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nuances suit le nom de tous les ingrediens colorans & non-colorans, qui entrent dans la teinture.

Agaric. Gravelle.
Alkermès ou vermillon, même chose que le pastel ou graine d’écarlate. Guesde.
Indigo.
Limaille de fer ou cuivre, huile d’olive.
Alun. Malherbe.
Alun de roche ou de Rome. Moulée des taillandiers & émouleurs.
Amidon. Orcanette.
Arsenic. Orseille.
Bois de Brésil. Pastel.
Bois de campêche. Pastel d’écarlate, qui est le pousset de graine d’écarlate ou du vermillon.
Bois de fustet.
Bois d’Inde & cuve d’Inde.
Bois jaune. Potasse ou soude.
Boue. Racine de noyer.
Bourre ou poil de chevre. Réagal ou arsenic.
Rocou ou raucour.
Cassenolle. Rodoul.
Cendres gravelées. Roudol vieux.
Cendres communes. Safran bâtard, autrement
Cendres cuites. dit safranbourg.
Cendres vives. Salpêtre.
Céruse. Savette.
Cochenille maestrek ou pure cochenille. Savon blanc.
Savon noir.
Cochenille campétiane. Sel armoniac.
Cochenille mesteque. Sel commun.
Coucoume ou terra merita. Sel de tartre.
Sel gemme.
Coques de noix. Sel minéral.
Chaux. Sel nitre.
Couperose. Sommail ou sumach vieux, qui a servi à passer les marroquins.
Eau-forte.
Eaux de galle.
Eaux sûres. Soude ou potasse.
Ecorce d’aulne. Soufre.
Ecorce de noyer. Sublimé.
Esprit-de-vin. Son.
Etain. Sumach.
Farine de blé. Suie de cheminée.
Farine de pois. Silvestre.
Fenu-grec. Tartre.
Feuilles de noyer. Terra merita.
Fovic ou rodoul. Testale.
Fustel. Tournesol.
Galle d’épine d’Alep ou d’Alexandrie. Trentanel.
Verdet ou verd-de-gris.
Garence. Vermillon, c’est le pastel & la graine d’écarlate.
Garouille.
Gaude. Urine.
Genestrolle. Ursolle ou orseille.
Graine d’écarlate, demi-graine, &c. autrement dit vermillon. Vouede.
Vinaigre.

De tous les ingrédiens, les uns sont colorans, les autres ne le sont pas. Les derniers ne servent qu’à disposer les matieres à recevoir les couleurs qui leur sont imprimées par les ingrédiens colorans, ou pour en rendre les couleurs plus belles & plus assûrées.

Pour assûrer une perfection constante dans les teintures de laines, les anciens & les nouveaux reglemens ont distingué deux manieres de teindre les laines ou étoffes, de quelque couleur que ce soit. L’une s’appelle teindre en grand & bon teint. L’autre, teindre en petit ou faux teint. La premiere consiste à employer des drogues ou ingrédiens qui rendent la couleur solide, ensorte qu’elle résiste à l’action de l’air, & qu’elle ne soit que difficilement tachée par les liqueurs âcres ou corrosives : les couleurs du petit teint au contraire se passent en très-peu de tems

à l’air, & sur-tout si on les expose au soleil, & la plûpart des liqueurs les tachent, de façon qu’il n’est presque jamais possible de leur rendre le premier éclat.

On sera peut-être étonné qu’y ayant un moyen de faire toutes les couleurs en bon teint, l’on permette de teindre en petit teint ; mais trois raisons font qu’il est difficile, pour ne pas dire impossible, d’en abolir l’usage. 1°. Le travail en est beaucoup plus facile ; la plûpart des couleurs & des nuances, qui donnent le plus de peine dans le bon teint, se font avec une facilité infinie en petit teint. 2°. La plus grande partie des couleurs de petit teint sont plus vives & plus brillantes que celles du bon teint. 3°. Et cette raison est la plus forte de toutes, le petit teint se fait à beaucoup meilleur marché que le bon teint. Quand il n’y auroit que cette derniere raison, on jugera aisément que les ouvriers font tout ce qu’ils peuvent pour se servir de ce genre de teinture préférablement à l’autre : c’est ce qui a déterminé le gouvernement à faire des lois pour la distinction du grand & du petit teint.

Ces lois prescrivent les sortes de laines & d’étoffes qui doivent être de bon teint, & celles qu’il est permis de faire en petit teint. C’est la destination des laines filées & le prix des étoffes qui décident de la qualité de la teinture qu’elles doivent recevoir. Les laines pour les canevas & les tapisseries de haute & basse-lisse, & les étoffes dont la valeur excede de quarante sols l’aune en blanc, doivent être de bon teint. Les étoffes d’un plus bas prix, ainsi que les laines grossieres destinées à la fabrique des tapisseries, appellées bergame & point d’hongrie, peuvent être en petit teint. Tel étoit l’esprit du réglement de M. Colbert en 1667 ; & c’est sur le même principe qu’a été fait celui de M. Orry, contrôleur général des finances en 1737. On y a éclairci un grand nombre de difficultés qui nuisoient à l’exécution du premier, & on y est entré dans le détail qui a été jugé nécessaire pour prévenir, ou au-moins pour découvrir toutes les prévarications qui pourroient se commettre.

C’est pour ces mêmes raisons que les Teinturiers du grand & bon teint sont un corps séparé de ceux du petit teint, & qu’il n’est pas permis aux uns d’employer, ni même de tenir chez eux les ingrédiens affectés aux autres. Il y a dans le royaume une troisieme communauté, qui est celle des Teinturiers en soie, laine & fil. Ceux-ci ont la permission de faire le grand & le petit teint : mais cette communauté forme trois branches, dont l’une est pour la soie, la seconde pour la laine filée, & la troisieme pour le fil. Le teinturier qui a opté pour un de ces trois genres de travail, ne peut faire que ce qui est permis à ceux de sa branche : ainsi celui qui a opté pour le travail des soies, ne peut teindre ni la laine filée, ni le fil : il en est de même des autres. Le teinturier de cette troisieme communauté, qui a choisi le travail des laines filées, peut avoir chez lui les ingrédiens du grand & du petit teint ; mais il ne lui est pas permis de faire usage de ceux affectés au petit teint, que sur les laines grossieres dont on vient de parler.

Quoique, suivant les ordonnances, il ne soit pas permis aux teinturiers du grand & bon teint d’avoir chez eux des ingrédiens affectés aux teinturiers du petit teint, & à ceux-ci d’avoir des ingrédiens affectés aux teinturiers du grand & bon teint ; néanmoins il est de ces mêmes ingrédiens affectés & communs aux deux corps séparés, tels que la racine, écorce & feuille de noyer, brou de noix, garouille, galle, sumach, rodoul, sovie & couperose : mais les teinturiers du grand & bon teint ne doivent tenir que fort peu de ces quatre derniers ingrédiens, & seulement ce qui peut leur être nécessaire pour quelque légere bruniture, qu’il leur est loisible de don-