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des poulies, & on l’amene de même sur le pont quand on vient à mouiller.

Les ancres sont de fer, & les cables de paille cordonnée sont plus forts qu’on ne s’imagineroit.

Ces vaisseaux ont communément 30 ou 50 rameurs pour tirer à la rame, lorsque le vent tombe : ces rameurs s’asseient sur des bancs qui sont placés du côté de la pouppe ; ils rament en cadence sur l’air d’une chanson, ou sur le ton de quelques paroles, ou sur un son qui sert en même tems à regler leur manœuvre, & à les animer.

Ils n’étendent pas leurs rames à la maniere des Européens, droit en avant, & fendant justement la surface de l’eau ; mais ils les laissent tomber presque perpendiculairement, & puis ils les relevent : cette maniere de ramer a non-seulement tous les avantages de la nôtre, mais elle donne moins de peine, & paroît beaucoup meilleure, si on considere que les vaisseaux n’ont quelquefois que très-peu d’espace, comme lorsqu’ils passent par des détroits, ou à côté les uns des autres ; & que les bancs des rameurs sont fort élevés au-dessus de l’eau : d’ailleurs leurs rames sont faites précisément pour cet usage, car elles ne sont pas toutes droites comme les nôtres, mais un peu recourbées, avec un joint mobile dans le milieu, lequel cédant à la violente pression de l’eau, fait qu’on peut les relever plus aisément.

Les diverses pieces de la charpente de ces bâtimens, & les planches sont attachées ensemble dans les joints & dans les extrémités avec des crampons & des bandes de cuivre. L’éperon est orne d’un nœud de franges fait de petits cordons noirs & longs. Les personnes de qualité, dans leurs voyages, font tendre leurs cabanes de drap, auquel leurs armes sont cousues ; & ils mettent leur pique, qui est une marque de leur autorité sur l’arriere du vaisseau, à l’un des côtés du gouvernail ; de l’autre côté il y a une girouette pour l’usage du pilote.

Dans les petits bâtimens, aussi-tôt qu’on a jetté l’ancre, on ôte le gouvernail, & on le met à terre ; ensorte qu’on peut passer au-travers de l’ouverture de la pouppe, comme par une porte de derriere, & marchant sur le gouvernail, comme sur un pont, aller à terre. Kaeimpfer, hist. du Japon. (D. J.)

Vaisseau sacré, (Antiq. greq.) on appelloit ainsi le vaisseau que les Athéniens envoyoient tous les ans à Délos, pour faire des sacrifices à Apollon, & l’on prétend que c’étoit le même sur lequel Thésée avoit mené en Crete les quatorze jeunes enfans que les Athéniens payoient de tribut à Minos. Voyez Navire sacré. (D. J.)

Voici l’explication de quelques façons de parler à l’égard des vaisseaux.

Vaisseau à la bande ; c’est un vaisseau qui cargue, & qui se couche sur le côté, lorsqu’il est sous les voiles, & qu’il fait beaucoup de vent. Voyez encore Bande.

vaisseau à l’ancre ; c’est un vaisseau qui a jetté l’ancre à la mer.

Vaisseau à son poste ; c’est un vaisseau qui se tient au lieu qui lui est marqué par son commandant.

Vaisseau beau de combat, ou qui est de beau combat ; vaisseau qui a sa premiere batterie haute, & ses ponts assez élevés, ce qui est un avantage pour bien manier le canon.

Vaisseau corsaire ; voyez Corsaire.

Vaisseau démarré ; c’est un vaisseau qui a levé exprès les amarres qui le tenoient, ou dont les amarres ont rompu.

Vaisseau gondolé ; vaisseau qui est ensellé, ou qui est relevé de l’avant & de l’arriere ; ensorte que ses préceintes paroissent plus arquées que celles d’un autre vaisseau.

Vaisseau qui a le côté droit comme un mur ; cela veut

dire que le côté du vaisseau n’est pas assez renflé, ou qu’il n’y a pas assez de rondeur dans son fort.

