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lité, pour se faire davantage remarquer, elle fit grand bruit, & passant par-dessus les chaises, elle se plaça in conspectu domini, vis-à-vis, du prédicateur, & le regarda entre deux yeux avec une hardiesse épouvantable, &c. » (D. J.)

TIEN, ou TYEN, s. m. (Hist. mod. Relig.) ce mot signifie en langue chinoise le ciel. Les lettrés chinois désignent sous ce nom l’Etre suprème, créateur & conservateur de l’Univers. Les Chinois de la même secte des lettrés, désignent encore la divinité sous le nom de cham-ti, ou chang-ti, ce qui signifie souverain ou empereur ; ces dénominations donnerent lieu à de grandes contestations entre les missionnaires jésuites & les mandarins qui sont de la secte des lettrés : les premiers ne voulurent jamais admettre le nom de tien, que les lettrés donnoient à la divinité, parce qu’ils les accusoient d’athéïsme, ou du moins de rendre un culte d’idolatrie au ciel matériel & visible. Ils vouloient que l’on donnât à Dieu le nom de tientchu, seigneur du ciel. L’empereur Canghi, dans la vue de calmer les soupçons & les scrupules des missionnaires, qu’il aimoit, donna un édit ou déclaration solemnelle, qu’il fit publier dans tout son empire, par laquelle il faisoit connoître que ce n’étoit point au ciel matériel que l’on offroit des sacrifices, & à qui l’on adressoit ses vœux ; que c’étoit uniquement au souverain maître des cieux à qui l’on rendoit un culte d’adoration, & que par le nom de chang-ti, on ne prétendoit désigner que l’Etre suprème. L’empereur, non content de cette déclaration, la fit souscrire & confirmer par un grand nombre des mandarins les plus distingués de l’empire, & par les plus habiles d’entre les lettrés ; ils furent très-surpris d’apprendre que les Européens les eussent soupçonnés d’adorer un être inanimé & matériel, tel que le ciel visible ; ils déclarerent donc de la maniere la plus authentique, que par le mot tyen, ainsi que par celui de chang-ti, ils entendoient le Seigneur suprème du ciel, le principe de toutes choses, le dispensateur de tous les biens, dont la providence, l’omniscience, & la bonté, nous donnent tout ce que nous possédons. Par une fatalité incompréhensible, des déclarations si formelles n’ont jamais pu rassurer les consciences timorées des missionnaires ; ils crurent que l’empereur & les lettrés ne s’étoient expliqués de cette façon, que par une condescendance & par une foiblesse à laquelle rien ne pouvoit pourtant les obliger ; ils persisterent à les soupçonner d’athéisme & d’idolatrie, quelqu’incompatible que la chose paroisse ; & ils refuserent constamment de se servir des mots de tyen & de chang-ti, pour désigner l’Etre suprème, aimant mieux se persuader que les lettrés ne croyoient point intérieurement ce qu’ils professoient de bouche, & les accusant de quelques restrictions mentales qui, comme on sait, ont été authorisées en Europe, par quelques théologiens connus des missionnaires. Voyez l’histoire de la Chine du R. P. du Halde.

TIENBORD, (Marine) voyez Stribord.

TIENSU, s. f. terme de Relation, idole des peuples du Tonquin, dont parle Tavernier. Ils révérent la Tiensu, dit-il, comme la patrone des arts ; ils l’adorent, & lui font des sacrifices, afin qu’elle donne de l’esprit, du jugement, & de la mémoire à leurs enfans.

TIERAN, ou TIERSAN, (Venerie) il se dit du sanglier, à la troisieme année.

TIERÇAGE, s. m. (Jurisprud.) étoit la troisieme partie des biens du défunt, que le curé de sa paroisse exigeoit autrefois en quelques lieux, pour lui donner la sépulture. Ce tierçage fut depuis reduit au neuvieme, & ensuite aboli. Voyez Alain Bouchard, l. III. des annales de Bretagne ; Brodeau, sur Louet, let. c, som. 4. (A)

TIERCE, s. f. (Théolog.) nom d’une des petites

heures canoniales, composée suivant l’usage présent de l’église romaine, du Deus in adjutorium, d’un hymne, de trois pseaumes sous une seule antienne, d’un capitule avec son répons bref, d’un verset, & d’une oraison.

