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qui n’est point achevé, & qui cependant a autrefois mérité d’être regardé comme une des belles maisons de France. Long. 19. 16. latit. 47. 7. (D. J.)

VALENCIENNES, (Géog. mod.) ville de France, dans le Hainaut, sur le bord de l’Escaut, entre Condé & Bouchain, à huit lieues au nord-est de Cambrai, à six au sud ouest de Mons, & à cinquante de Paris.

Les rois de France avoient un palais à Valenciennes, sous Clovis III. qui y tint une assemblée des grands du royaume, valentinianis in palatio nostro, dit la patente de ce prince ; cependant Valenciennes n’étoit encore qu’une bourgade ; mais sa situation avantageuse la rendit avec le tems une bonne ville. L’Escaut qui la coupe par le milieu, & où il y a de belles écluses, y porte bateau. Comme cette riviere la divise en deux, la ville est aussi de deux dioceses, de Cambrai & d’Arras ; c’est ce qui fait qu’elle a été attribuée par divers auteurs au Hainaut, & par d’autres à la Flandre. Les empereurs de qui Cambrai & le Hainaut relevoient, prétendoient avoir la souveraineté de toute la ville ; mais cette prétention leur étoit disputée par les comtes de Flandre, & par les rois de France de qui ces comtes relevoient. Louis XIV. prit Valenciennes en 1677. & elle lui fut cédée l’année suivante par le traité de Nimegue.

Cette ville, dont Henri Oultreman a donné l’histoire imprimée à Anvers, en 1590. in 4°. contient à-peu-près quatre mille maisons, & environ vingt mille habitans ; les rues sont étroites, mal percées, & toutes tortues ; ses fortifications & la citadelle ont été réparées, & construites en partie par le maréchal de Vauban ; la citadelle est une des plus irrégulieres qu’on puisse voir, mais les redoutes sont belles & bien revêtues.

Il y a dans cette ville un gouverneur, un lieutenant de roi, & bonne garnison ; la citadelle a son gouverneur particulier ; les membres de la magistrature sont nommés tous les ans par le gouverneur de la ville, & par l’intendant de la province. La justice royale qu’on appelle la prévôté-le-comte, s’étend sur les ving-quatre villages de la prévôté, & connoît des cas royaux dans la ville ; l’appel des jugemens est porté au parlement de Douay. Le commerce de Valenciennes consiste en camelots, bouracans, toiles fines appellées batistes, & belles dentelles. Long. 21. 45. latit. 50. 22.

Froissard (Jean). prêtre, historien & poëte, naquit à Valenciennes vers l’an 1337. & montra dès sa jeunesse un fond de dissipation naturelle, qui exerça souvent la patience de ses maîtres. Il aimoit la chasse, les assemblées, les danses, la bonne chere, le vin, & les femmes. Tout cela paroît par un morceau de ses poésies, où il se dépeint ainsi lui même :

Et si destoupe mes oreilles,
Quand j’oi vin verser de bouteilles,
Car au boire prens grant plaisir,
Aussi fais en beaus draps vestir,
En viande fresche & nouvelle.
Violettes en leur saisons,
Et roses blanches & vermeilles
Voi volontiers, car c’est raisons,
Et chambres plaines de candeilles,
Jus & dances, & longes veilles,
Et beaus lis pour li rafreschir,
Et au couchier pour mieulx dormir
Especes, (épices) clairet, & rocelle :
En toutes ces choses veir
Mon esperit se renouvelle.

Le goût pour l’histoire remplit un peu le vuide que l’amour des plaisirs laissoit dans son esprit & dans son cœur. Il avoit à peine vingt ans lorsqu’il entreprit d’écrire l’histoire des guerres de son tems, par-

ticulierement de celles qui suivirent la bataille de

Poitiers. Quatre ans après, en 1356, étant allé en Angleterre, il en présenta une partie à la reine Philippe de Haynaut, femme d’Edouard III. Quelque jeune qu’il fût alors, il avoit déja parcouru toutes les provinces de la France.

