Le plus beau talc ou verre de Russie se paye sur les lieux jusqu’à un ou deux roubles (de cinq jusqu’à dix francs) la livre. Le commun, qu’on appelle tschetwenaja & qui n’a qu’environ un demi-pié en quarré, se paye de 8 à 10 roubles le pud, c’est-à-dire 40 livres. Le talc de la plus mauvaise qualité & qui est encore au-dessous de la qualité susdite se débite sur le pié d’un rouble & demi ou de deux roubles le pud, c’est-à-dire de 7 livres 10 sols à 10 livres argent de France ; ce dernier est destiné pour faire des vitres communes, & on l’attache aux fenêtres avec du fil.

Quand on veut débiter le verre de Russie, on fend les larmes en plusieurs feuillets plus minces, avec un couteau à deux tranchans, ce qui se fait aisément ; cependant on donne une certaine épaisseur à ces feuillets, pour que le verre ait plus de consistence.

Quand ce talc est de la belle espece, il n’y a point de verre qui soit aussi pur & aussi transparent. On ne connoît point d’autres vitres en Russie. On l’emploie aussi pour faire les vitres des vaisseaux de la flotte, parce qu’elles sont moins sujettes à se casser par l’ébranlement des salves de la cannonade. Cependant ce verre s’altere & se ternit à l’air, & il est difficile à nettoyer lorsqu’il a été sali par la fumée & la poussiere. Ces détails sont tirés du voyage de Sibérie de M. Gmelin, publié en allemand, tome II. On trouve encore du talc de cette espece dans la Carélie & près d’Archangel, mais il n’est point si beau que celui de Sibérie.

C’est d’un talc semblable dont se servent quelques religieuses d’Allemagne pour mettre à des petits reliquaires au lieu de verre, & c’est ce qui l’a fait appeller glacies mariæ, en allemand marienglas, qui doit être regardé comme un vrai talc, & non comme un

gypse, comme quelque auteurs l’ont prétendu. Voyez Mariæ glacies.

VERRÉE, s. f. terme de Pharmacie, qui exprime un remede liquide, dont la dose peut se boire d’un seul trait. On ordonne plusieurs verrées, lorsque le remede a besoin d’être étendu dans un grand véhicule, alors son effet est plus énergique, les purgatifs & les martiaux donnés de cette façon sont moins pernicieux, ils agissent plus doucement, causent moins de tranchée, & deviennent plus salutaires quant à l’évacuation ou l’effet que l’on en attend.

VERREGINUM ou VERRUGO, (Géogr. anc.) ville d’Italie, dans le Latium, au pays des Volsques, selon Diodore de Sicile, lib. IV. cap. c. Tite-Live, lib. IV. cap. xlj. & Valere Maxime, lib. III. cap. ij. On ne sait pas au juste la situation de cette ville. Tite-Live dit que le consul Sempronius, après avoir livré bataille aux Volsques avec quelque desavantage, ramena son armée par la voie Lavicane ; & Valere Maxime écrit que cette bataille fut donnée auprès de Verrugo ; mais comme Tite-Live, l. IV. c. xxxix. ajoute que le consul, en se retirant, ne prit pas le plus court chemin, il n’est pas possible de fixer la vraie situation de cette ville. On sait seulement qu’elle ne devoit pas être éloignée du pays des Œques, parce que de la forteresse de Carvente que les Œques avoient envahie, l’armée fut ramenée à Verrugo. Cette derniere place avoit été fortifiée par les Romains, pour servir de barriere contre les courses des Volsques par qui elle fut prise plus d’une fois. (D. J.)

VERRERIE, s. f. (Art méchan.) l’art de la verrerie est celui de faire ce corps transparent & fragile, que nous appellons verre, & d’en former différens ouvrages.

Il y a un verre qui convient à chaque ouvrage.

A l’occasion de chacun de ces ouvrages, nous donnerons la maniere de faire le verre qui leur est propre à chacun.

Cet article aura donc autant de divisions qu’il y a d’usine de verrerie. Or il y a 1°. La verrerie en bouteilles & en charbon.

2°. La différence des verreries en bois & des verreries en charbon.

3°. La verrerie à vitre ou en plats.

4°. La glacerie qui forme deux subdivisions. La glacerie en glaces coulées, avec tous les arts qui y tiennent.

La glacerie en glaces soufflées.

5°. La verrerie en crystal.

Ces differens articles s’éclairciront les uns par les autres.

Verrerie en bouteilles en charbon, les matieres à faire le verre sont la cendre nouvelle, la charée, ou la cendre lessivée & la soude, que l’on appelle varech, & le sable, la cendre nouvelle ou fine se ramasse dans les villes & dans les campagnes circonvoisines.

Il en est de même de la cendre lessivée.

Pour la soude ou varech, elle se fait sur les côtes de la Normandie, avec une herbe saline, qu’on appelle kaly. Cette herbe croît sur les rochers, sur les pierres, au bord de la mer. On la ramasse au mois de Juin ; on la répand au soleil pour la faire sécher. Puis on fait des fosses, au fond desquelles on place quelques pierres ; on allume du feu dans ces fosses, & l’on jette sur ce feu de ces herbes séchées qui s’enflamment ; on continue d’en jetter, à mesure qu’elles se consument. Leurs cendres se réduisent en masse. Dans la masse de ces cendres, on trouve des pierres : ces pierres ont été ramassées avec l’herbe ; mais la plus grande partie y a été mêlée frauduleusement par ceux qui font le varech : car le varech se vend à la livre, & la pierre en augmente le poids.