Des auteurs ecclésiastiques très-anciens, tels que S. Basile dans ses grandes regles, quæst. 37. & l’auteur des constitutions apostoliques, l. VIII. c. xxxiv. attestent que de leur tems, tierce faisoit partie de la priere publique : on la nommoit ainsi tertia, parce qu’on la faisoit à la troisieme heure du jour, selon la maniere de compter des anciens, laquelle répondoit à neuf heures du matin ; & cela en mémoire de ce qu’à cette heure le S. Esprit étoit descendu sur les apôtres. C’est la raison qu’en donne S. Basile. L’auteur des constitutions apostoliques dit que c’étoit en mémoire de la sentence de mort prononcée par Pilate à pareille heure, contre Jesus-Christ. C’est aussi ce que dit la glose dat causam tertia mortis : on ne sait pas précisément de quelles prieres, ni de quel nombre de pseaumes l’heure de tierce étoit composée dans les premiers tems ; mais on conjecture qu’il n’y avoit que trois pseaumes, parce que, dit Cassien, chaque heure canoniale étoit composée de trois pseaumes avec les prieres ; Bingham prétend, mais sans alléguer aucune autorité, qu’on ne récitoit point tierce les jours de dimanche & de fête, parce que c’étoit à cette heure que commençoit la célébration de l’eucharistie : comme si l’on n’eût pas pu anticiper tierce, ou du moins en chanter les pseaumes tandis que le peuple s’assembloit. Voyez Bingham, orig. eccles. t. V. l. XIII. c. ix. §. 2.

Tierce, fievre, (Médec.) fievre qui revient tous les deux jours, accompagnée de froid & de frisson, d’un pouls prompt & fréquent, que suit une chaleur incommode & brulante ; c’est l’espece de fievre la plus commune ; elle attaque indistinctement les personnes de tout âge, de tout sexe, & de tout tempérament.

Symptomes. Lorsque cette fievre est réguliere & vraie, voici ses symptomes les plus ordinaires.

Les articulations sont foibles : on a mal à la tête : on sent aux environs des premieres vertebres du dos, une douleur de reins : il y a constipation & tension douloureuse aux hypocondres. Ajoutez à cela le refroidissement des parties extérieures, sur-tout des narines & des oreilles, des bâillemens, un frisson accompagné quelquefois de tremblement dans tous les membres, un pouls petit, foible, serré, & quelquefois une soif insatiable.

Ces symptomes sont suivis de nausées & de vomissemens ; ensuite il survient une chaleur brulante & seche, qui s’empare de tout le corps ; les joues s’affaissent, le visage devient pâle, la peau retirée, les vaisseaux des piés & des mains paroissent rouges & gonflés, le pouls devient plus grand, plus plein, plus prompt, & la respiration plus pénible ; le malade tient aussi quelquefois des discours sans ordre & sans suite.

Ces symptomes diminuent peu-à-peu, la chaleur se calme, la peau se relâche & s’humecte ; les urines sont hautes en couleur, & sans sédiment, le pouls s’amollit, la sueur succede, & le paroxisme cesse.

Quant à sa durée, elle varie selon la différence des tempéramens & des causes morbifiques ; chez la plûpart des malades, elle est de onze ou douze heures, & dans d’autres davantage ; il y a le jour suivant intermission ; le corps est languissant ; le pouls qui étoit prompt & véhément dans le paroxisme, est alors lent, foible, & ondoyant ; les urines sont plus épaisses, déposent un sédiment, ou portent une espece de nuage ; ce qui marque de la disposition à précipiter un sédiment.

Personnes sujettes à la fievre tierce. Tout le monde