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neur, dérivé du mot sérénité, qu’on employoit autrefois pour les rois mêmes, & la France n’en donnoit point d’autre aux rois du nord ; mais depuis que le nom de majesté est devenu commun à tous les souverains rois, le titre de sérénissime est resté aux souverains qui ne sont pas têtes couronnées ; aux républiques de Venise & de Gènes, aux princes du sang de France qu’on traite d’altesse sérénissime, excepté M. le dauphin, pour qui ce titre ne paroît point assez convenable.

SÉRÉNITÉ de l’ame, (Morale) vertu morale, qui a sa source dans l’innocence & le tempérament ; vive sans être emportée, serieuse sans être grave, avec elle habite la paix, avec elle habite la sûreté ; heureux celui qui la conserve, & dont toutes ses passions sont en harmonie au milieu d’un monde enflammé de vices !

Il faut se munir de bonne heure contre les malignes influences de son climat & de son tempérament, en s’accoutumant à faire toutes les réflexions qui peuvent donner de la sérénité à l’esprit, & le mettre en état de soutenir avec courage, les petits maux & les revers de la fortune qui sont communs à tous les hommes. Celui qui possede cette heureuse disposition, n’a point l’imagination troublée, ni le jugement prévenu ; il est toujours le même, soit qu’il se trouve seul ou en compagnie ; affable envers tout le monde, il excite les mêmes dispositions dans tous ceux qui l’approchent ; le cœur s’épanouit en sa présence, & ne peut qu’avoir de l’estime & de l’amitié pour celui dont il reçoit de si douces influences. J’envisage enfin cet état comme une reconnoissance habituelle envers l’auteur de la nature ; la gaieté du printems, le chant des oiseaux, la verdure des prés, la fraîcheur des bois, raniment la sérénité ; la lecture & le commerce d’un tendre ami, y répandent de nouveaux charmes ; en un mot, c’est le souverain bien de la vie que Zénon a cherché sans le trouver. (D. J.)

Sérénité, (Hist. mod.) titre d’honneur qui a été pris autrefois par les rois de France, & même par les évêques. Nos rois de la premiere & de la seconde race, en parlant d’eux-mêmes, disoient, notre sérénité, serenitas nostra ; & on voit qu’Adalard, évêque de Clermont, s’appliquoit la même qualité ; le pape & le sacré college, écrivant à l’empereur, aux rois, au doge de Venise, leur donnent le titre de sérénissime Cæsar, ou rex, ou princeps ; le doge de Venise prend particulierement ce titre de sérénité ; le roi de Pologne le donne aux électeurs, quand il leur écrit ; & l’empereur, lorsqu’il traite avec eux, les qualifie de sérénité électorale, & les princes de l’empire de sérénité ducale ; les plénipotentiaires françois, à Munster, le refuserent à l’électeur de Brandebourg, sur ce que le mot de sérénité n’étoit pas françois, & que le roi ne l’accordoit à personne ; les princes allemands estimoient autrefois plus ce titre que celui d’altesse, mais l’usage a enfin prévalu en faveur de ce dernier, & l’on qualifie sur-tout les électeurs, d’altesse électorale.

SERENUS, (Mythol.) épithète donnée à Jupiter, comme au dieu qui regle le tems serein, la pluie, & les saisons. (D. J.)

SÉREQUE, s. m. (Botan.) nom vulgaire qu’on a donné à l’espece de genêt appellé genista tinctoria frutescens, incana ; par C. B. P. Voyez Genet. (D. J.)

SERES les, (Géog. anc.) Seræ, les Sères occupoient ce que nous appellons la Chine septentrionale, & quelque partie de la grande Tartarie orientale. Ptolomée est le seul des anciens qui ait le mieux parlé de leur pays, quoiqu’avec plusieurs erreurs ; les autres auteurs en sont des peuples d’Ethiopie. Horace, l. I. od. 12, les joint aux Indiens.

Subjectos orientis orae
Seras & Indos.

Lucain les place vers les sources du Nil. Héliodore, l. IX. les compte entre les Blémies. Pomponius Mela les met au centre des Scythes & des Indiens, au lieu de les placer à l’extrémité.

Pausanias, après avoir fort bien décrit les vers-à-soie, se trompe sur les Sères qui les élevoient, & les place dans la partie la plus reculée de la mer Rouge.

Ainsi tout ce que les anciens ont su de vrai touchant les Sères, c’est qu’ils sont les premiers qui aient imaginé de travailler la soie. C’est d’eux qu’elle est venue aux Perses, & des Perses aux Grecs & aux Italiens. La premiere étoffe qu’on en ait vu en Europe, fut après la conquête de la Perse par Alexandre ; & c’étoit encore de ce pays-là que les Romains la tiroient, quand leur empire fut devenu florissant. Voyez Soie. (D. J.)

SERET, le, (Géog. mod.) Sereth, ou Moldawa, riviere de la Turquie en Europe. Elle a sa source dans la Transilvanie, passe dans la Moldavie, où elle arrose Soczowa & Targorod ; entrant ensuite dans la Valaquie, elle y reçoit le Missovo & le Bardalach ; enfin elle se va jetter dans le Danube, un peu au-dessous d’Aniopoli. (D. J.)

SEREUX, adj. (Gram. & Méd.) il se dit du sang & des humeurs, lorsqu’ils sont délayés d’eau. Ainsi séreux est presque synonyme d’aqueux.

SERF, s. m. (Gram. & Jurisprud.) du latin servus, est une personne assujettie à certains droits & devoirs serviles envers son seigneur. L’état des serfs est mitoyen entre celui de la liberté & l’esclavage.

Chez les Romains il y avoit des esclaves qui étoient dans une dépendance absolue de leur maître.

Il y en avoit aussi de semblables en France sous la premiere & la seconde race de nos rois.

Mais ces servitudes personnelles furent abolies peu-à-peu sous la seconde race de nos rois, ou du moins elles furent mitigées ; & comme il y avoit chez les Romains certains esclaves qui étoient attachés à la culture d’un fond particulier, & que l’on appelloit adscriptitios seu addictos glebæ, lesquels cultivoient le fond à leur volonté, moyennant qu’ils rendoient à leur maître, tous les ans, une certaine quantité de blé & autres fruits ; de même aussi en France la plûpart des habitans de la campagne étoient serfs, c’est-à-dire attachés à certains fonds dont ils ne pouvoient être séparés.

Les bâtards & les aubains étoient serfs du roi.

Vers le commencement de la troisieme race nos rois affranchirent plusieurs communautés d’habitans, auxquelles ils donnerent des chartes de commune ou permission de s’assembler. Louis hutin & Philippe le bel affranchirent tous les serfs de leur domaine, moyennant finance.

Le roi donnoit quelquefois à certains serfs en particulier, des lettres par lesquelles ils étoient réputés bourgeois du roi, & cessoient d’être serfs.

Les seigneurs donnoient aussi de semblables terres à leurs serfs, au moyen desquelles ils étoient réputés bourgeois de ces seigneurs.

Cependant plusieurs seigneurs ne consentirent point à l’affranchissement de leurs serfs ; de sorte qu’il est resté des vestiges de cette espece de servitude dans les provinces régies par le droit écrit & dans quelques-unes de nos coutumes, telles que Bourgogne, Bourbonnois, Nivernois & quelques autres.

L’usage de ces différentes provinces & coutumes n’est pas uniforme par rapport aux serfs.

Dans quelques pays les hommes sont serfs de corps, c’est-à-dire, que leur personne même est