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vaisseaux françois de cette province, & partie dans les pays étrangers où elles sont envoyées. Savary. (D. J.)

Toile en coupons, s. f. (Toilerie.) morceaux de batiste claire, ordinairement de deux aunes, qui sont envoyés de Picardie en petits paquets quarrés couverts de papier brun. Savary. (D. J.)

Toiles, s. f. pl. terme de Chasse, ce sont de grandes pieces de toiles bordées de grosses cordes qu’on tend autour d’une enceinte, & dont on se sert pour prendre les bêtes noires. (D. J.)

Toile, s. f. aulæa, (Théatre des anciens.) espece de tapisserie qui bordoit le théatre des anciens ; elle différoit de la nôtre en ce qu’elle étoit attachée par le bas ; ensorte qu’au-lieu que quand nos pieces commencent, on leve la toile qui est attachée par le haut, les Romains la baissoient, la laissoient tomber sous le théatre ; & quand la piece étoit finie, ou même après chaque acte, on la relevoit pour les changemens de décorations, au-lieu que nous la baissons. De-là vient qu’on disoit en latin tollere aulæa, lever la toile, quand on fermoit la scène & que les acteurs se retiroient ; & premere aulæa, baisser la toile, quand on découvroit le théatre pour commencer l’action.

Ovide a peint merveilleusement cette maniere d’ouvrir le théatre chez les anciens, & en a fait usage pour une des plus belles & des plus brillantes comparaisons que je connoisse ; c’est dans le troisieme livre de ses métamorphoses, où, après avoir parlé des hommes armés qui naquirent des dents du dragon que Cadmus avoit semées, il ajoute dans un style élevé :

Indè, fide majus, glebæ cæpere moveri ;
Primaque de sulcis acies apparuit hasta !
Tegmina mox capitum picto nutantia cono.
Mox humeri, pectusque, onerataque brachia telis
Existunt : crescitque seges clypeata virorum.
Sic ubi tolluntur festis aulæa theatris,
Surgere signa solent, primùmque ostendere vultus :
Cætera paulatim, placidoque educta tenore
Tota patent, imoque pedes in margine ponunt.

Alors prodige étonnant & incroyable, les mottes de terre commencerent à s’entr’ouvrir, & du milieu des sillons on vit sortir des pointes de piques, des panaches, des casques, ensuite des épaules & des bras armés d’épées, de boucliers, de javelots ; enfin une moisson de combattans acheva de paroître. Ainsi quand on baisse la toile dans nos théatres, on voit s’élever peu-à-peu les figures qui y sont tracées ; d’abord l’on n’en voit que la tête, ensuite elles se présentent peu-à-peu ; & se découvrant insensiblement, elles paroissent enfin toutes entieres, & semblent se tenir de bout sur le bord de la scène. (D. J.)

TOILÉ, en terme de Blondier, c’est proprement une fleur de telle ou telle forme, entierement remplie, faisant un tissu sans jour, & fabriquée avec des filets doublés de cinq, six & jusqu’à sept brins quand la soie est fine. C’est le toilé qui détermine le nom des blondes de fantaisie. Voyez Blondes de fantaisie. On emploie ordinairement plusieurs fuseaux pour former les filets du toilé plus larges.

Toilé d’une dentelle, (Ouvrage au fuseau.) on appelle le toilé d’une dentelle, ce qui dans le point à l’aiguille se nomme le tissu ou point fermé. Ce nom vient de ce que ce point ressemble assez à de la toile bien frappée. Plus le toilé d’une dentelle est serré, plus l’ouvrage en est bon ; ce terme ne s’applique guere qu’aux dentelles de fil. (D. J.)

TOILERIE, s. f. (Comm. & Manufact.) dans la langue des finances, les synonymes n’ont pas moins d’inconvéniens que dans la langue des arts, & ne fût-ce que relativement aux droits des fermes, il est

essentiel d’expliquer, autant qu’il est possible, la valeur du mot toilerie.

C’est une expression moderne ; on ne la trouve pas une seule fois dans les réglemens des manufactures avant 1718.

Les auteurs des dictionnaires du commerce & de Trévoux définissent ce terme par ceux-ci, marchandise de toile, c’est-à-dire sans doute, faite avec de la toile.

Suivant ces mêmes auteurs, ce mot est exactement synonyme au mot toile, dans le sens où l’on dit, ce marchand ne fait que la toilerie, au lieu de dire, il ne commerce qu’en toiles ; & encore, il se fait beaucoup de toilerie dans tel pays, au lieu de dire on y fabrique beaucoup de toiles.

Une autre acception de ce mot dont ces auteurs n’ont point parlé, c’est celle suivant laquelle il est devenu le nom générique de quelques tissus, dont on ne peut pas dire qu’ils soient des étoffes, ni qu’ils soient des toiles. Il faut se garder de confondre ces dénominations, car dans certains bureaux les mêmes marchandises payeroient des droits plus considérables, étant annoncées comme étoffes, que si on les déclaroit comme toileries.

Il seroit à souhaiter que l’on pût fixer précisement la valeur des mots étoffe, toilerie & toile ; mais les ouvrages de l’art, ainsi que ceux de la nature, renferment tant de variétés, que les nuances de division se perdant l’une dans l’autre, les especes de différens genres se confondent aisément.

Toute méthode de distribution meneroit à des incertitudes, & il n’y a ce me semble, rien de mieux à faire que d’établir quelques points de comparaison, d’après lesquels on essayera de classer les différens tissus.

Ceux qui sont composés en entier de soie ou de laine, ou bien même dont la chaîne ou la trame est faite de l’une de ces deux matieres, sont des étoffes. Quelques-uns de ceux qui sont composés de coton ou de fil, & qui sont extrèmement forts, sont encore des étoffes. Ainsi les draps, les serges, les tiretaines, les taffetas, les ras de S. Cyr, les hyberlines, les velours de coton, les coutils, &c. sont des étoffes.

Les toileries sont des tissus un peu plus legers, dont la laine ou la soie ne font jamais une partie essentielle ; mais dans lesquels elles peuvent néanmoins entrer comme agrément. Les bazins unis & rayés, les siamoises unies, rayées & à fleurs, les nappes & les serviettes ouvrées, les mousselines même, ou toiles de coton de toute espece, sont des toileries.

Sous le nom de toiles, il faut entendre tout tissu simple & uniquement composé de fil de lin ou de chanvre, comme le sont les toiles dont on se sert pour faire des chemises.

Je sens bien que je ne leve point ici toute incertitude. On pourroit demander dans quelle classe on doit metre les toiles à voiles, les toiles à matelats, & beaucoup d’autres ouvrages semblables. Il semble que ce devroit être entre les toiles & les étoffes.

Au reste, je ne prétends pas donner ici de décision. J’ai rapporté seulement ce qui m’a paru de plus instructif & de plus décidé sur l’usage de ces termes, soit dans le discours, soit dans les réglemens rendus depuis celui du 7 Août 1718, pour les fabriques de Rouen. C’est-là où je vois le mot toilerie employé pour la premiere fois. Article de M. Brisson, inspecteur des manufactures & académies de Villefranche en Beaujolois.

TOILETTE, s. f. terme de Manufact. ce mot se dit chez les Marchands & Manufacturiers, d’un morceau de toile, plus ou moins grand, qui sert à envelopper les draps, les serges & autres pareilles marchandises, pour empêcher qu’elles ne se gâtent. Il y a des toilettes blanches, & d’autres teintes en différentes cou-