Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 16.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chésilas statuaire ; elle avoit couté à Lucullus soixante grands sesterces, c’est-à-dire environ 6000 francs. (D. J.)

Temple de la Foi, (Antiq. rom.) le temple de la Foi, bâti sur le mont Capitolin, & dans lequel le sénat s’assembloit quelquefois, n’étoit pas éloigné du temple d’Apollon. Numa Pompilius avoit placé la Fidélité parmi les dieux, dans l’objet d’engager chaque citoyen, par l’appréhension de cette divinité, à garder la foi dans les contrats, ce qui est confirmé par Cicéron, liv. III. des Off. & par Pline, l. XXXV. ch. x.

Temple de la Fortune, (Antiq. greq. & rom.) jamais divinité n’eut plus de temple, & sous plus de noms différens. Les Romains surtout se distinguerent en ce genre dans la vue de se la rendre favorable. Servius Tullius lui éleva le premier temple dans le Forum, mais il fut incendié.

Cette déesse avoit un célebre temple à Antium sur le bord de la mer ; on l’appelloit le temple des Fortunes antiatines. Mais le temple de la Fortune le plus renommé dans l’antiquité, est celui que Sylla lui fit à Préneste ; le pavé de ce temple étoit de marqueteie. L’on voyoit dans ce même temple une figure équestre de la déesse toute dorée, & c’est assurement son appanage. Celui que lui fit bâtir Q. Catulus, étoit dédié à la Fortune du jour, Fortunæ hujusce diei, & cette idée est ingénieuse.

Si celui que lui consacra Néron n’étoit pas le plus magnifique, il étoit du-moins le plus singulier, & le plus brillant par la matiere qui y fut employée. Il fut entierement construit d’une sorte de pierre trouvée en Cappadoce, & que Pline nomme phingias, laquelle à une blancheur éblouissante, joignoit la dureté du marbre ; ensorte, dit-on, que les portes fermées on y voyoit clair. Ce temple se trouva dans la suite renfermé dans l’enceinte de la maison d’or de cet empereur.

Cette déesse en avoit un dans la rue neuve, sous le titre de la Fortune aux mamelles, qu’on représentoit à-peu-près comme la Diane d’Ephèse, & comme Isis, dont elle a la coëffure sur quelques figures que le tems nous a conservées.

Domitien en fit construire un autre à la Fortune de retour, Fortunæ reduci, expression qui se trouve souvent sur des médailles, & celle de Fortuna redux.

Le baron Herbert de Cherburi, auteur d’un savant traité sur la religion des gentils, prétend que les Orientaux ni les Grecs n’avoient jamais rendu aucun culte à la Fortune ; & que les Romains étoient les seuls qui l’eussent adorée. Mais ignoroit-il que les habitans d’Antioche avoient dans leur ville un temple magnifique de cette divinité ; que ceux de Smyrne lui avoient consacré la belle statue que Bubalus en avoit fait ; & qu’enfin, au rapport de Pausanias, la Grece étoit remplie de temples, de chapelles, de statues, de bas-reliefs & de médailles de cette même déesse. (D. J.)

Temple des Furies, (Antiq. greq. & rom.) ces déesses redoutables avoient dans plusieurs endroits de la Grece des autels & des temples, sur lesquels, dit Euripide, presque personne n’osoit jetter les yeux. Le temple qu’elles avoient en Achaïe, dans la ville de Ceryme, passoit par un lieu fatal à ceux qui y entroient étant coupables de quelque crime. Oreste leur fit bâtir trois temples célebres, un auprès de l’Aréopage, & les deux autres en Arcadie. Tous leurs temples étoient un asyle assuré pour ceux qui s’y retiroient. La déesse Furine que Cicéron croit avoir été la même que les Furies, avoit un temple à Rome dans la quatorzieme région. (D. J.)