L’objet de son voyage en Angleterre étoit de s’arracher au trouble d’une passion qui le tourmentoit depuis long tems ; mais malgré les amusemens qu’on lui procura, & les caresses dont on l’accabla, rien ne put charmer l’ennui qui le dévoroit ; il résolut de se rapprocher ; cependant ses assiduités & ses soins auprès de sa maîtresse ayant été encore sans succès, il s’éloigna d’elle une seconde fois ; il retourna en Angleterre, & fut nommé clerc, c’est à-dire secrétaire ou écrivain de la chambre de la reine. Elle prenoit souvent plaisir à lui faire composer des poésies amoureuses ; mais ce n’étoit là qu’un amusement qui ne préjudicioit point à des travaux plus sérieux, puisqu’il fit aux frais de cette princesse, pendant les cinq années qu’il passa à son service, plusieurs voyages dont l’objet paroit avoir été de rechercher tout ce qui devoit servir à enrichir son ouvrage.

Après la mort de cette reine, qui l’avoit comblé de biens, il s’attacha à Vinceslas de Luxembourg, duc de Brabant, ensuite à Gui, comte de Blois. Ce dernier prince lui donna des lettres de recommandation pour Gaston Phœbus, comte de Béarn, ce qui lui procura le moyen de s’instruire à fonds des provinces du royaume les plus éloignées, où il savoit qu’un grand nombre de guerriers se signaloient tous les jours par de merveilleux faits d’armes. En 1395. il fit une course en Angleterre, où il n’avoit pas été depuis vingt ans ; le roi le gracieusa beaucoup, & le gratifia à son départ de cent nobles dans un gobelet d’argent doré, pesant deux marcs. Il mourut six ans après, âgé d’environ 64 ans.

Son histoire est un ouvrage précieux. Elle comprend tout ce qui s’est passé en France, en Espagne, & en Angleterre, depuis 1326, jusqu’en 1400. Enguerrand de Monstrelet continua cette besogne jusqu’en 1467. On a plusieurs éditions de la chronique de Froissard ; les premieres sont à Paris, chez Jean Petit, & chez Antoine Vérard, en caracteres gothiques. Denys Saulvage la réimprima à Lyon en 1559. la quatrieme édition parut à Paris en 1574 ; mais comme les François accusent Froissard de partialité pour la nation angloise, ils ont par-ci par là, tronqué son histoire dans toutes leurs éditions.

On dit qu’on garde dans la Bibliotheque de Breslaw, un manuscrit complet de la chronique de Froissard ; c’est sur ce manuscrit qu’elle mériteroit d’être réimprimée. Il faudroit y joindre dans ce cas le mémoire sur la vie de l’historien, par M. de Sainte Palaye, inséré dans le recueil de l’académie des Inscriptions, tom. X. in-4°. p. 564. (Le chevalier de Jaucourt.)

VALENGIN, (Géog. mod.) comté joint à celui de Neuf-Châtel, & compris parmi les alliés de la Suisse, dont ces deux comtés occupent une partie des quartiers occidentaux. Le comté de Valengin a eu divers seigneurs. Il tire son nom d’une bourgade contenant à peine vingt maisons, & dans laquelle étoit autrefois un château bâti sur un rocher. Les états de Neuf-Châtel investirent en 1707, le roi de Prusse de leur comté & de celui de Valengin ; cette possession lui fut confirmée par le traité d’Utrecht. (D. J.)

VALENTIA, (Géogr. anc.) 1°. contrée de la grande-Bretagne, selon Ammien Marcellin, qui en fait le détail suivant.

Les Pictes, dit-il, les Scots, & quelques autres peuples du pays, s’étant jettés sur la province romaine, sous l’empire de Valentinien I. ce prince envoya contre eux Théodose l’ancien, qui repoussa ces