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TUTICUM, (Geog. anc.) ville d’Italie, dans le pays des Salmites, selon Ptolomée, liv. III. cap. j. c’est l’Aquus Tuticus de l’itinéraire d’Antonin.

TUTINGEN, (Géog. mod.) petite ville d’Allemagne, en Souabe, proche le Danube, & dans le domaine du duché de Wirtemberg. (D. J.)

TUTOYMENT, s. m. (Poésie drag.) le tutoyment qui rend le discours plus serré, plus vif, a souvent de la noblesse & de la force dans la tragédie ; on aime à voir Rodrigue & Chimene l’employer. Remarquez cependant que l’élégant Racine ne se permet gueres le tutoyment, que quand un pere irrité parle à son fils, ou un maître à son confident, ou quand une amante emportée se plaint à son amant.

Je ne t’ai point aimé, cruel, qu’ai-je donc fait ?


Hermione dit :

Ne devois-tu pas lire au fond de ma pensée ?


Phédre dit :

Eh bien, connois donc Phedre & toute sa fureur.

Mais jamais Achille, Oreste, Britannicus, &c. ne tutoyent leurs maitresses. A plus forte raison, cette maniere de s’exprimer doit-elle être bannie de la comédie qui est la peinture de nos mœurs. Moliere en a fait usage dans le dépit amoureux, mais il s’est ensuite corrigé lui-même. Voltaire. (D. J.)

TUTRICE, s. f. (Gram. Juris.) est celle qui a la tutelle de ses enfans ou petits-enfans ; les femmes en général ne peuvent être tutrices à cause de la foiblesse de leur sexe, on excepte seulement la mere, & à son défaut l’ayeule, lesquelles peuvent & ont droit d’être tutrices de leurs enfans & petits-enfans, par ce que l’on présume que la tendresse maternelle supplée ce qui peut leur manquer d’ailleurs. Voyez Femme, Tutele, Tuteur. (A)

TUTTI, (Musiq. Italienne.) terme italien employé dans la Musique, & qu’on marque par abréviation d’un T seulement ; ce terme est pour avertir que toutes les parties du grand chœur doivent chanter. Boissard. (D. J.)

TUTUCURIN, TUTOCORIN, TUTUCORY, (Géog. mod.) ville de la presqu’isle occidentale de l’Inde, sur la côte de la pescherie, entre le cap de Comorin, & le passage de Ramanor. Elle est très peuplée, & c’est le seul endroit de la côte où les vaisseaux européens puissent aborder, cette rade étant couverte par deux isles qui en font la sureté. Les Hollandois y ont une forteresse, qui leur sert à faire un grand commerce sur toute cette côte. latit. suivant le pere Noel, 8, 52. (D. J.)

TUTULUS, s. m. (Lirterat.) touffe de cheveux élevée au haut de la tête, & lié avec un ruban pourpre ; ce fut une mode de coëffer qui régna pendant quelque tems chez les hommes & les dames Romaines ; elle consista, en se perfectionnant, à arranger avec art ses cheveux sur la tête en forme de tour ; nous avons des médailles qui nous en donnent la représentation. (D. J.)

TUYAU, s. m. (Invention de Méchanique.) canal ou conduit qui sert à faire entrer l’air, le vent, l’eau, & autres choses liquides dans quelques endroits, ou à les faire sortir. On fait des tuyaux d’étain, de plomb, de laiton, pour monter les orgues ; ces derniers sont en maniere de caisses quarrées, les autres sont ronds.

Les tuyaux pour la conduite & décharge des eaux & pour les machines hydrauliques, se font ordinairement de fer fondu, de plomb, de terre, & de bois. On emploie communément pour ceux-ci du bois de chêne ou d’aulne. Les tuyaux de fer se fondent dans les fonderies & forges de fer ; leur diametre est sui-

vant la volonté de celui qui les ordonne, leur épaisseur proportionnée à leur diametre, & leur longueur

comme de deux piés & demi à trois piés ; on les joint les uns aux autres par le moyen de quatre vis & de quatre écrous à chaque bout, en mettant entre deux pour étancher l’eau, du cuir ou du feutre d’un vieux chapeau.

Les tuyaux de terre se font par les potiers de terre ; ils s’emboîtent les uns dans les autres, ayant tous un bout plus large que l’autre. Pour les mieux unir & empêcher l’eau de s’échapper, on les couvre de mastic & de poix avec des étoupes ou de la filasse. Ils portent à-peu-près la même longueur que ceux de fer ; le diametre est à discrétion, l’épaisseur suivant le diametre.

Les tuyaux de bois se percent par des charpentiers-fontainiers, avec de grandes tarieres de fer de différentes grosseurs & figures qui se succedent les unes aux autres ; les premieres sont pointues & en forme de pique, comme les amorçoirs des charpentiers ; les autres ont une forme de cuiller par le bout, bien acérée & bien tranchante, & augmentent de diametre depuis un pouce jusqu’à six pouces & plus ; toutes se tournent avec une forte piece de bois semblable aux bois d’une tariere ordinaire ; ces tuyaux s’emboîtent les uns dans les autres ; ils se vendent à la toise.

L’on fait de deux sortes de tuyaux de plomb, les uns soudés & les autres sans soudure. Lorsque chaque table de plomb a été fondue de largeur, épaisseur & longueur convenables à l’usage qu’on en veut faire, & qu’elles ont été bien débordées, on les arrondit sur des rondins de bois avec des bourseaux & des maillets plats ; ces rondins sont des rouleaux de grosseur & longueur à discrétion, qui servent comme d’ame & de noyau aux tuyaux, & que l’on en tire lorsque l’ouvrage est arrondi. Les deux bords bien revenus l’un contre l’autre & se joignant parfaitement, on les gratte avec un grattoir, & ayant frotté de poix-resine ce qu’on a gratté, on y jette dessus la soudure fondue dans une cuiller, que l’on applatit avec le fer à souder, & que l’on rape avec la rape, s’il est nécessaire. Pour les petits tuyaux où la soudure ne s’emploie pas fort épaisse, on la fait fondre avec le fer à souder à mesure qu’on l’applique ; s’il y a des endroits où l’on ne veut pas que la soudure s’attache, on les blanchit de craie.

Comme il y a des tuyaux d’un si grand diametre & d’une épaisseur si considérable, qu’il seroit difficile de les souder sans les chauffer en-dedans ; les Plombiers ont pour cela des polastres, c’est-à-dire des especes de poëles quarrées, faites de cuivre fort mince, de deux ou trois piés de long sur quatre ou cinq de large & autant de haut, dont le fond est en rond. Ces poëles s’emplissent de braise, & avec un long manche de bois qu’elles ont à un bout, se coulent dans la cavité du tuyau, & s’arrêtent aux endroits que l’on veut chauffer pour les souder.

Il se fait aussi des tuyaux de cuivre par les fondeurs en sable & en terre ; ils servent particulierement aux corps des pompes pour l’élévation des eaux, & aux endroits des conduites où il y a des regards, & où l’on pose des robinets. (D. J.)

Tuyau aérique, (Hist. des invent. modernes.) plusieurs expériences réitérées ont prouvé que de longs tuyaux aëriques, conduits à-travers les voutes ou plafonds des prisons, & hors de leurs toicts, pour en faire continuellement sortir les mauvaises vapeurs qui s’exhalent des prisonniers, en empêchent effectivement la putréfaction, qui sans cela ne manqueroit pas d’avoir lieu, & même souvent de devenir contagieuse. C’est par cet heureux moyen qu’on a conservé à Londres la vie à quantité de prisonniers françois, & que l’on a sauvé de même un grand nom-