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4 pouces de creux. Ils ont trois ponts entiers, dont le troisieme est coupé, avec deux chambres l’une sur l’autre ; savoir celle des volontaires ou du conseil, & celle du capitaine, outre la sainte-barbe & la dunette. Leur port est de 1500 tonneaux, & ils sont montées depuis 70 jusqu’à 120 pieces de canon.

Vaisseaux du second rang. Ces vaisseaux ont depuis 110 jusqu’à 120 piés de quille, trois ponts entiers, dont le troisieme est quelquefois coupé, avec deux chambres dans leur château de pouppe, outre la sainte-barbe & la dunette. Leur port est de 11 à 1200 tonneaux, & ils sont montés depuis 50 jusqu’à 70 pieces de canon.

Vaisseaux du troisieme rang. Ils ont 110 piés de quille, deux ponts, & n’ont dans leur château de pouppe que la sainte-barbe, la chambre du capitaine & la dunette ; mais ils ont un château sur l’avant du second pont, sous lequel sont les cuisines. Leur port est de 8 à 900 tonneaux, & ils sont montés de 40 à 50 pieces de canon.

Vaisseaux du quatrieme rang. La longueur de la quille de ces vaisseaux est de 100 piés ; ils ont deux ponts courant devant arriere, avec leurs châteaux de proue & de pouppe, comme les vaisseaux du troisieme rang. Leur port est de 5 à 600 tonneaux, & ils sont montés de 30 à 40 canons.

Vaisseaux du cinquieme rang. Ces vaisseaux ont 80 piés de quille & même moins, & deux ponts courant devant arriere, sans aucun château sur l’avant. Les cuisines sont entre deux ponts dans le lieu le plus commode ; le port est de 300 tonneaux, & ils sont montés de 18 à 20 pieces de canon.

On appelle ces vaisseaux, vaisseaux de ligne, parce que quoique plus petits que les autres, ils sont encore assez forts pour servir dans un corps d’armée.

Vaisseaux des anciens, (Archit. navale des anc.) tous les vaisseaux armés en guerre chez les anciens, alloient à la voile & à la rame ; mais dans les combats, on abattoit le mât, on plioit les voiles, & on ne se servoit que des rames : les vaisseaux guerroyoient alors comme les oiseaux avec leur bec ; leurs rames leur tenoient lieu d’aîles, & ils tâchoient réciproquement de briser les aîles du vaisseau ennemi ; c’étoit donc dans la rame que consistoit toute la force d’un navire, aussi tiroit-il sa dénomination du nombre des rames.

Les vaisseaux de charge n’alloient qu’à la voile, sans rames, pour épargner les frais de transport. La largeur des vaisseaux de charge étoit ordinairement le quart de la longueur, c’est pour cela qu’on les appelloit γογγύλαι νῆες, rotundæ naves ; les vaisseaux de guerre au contraire se nommoient μακραὶ νῆες, longæ naves, ils étoient au moins huit fois plus longs que larges. Hiéron, roi de Sicile. fit construire des vaisseaux de transport d’une grandeur extraordinaire, dont le plus considérable pouvoit porter 2000 tonneaux, chaque tonneau pesant 4000 livres.

Au reste, on doit à M. Witsen (Nicolas) un des plus célébres magistrats d’Amsterdam, dans le dernier siecle, un traité curieux de l’architecture navale des anciens, & c’est sans contredit ce que nous avons de meilleur en ce genre ; le lecteur y trouvera les lumieres d’un homme de l’art sur les vaisseaux de guerre des anciens, tant à la voile qu’à la rame, leurs vaisseaux de charge, & leurs vaisseaux de transport ; mais les modernes ont bien renchéri dans cette tactique ; César seroit bien surpris s’il revenoit à Londres, qu’il vît l’architecture navale des Anglois, & les bateaux de Civita-Vecchia. (D. J.)

Lilia Gerardi a donné d’après Maxime de Tyr, la description d’un vaisseau d’un roi phénicien, qui s’en servit pour faire un voyage à Troye ; c’étoit un palais flottant, divisé en plusieurs appartemens richement meublés. Il renfermoit des vergers assez spa-

cieux, remplis d’orangers, de poiriers, de pommiers,

de vignes & d’autres arbres fruitiers. Le corps du bâtiment étoit peint de diverses couleurs, & l’or & l’argent y brilloient de toutes parts.

Les vaisseaux de Caligula étoient encore plus magnifiques que celui-ci. L’or & les pierreries enrichissoient leurs pouppes. Des cordes de soie de différentes couleurs en formoient les cordages ; & la grandeur de ces bâtimens étoit telle, qu’elle renfermoit des salles & des jardins remplis de fleurs, des vergers & des arbres. Caligula montoit quelquefois ces vaisseaux ; & au son d’une symphonie formée de toutes sortes d’instrumens ; il parcouroit les côtes de l’Italie. Suétone, in Cali.

Cet empereur a encore fait construire des bâtimens qui ont été célebres dans l’antiquité par leur énorme grandeur ; tel a été celui dont il se servit pour faire venir d’Egypte l’obélisque qui fut posé dans le cirque du vatican, & que Suétone appelle le grand obélisque ; ç’a été le plus grand vaisseau qu’on ait vû sur mer jusqu’au tems de Pline. On dit que quatre hommes pouvoient à peine embrasser le sapin qui lui servoit de mât. Depuis ce naturaliste, on a essayé de construire de pareils bâtimens ; & ceux qu’on compte sont le grand yave, qui parut au siege de Din, lequel avoit son château de pouppe plus haut que la hune des meilleurs vaisseaux de Portugal ; le caraquon de François I ; le grand jacques & le souverain d’Angleterre, du port de 1637 tonneaux, & dont la quille ne pouvoit être tirée que par vingt-huit bœufs & quatre chevaux ; la fortune de Danemarck & la nonpareille de Suéde, portant deux cens pieces de canon ; enfin, la cordeliere & la couronne. La longueur de ce dernier étoit de 200 piés ; sa largeur de 46 ; sa hauteur de 75 ; & toute la mâture de son grand mât, en y comprenant le bâton de pavillon, étoit de 216 pieces. On peut voir la description de ces deux derniers vaisseaux dans l’hydrographie du p. Fournier, pag. 45. & suiv.

Vaisseaux chinois, (Marine de la Chine.) les vaisseaux chinois pour naviger sur mer, & qui different de leurs bateaux & de leurs barques, sont appellés soma ou sommes par les Portugais.

Ces vaisseaux ne peuvent pas se comparer aux nôtres ; les plus gros ne sont que de 250 à 300 tonneaux de port ; ce ne sont, à proprement parler, que des barques plates à deux mâts ; ils n’ont guere que 80 à 90 piés de longueur. La proue coupée & sans éperon, est relevée en-haut de deux especes d’aîlerons en forme de corne, qui font une figure assez bizarre ; la pouppe est ouverte en-dehors par le milieu, afin que le gouvernail y soit à couvert des coups de mer. Ce gouvernail qui est large de cinq à six piés, peut s’élever & s’abaisser par le moyen d’un cable qui le soutient sur la pouppe.

Ces vaisseaux n’ont ni artimon, ni beaupré, ni mât de hune. Toute leur mâture consiste dans le grand mât & mâts de misaine, auxquels ils ajoutent quelquefois un fort petit mât de perroquet, qui n’est pas d’un grand secours. Le grand mât est placé assez près du mât de misaine, qui est fort sur l’avant. La proportion de l’une à l’autre est communément comme 2 à 3, & celle du grand mât au vaisseau ne va jamais au-dessous, étant ordinairement plus des deux tiers de toute la longueur du vaisseau.

Leurs voiles sont faites de nattes de bambou, ou d’une espece de cannes communes à la Chine, lesquelles se divisent par feuilles en forme de tablettes, arrêtées dans chaque jointure par des perches qui sont aussi de bambou. En-haut & en-bas sont deux pieces de bois : celle d’en haut sert de vergue : celle d’en-bas faite en forme de planche, & large d’un pié & davantage, sur cinq à six pouces d’épaisseur, re-