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plus pour s’attendrir. Cependant, s’il est vrai qu’on ne peut donner le brodequin aux rois, il n’est pas moins vrai qu’on ne peut ajuster le cothurne au marchand. La tragédie ne peut consentir à cette dégradation :

Indignatur enim privatis, ac propè socco
Dignis carminibus narrari cæna Thyestæ.

D’ailleurs, l’objet des arts, qui sont tous faits pour embellir la nature, étant de viser toujours au plus grand & au plus noble, où peut-on trouver le tragique parfait, que dans les rois ? sans compter qu’étant hommes comme nous, ils nous touchent par le lien de l’humanité ; le degré d’élévation où ils sont, donne plus d’éclat à leur chute. L’espace qu’ils remplissoient par leur grandeur, semble laisser un plus grand vuide dans le monde. Enfin l’idée de force & de bonheur qu’on attache à leur nom, augmente infiniment la terreur & la compassion. Concluons qu’il n’est pas d’un habile artiste de mettre sur la scene le tragique-bourgeois, ou ce qui revient au même, des sujets non héroïques. (D. J.)

Tragique un, (Poésie dramat.) ou un poëte tragique, veut dire poëte qui a fait des tragédies, &c. Voyez Tragedie. (D. J.)

TRAGIUM, s. m. (Hist. nat. Botan. anc.) Dioscoride décrit cette plante avec les feuilles du scolopendrium, & la racine du raifort sauvage. Ses feuilles ont une odeur de bouc en automne, c’est ce qui lui a fait donner le nom de tragium. Il croît sur les montagnes & les précipices, & Rauwolf l’a trouvé aux environs d’Alep, sur-tout dans les lieux humides. (D. J.)

TRAGOPOGON, s. m. (Hist. nat. Bot.) Tournefort compte douze especes de ce genre de plante, dont les unes sont domestiques, & les autres sauvages ; la principale qu’on cultive dans nos jardins, sous le nom vulgaire de salsifi, ou sersifi, s’appellent en Botanique, Tragopogon hortense, purpureo cæruleum.

Sa racine est grosse comme le petit doigt, longue, droite, tendre, laiteuse, douce au goût. Elle pousse une tige à la hauteur d’environ deux piés, ronde, creuse en dedans, rameuse, garnie de plusieurs feuilles, qui ressemblent à celles du porreau, plus larges, ou plus étroites, longues, pointues.

Ses fleurs naissent aux sommités de la tige & des rameaux ; chacune d’elles est un bouquet à demi fleurons de couleur purpurine tirant sur le bleu, ou sur le noir, soutenue par un calice assez long, mais simple & fendu en plusieurs parties jusque vers la base, avec cinq petites étamines dans le milieu. Lorsque cette fleur est passée, il lui succéde plusieurs semences oblongues, rondes, cannelées, rudes, cendrées, noirâtres dans leur maturité, & garnies d’aigrette.

Toute la plante rend un suc laiteux, visqueux, & doux, qui d’abord coule blanc, & puis jaune ; elle fleurit en été ; on la cultive dans les jardins comme la scorsonnere ou le salsifi d’Espagne, à cause de sa racine agréable au goût, & qui est d’un grand usage dans les cuisines.

TRAGORIGANUM, s. m. (Hist. nat. Botan.) espece d’origan qui croît dans l’isle de Crete, ou de Candie. Il possede une qualité chaude, acrimonieuse, & sert aux mêmes usages que le thim, la sarriette, l’hyssope, & autres plantes semblables. Le tragoriganum d’Espagne à feuilles étroites & à fleurs blanches, de J. Bauhin, 3. 261. a les mêmes propriétés. (D. J.)

TRAGUM, s. m. (Hist. nat. Botan.) nom donné par Matthiolle, Lobel, Gerard, Jean Bauhin, Parkinson, & autres anciens botanistes, à l’espece de kali, que Tournefort appelle kali spinosum, foliis

longioribus & angustioribus, en françois, soude épineuse.

Cette espece de kali croît dans les pays chauds, jette plusieurs tiges à sa hauteur d’environ deux piés couchées à terre, succulentes, chargées de feuilles longues, étroites, pointues, & empreintes d’un suc salé. Ses fleurs naissent dans les aisselles des feuilles petites, à plusieurs pétales, de couleur herbeuse. Quand elles sont tombées, il leur succede des fruits membraneux presque ronds, contenant chacun une semence longuette, roulée en spirale, de couleur noire. (D. J.)

TRAGURIUM, (Géog. anc.) ville de la Dalmatie. Pline, l. III. c. xxij. dit qu’elle étoit connue par son marbre, & Ptolomée, l. II. c. xvij. donne le nom de Tragurium, non-seulement à la ville, mais encore à l’île sur laquelle elle étoit située. Tout le monde convient que c’est aujourd’hui la ville de Traw. Quant à l’ile, il y en a qui la nomment Buia.

TRAGUS, s. m. en Anatomie, est une des éminences de l’oreille extérieure, appellée aussi hircus, parce qu’elle est ordinairement garnie de poils.

Cette éminence est la plus antérieure. Celle qui est la plus postérieure & à laquelle est joint le lobe de l’oreille, se nomme Antitragus.

Tragus, (Géog. anc.) fleuve du Péloponnèse, dans l’Arcadie. Ce fleuve selon Pausanias, l. VIII. c. xxxij. prenoit naissance d’un gros ruisseau, qui après avoir coulé près de la ville de Caphyes, & fait un certain chemin, se déroboit sous terre, puis reparoissoit à Nase, près d’un village nommé le Reunus, & commençoit là à s’appeller Tragus. (D. J.)

TRAHISON, s. f. TRAHIR, v. act. (Morale.) perfidie ; défaut plus ou moins grand de fidélité envers sa patrie, son prince, son ami, celui qui avoit mis sa confiance en nous.

Quand on n’auroit pas assez de vertu pour détester la trahison, quelqu’avantage qu’elle puisse procurer, le seul intérêt des hommes suffiroit pour la rejetter. Dès-lors que des princes l’auroient autorisée par leur exemple, ils méritent qu’elle se tourne contre eux ; & dès-lors personne ne seroit en sûreté. Ceux-là même qui employent la trahison pour le succès de leurs projets, ne peuvent pas aimer les traitres. On sçait la réponse de Philippe roi de Macédoine à deux misérables, qui lui ayant vendu leur patrie, se plaignoient à lui, de ce que ses propres soldats les traitoient de traitres. « Ne prenez pas garde, leur dit il, à ce que disent ces gens grossiers qui appellent chaque chose par son nom ». (D. J.)

La trahison commise envers quelque particulier est punie selon les circonstances par des peines pécuniaires, ou même corporelles s’il s’en est ensuivi quelque crime.

Mais la trahison envers le roi & l’état est encore plus grave ; tel est le crime de ceux qui entrent dans quelque association, intelligence, ligue offensive ou défensive, contre la personne, autorité & majesté du roi, soit entr’eux ou avec autres potentats, républiques & communautés étrangeres ou leurs ambassadeurs, soit dedans ou dehors le Royaume directement ou indirectement par eux ou par personnes interposées, verbalement ou par écrit.

On peut voir sur cette matiere les édits de Charles IX. de 1562, 1568, 1570, l’ordonnance de Blois, art. 94. celles de 1580, 1588, & l’édit de Nantes, en 1598.

La peine ordinaire de ce crime est d’être décapité pour les nobles, la potence pour les roturiers, & même quelquefois la roue pour des gens de basse condition.

Si le criminel a osé attenter à la personne du roi,