Temples des Graces, (Antiq. greq. & rom.) des divinités si aimables n’ont manqué ni de temples, ni

d’autels. Ethéocle, roi d’Orchomene, fut, dit-on, le premier qui leur en éleva dans sa capitale, & qui régla ce qui concernoit leur culte. Près du temple qu’il fit bâtir en l’honneur des Graces, on voyoit une fontaine que son eau pure & salutaire rendoit célebre par tout le monde. A quelques pas de-là couloit le fleuve Céphise, qui par la beauté de son canal & de ses bords, ne contribuoit pas peu à embellir un si charmant séjour. L’opinion commune étoit que les Graces s’y plaisoient plus qu’en aucun autre lieu de la terre. De-là vient que les anciens poëtes les appellent ordinairement déesses de Céphise, & déesses d’Orchomene.

Cependant toute la Grece ne convenoit pas qu’Ethéocle eût été le premier à leur rendre les honneurs divins. Les Lacédémoniens en attribuoient la gloire à Lacédémon leur quatrieme roi. Ils prétendoient qu’il avoit bâti un temple aux Graces dans le territoire de Sparte, & sur les bords du fleuve Tiase, & que ce temple étoit sans contredit le plus ancien de tous ceux où elles recevoient des offrandes.

Quoi qu’il en soit, elles avoient encore d’autres temples à Elis, à Delphes, à Pergé, à Perinthe, à Byzance, & en plusieurs autres endroits de la Grece & de la Thrace. Dans l’île de Paros une des Cyclades, elles avoient un temple, & un prêtre à vie.

Non-seulement elles avoient des temples particuliers, elles en avoient aussi de communs avec d’autres divinités. Les temples consacrés à l’Amour & à Vénus, l’étoient aussi ordinairement aux Graces. Assez souvent elles avoient place dans ceux de Mercure, pour nous apprendre que le dieu de l’éloquence ne pouvoit se passer de leur secours. Mais surtout les Muses & les Graces n’avoient d’ordinaire qu’un même temple, à cause de l’union intime qui étoit entre ces deux sortes de divinités. Pindare invoque les Graces presqu’aussi souvent que les Muses, il confond leurs jurisdictions ; & par une de ces expressions heureuses qui lui sont familieres, il appelle la poésie le délicieux jardin des graces.

Il seroit trop long de parler des autels qui leur furent consacrés, Pausanias vous en instruira ; je dirai seulement qu’aucune divinité n’en méritoit davantage, puisqu’une de leurs prérogatives étoit de présider à la reconnoissance. On sait que Démosthenes rapporte dans sa harangue pour la couronne, que les Athéniens ayant secouru les habitans de la Chersonnese dans un besoin pressant, ceux-ci pour éterniser le souvenir d’un tel bienfait, éleverent un autel avec cette inscription, χαριτος βώμος : autel consacré à celle des Graces qui préside à la reconnoissance. (D. J.)

Temples d’Hercule, (Antiq. phénic. greq. & rom.) le culte d’Hercule fut porté en Grece, à Rome, dans les Gaules, en Espagne, & s’étendit, selon Pline, jusque dans la Taprobane, île entre l’Inde & le Gange.

Son temple de Tyr étoit célebre ; Hérodote qui y fut attiré par curiosité, nous dit qu’il trouva ce temple orné de magnifiques présens & qu’il y avoit deux statues de ce dieu, une d’or, & l’autre d’une pierre précieuse qui jettoit pendant la nuit un grand éclat ; qu’il avoit demandé aux prêtres si ce temple étoit ancien, & qu’ils lui avoient répondu qu’il l’étoit autant que la ville, qui avoit été bâtie depuis deux mille trois cens ans ; époque plus ancienne que les Grecs.

Il ajoute qu’il y avoit dans la même ville un autre temple dédié à Hercule Thasius, & que s’étant transporté à Thase, il y avoit vu un temple bâti en l’honneur de ce dieu par ceux qui enleverent Europe, événement qui précede de cinq générations la naissance de l’Hercule grec : d’où il conclut qu’Hercule est une ancienne divinité, & que les Grecs font bien d’en