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Nunc, dea, nunc sucurre mihi, nam posse mederi
Picta docet templis multa tabella tuis.


« Déesse, secourez-moi maintenant ; car tant de tableaux qui sont dans vos temples, témoignent bien que vous avez le pouvoir de guérir ».

C’est sur cela que les premiers chrétiens, lorsqu’ils relevoient de maladie, offroient au saint dont ils avoient éprouvé le secours, quelques pieces d’or ou d’argent, sur lesquelles étoit gravée la partie qui avoit été malade. Et cette même coutume dure encore aujourd’hui, car on voit des gens qui après être relevés de maladie, se font peindre eux-mêmes dans le triste état où ils étoient, & qu’ils dédient ce tableau au saint par l’intercession duquel ils ont obtenu leur guérison.

Récapitulons en deux mots les sujets des tableaux votifs. Ceux qui s’étoient sauvés du naufrage, faisoient représenter leur avanture sur un tableau qu’ils consacroient dans le temple du dieu à qui ils croyoient devoir leur salut ; ou bien ils le portoient pendu à leur col, pour attirer la compassion & les charités du public. Les avocats employoient aussi quelquefois ce moyen pour toucher les juges, en exposant aux yeux la misere de leurs parties, & la cruauté de leurs ennemis. Enfin ceux qui relevoient de quelque fâcheuse maladie, consacroient souvent un tableau au dieu à qui ils attribuoient leur guérison.

Comme Diagoras étoit dans un temple de Neptune, on lui montra plusieurs tableaux, monument de reconnoissance offerts par des personnes échappées du naufrage. Douterez-vous après cela, lui disoit-on, de l’heureuse puissance de ce dieu ? Je ne vois point, reprit-il, les tableaux de ceux qui ont péri malgré toutes leurs promesses. Autre réflexion.

Tant de tableaux votifs de voyageurs échappés au naufrage, devoient défigurer étrangement les autels de Neptune ; mais de telles institutions étoient nécessaires pour maintenir les hommes sous la puissance des divinités. Horace se moquoit de ce que lui dit Egnatia, que l’encens brûloit & fumoit de lui-même sur une pierre sacrée ; mais ce prétendu miracle en imposoit utilement aux imaginations foibles de la populace. (D. J.)

Tableau, (Littérat.) ce sont des descriptions de passions, d’événemens, de phénomenes naturels qu’un orateur ou un poëte répand dans sa composition, où leur effet est d’amuser, ou d’étonner, ou de toucher, ou d’effrayer, ou d’imiter, &c.

Tacite fait quelquefois un grand tableau en quelques mots ; Bossuet est plein de ce genre de beautés ; il y a des tableaux dans Racine & dans Voltaire ; on en trouve même dans Corneille. Sans l’art de faire des tableaux de toutes sortes de caracteres, il ne faut pas tenter un poëme épique ; ce talent essentiel dans tout genre d’éloquence & de poésie, est indispensable encore dans l’épique.

Tableau, (Marine.) partie la plus haute d’une flûte sous le couronnement, où l’on met ordinairement le nom du vaisseau. On l’appelle miroir dans les autres bâtimens. Voyez Miroir.

Tableau, (Commerce.) se dit d’un cadre qui contient une liste imprimée des noms de plusieurs ou de toutes personnes d’un même corps, communauté, métier ou profession par ordre de date & de réception, ou selon qu’elles ont passé dans les charges.

Ces tableaux se mettent ordinairement dans les chambres ou bureaux de ces corps ou communautés, & quelquefois dans les greffes des jurisdictions des villes, comme on en voit au châtelet de Paris, où sont inscrits les maîtres jurés maçons, charpentiers, greffiers de l’écritoire, écrivains vérificateurs des écritures, &c.

On dit qu’on parvient aux charges d’un corps ou

communauté par ordre de tableau, lorsque ce n’est pas par le choix du magistrat, ou par l’élection des maîtres, mais selon la date de sa réception qu’on devient garde, juré, ou esgard. Voyez Garde, