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Le concile de Trente, sess. 5. c. j. affecte aussi une prébende au théologal, qu’il veut qu’on établisse dans chaque cathédrale. Suivant les décisions de la congrégation du concile, les chanoines & les autres prêtres de la cathédrale sont obligés d’assister aux leçons du théologal, & on peut priver celui-ci de sa prébende, s’il manque à satisfaire à ses devoirs.

Dans le cinquieme concile de Milan, on oblige le théologal d’interpréter publiquement l’Ecriture-sainte dans l’église cathédrale tous les jours de fêtes & de dimanches. S. Charles dans son onzieme synode diocésain, enjoint au théologal de faire trois leçons par semaine, & de prêcher quelquefois. Ainsi le théologal qui n’étoit d’abord que le docteur des clercs, est devenu aussi celui du peuple.

Les ordonnances d’Orléans & de Blois prescrivent l’établissement d’un théologal dans les cathédrales ; elles veulent qu’il prêche tous les dimanches & fêtes solemnelles, & qu’il fasse des leçons publiques sur l’Ecriture-sainte trois fois la semaine. Les chanoines sont obligés d’assister à ses leçons, sous peine d’être privés de leurs rétributions ; mais toutes ces dispositions sont aujourd’hui fort négligées. Thomassin, disciplin. de l’Eglise, part. IV. liv. II. c. lxix. & xcvij.

THÉOLOGIE, Theologia, du grec θεὸς, Dieu, & λόγος, discours, prise en général, est la science de Dieu & des choses divines, même entant qu’on peut les connoître par la lumiere naturelle. C’est en ce sens qu’Aristote, Methaphysic. l. VI. appelle théologie, la partie de la philosophie, qui s’occupe à traiter de Dieu & de quelques-uns de ses attributs. C’est encore dans le même sens que les Payens donnoient à leurs poëtes le nom de théologiens, parce qu’ils les regardoient comme plus éclairés que le vulgaire, sur la nature de la divinité & sur les mysteres de la religion.

Les anciens avoient trois sortes de théologie ; savoir, 1°. la mythologique ou fabuleuse qui florissoit parmi les Poëtes, & qui rouloit principalement sur la théogonie ou génération des dieux. Voyez Fable, Mythologie & Théogonie.

2°. La politique, embrassée principalement par les princes, les magistrats, les prêtres, & le corps des peuples, comme la science la plus utile & la plus nécessaire pour la sûreté, la tranquillité & la prospérité de l’etat.

3°. La physique ou naturelle, cultivée par les Philosophes, comme la science la plus convenable à la nature & à la raison, elle n’admettoit qu’un seul Dieu suprème, & des démons ou génies, comme médiateurs entre Dieu & les hommes. Voyez Démon & Génie.

Les Hébreux qui avoient été favorisés de la révélation ont aussi leurs Théologiens, car on peut donner ce titre aux Prophetes suscités de Dieu pour les instruire, aux pontifes chargés par état de leur expliquer la loi, & aux scribes ou docteurs qui faisoient profession de l’interpreter. Depuis leur dispersion, les Juifs modernes n’ont manqué ni d’écrivains, ni de livres ; les écrits de leurs rabbins sont répandus par tout le monde. Voyez Rabbins & Thalmud.

Parmi les Chrétiens, le mot de Théologie se prend en divers sens. Les anciens peres, & particulierement les Grecs, comme saint Basile & saint Grégoire de Nazianze, ont donné spécialement ce nom à la partie de la doctrine chrétienne qui traite de la divinité ; de-là vient que parmi eux on appelloit l’évangéliste S. Jean, le théologien par excellence, à cause qu’il avoit traité de la divinité du Verbe, d’une maniere plus profonde & plus étendue que les autres apôtres. Ils surnommoient aussi S. Grégoire de Nazianze, le théologien, parce qu’il avoit défendu avec zele la divinité du Verbe contre les Ariens ; & en ce

sens les Grecs distinguoient la théologie, de ce qu’ils appelloient économie, c’est-à-dire de la partie de la doctrine chrétienne qui traite du mystere de l’incarnation.

Mais dans un sens plus étendu, l’on définit la Théologie, une science qui nous apprend ce que nous devons croire de Dieu, & la maniere dont il veut que nous le servions ; on la divise en deux especes, qui sont la Théologie naturelle & la Théologie surnaturelle.

La Théologie naturelle est la connoissance que nous avons de Dieu & de ses attributs, par les seules lumieres de la raison & de la nature, & en considérant les ouvrages qui ne peuvent être sortis que de ses mains.

La Théologie surnaturelle ou Théologie proprement dite est une science, qui se fondant sur des principes révélés, tire des conclusions, tant sur Dieu, sa nature, ses attributs, &c. que sur toutes les autres choses qui peuvent avoir rapport à Dieu : d’où il s’ensuit, que la Théologie joint dans sa maniere de procéder l’usage de la raison à la certitude de la révélation, ou qu’elle est fondée en partie sur les lumieres de la révélation, & en partie sur celles de la raison.

Toutes les vérités dont la Théologie se propose la recherche & l’examen, étant ou spéculatives ou pratiques, on la divise à cet égard en Théologie spéculative, & Théologie pratique ou morale. La Théologie spéculative est celle qui n’a pour objet que d’éclaircir, de fixer, de défendre les dogmes de la religion, en tant qu’ils doivent être crus. La Théologie, pratique ou morale, est celle qui s’occupe à fixer les devoirs de la religion, en traitant des vertus & des vices, en prescrivant des regles, & décidant de ce qui est juste ou injuste, licite ou illicite dans l’ordre de la religion.

Quant à la maniere de traiter la Théologie, on la distingue en positive & en scholastique. La Théologie positive, est celle qui a pour objet d’exposer & de prouver les vérités de la religion par les textes de l’Ecriture, conformément à la tradition des peres de l’Eglise & aux décisions des conciles, sans s’attacher à la méthode des écoles, mais en les traitant dans un style oratoire, comme ont fait les peres de l’Eglise.

La scholastique est celle qui emploie la dialectique, les argumens & la forme usitée dans les écoles pour traiter les matieres de religion.

Quelques auteurs pensent, que la différence qui se trouve entre la Théologie positive & la scholastique, ne vient point de la diversité du style & de l’élocution ; en un mot, de la forme scholastique propre à la derniere, & qu’on ne remarque pas dans la premiere ; mais de ce que les Théologiens scholastiques ont renfermé en un seul corps & mis dans un certain ordre, toutes les questions qui regardent la doctrine, au lieu que les anciens ne traitoient des dogmes de la religion, que séparément & par occasion : mais cela ne fait rien quant au style, car les modernes auroient pû traiter tout le plan de la religion en style oratoire, & les anciens n’en traiter que quelques questions en style scholastique. La véritable différence entre la positive & la scholastique dépend donc de la forme du style, puisque pour le fonds les matieres sont les mêmes.

Luther appelloit la Théologie scholastique une discipline à deux faces, composée du mélange de l’Ecriture-sainte & des raisons philosophiques. Mixtione quadam ex divinis eloquiis & philosophicis rationibus tanquam ex centaurorum genere biformis disciplina conflata est. Mais on verra par la suite, qu’il n’en avoit qu’une fausse idée & qu’il en jugeoit par les abus.

M. l’abbé Fleury dans son cinquieme discours sur l’histoire ecclésiastique, ne paroît pas non plus fort favorable à la scholastique ; car après s’être objecté,