Vaisseau qui a le côté faible ; c’est un vaisseau dont le côté est droit, & qui n’est pas bien garni de bois.

Vaisseau qui a le côté fort ; vaisseau dont le côté a de la rondeur.

Vaisseau qui cargue ; vaisseau qui se couche lorsqu’il est sous les voiles.

Vaisseau qui charge à fret ; vaisseau qui est à louage. Voyez Fret.

Vaisseau qui se manie bien ; c’est un vaisseau qui gouverne bien.

Vaisseau qui se porte bien à la mer ; vaisseau qui a les qualités nécessaire pour bien siller, & pour être doux au tangage.

Vaisseau ralongé ; c’est un vaisseau qui avoit été construit trop court, & qu’on a ralongé pour remédier à ce défaut.

Vaisseaux de bas bord ; ce sont des bâtimens qui vont à voiles & à rames, tels que les galeres, les brigantins, &c. ils ne sont presqu’en usage que sur la Méditerranée.

Vaisseaux de haut bord ; vaisseaux qui ne vont qu’à voiles, & qui peuvent courir toutes les mers.

Vaisseaux, (Mytholog.) l’usage très-ancien de donner aux vaisseaux le nom des animaux qui étoient représentés sur la proue, a enrichi la mythologie. Elle ne dit point que Persée voyageoit sur un vaisseau, mais qu’il étoit monté sur un cheval aîlé. Dédale s’enfuit de Crete sur un vaisseau à voiles, qui alloit plus vîte que le vaisseau à rames qui le poursuivoit : voilà les aîles avec lesquelles il s’envola. Minerve en construisant le vaisseau des Argonautes avoit employé au gouvernail un des chênes de la forêt de Dodone qui rendoit des oracles ; & cette fable n’est fondée que sur un mot phénicien qui est équivoque, & qui signifie également la parole ou un gouvernail. Virgile n’a garde de dire grossierement que Turnus brûla la flotte de son héros dans le port. Il transforme les vaisseaux d’Enée en des déesses immortelles ; on voyoit déjà, nous dit-il, voler les tisons ardens & les torches enflammées de Turnus ; déjà une épaisse fumée s’élevoit jusqu’aux astres, lorsqu’une voix redoutable se fit entendre : Troyens, dit-elle, ne vous armez point pour la défense de mes vaisseaux ; Turnus embrasera plutôt les mers, que cette flotte sacrée : galeres, nagez & devenez déesses de l’Océan, c’est la mere des dieux qui l’ordonne. Aussitôt chaque galere brise ses cables, & comme des dauphins se plongeant dans le sein de l’onde, elles reparoissent à l’instant, & offrent aux yeux autant d’océanides. Ces nouvelles déesses se souvenant des dangers qu’elles avoient couru, prêtent depuis lors une main secourable à tous les vaisseaux menacés du naufrage, excepté aux vaisseaux des Grecs… Que d’idées ingénieuses & brillantes dans ce seul endroit de l’Enéide. (D. J.)

Vaisseaux a fouler, instrument de Manufacture, autrement pilles ou pots, ce sont, pour l’ordinaire, particulierement du côté d’Amiens, de gros troncs d’arbres que l’on a creusés en façon d’anges ou mangeoires d’écuries, où l’on a eu soin de laisser des séparations de distance en distance. C’est dans ces vaisseaux que l’on met les étoffes que l’on veut fouler ou dégorger, ce que l’on appelle reviquer dans les manufactures d’Amiens.

A chaque vaisseau il y a deux pilons ou maillets qui battent alternativement sur les étoffes, & par le moyen desquels elles se tournent comme d’elles-mêmes dans les piles quand on les foule ou qu’on les revique. Comme les pilons ont leur mouvement par le moyen d’un moulin à eau, ceux qui conduisent ces moulins se nomment meuniers-foulons. (D. J.)

VAISSELLE, s. f. (Gram.) terme collectif ; on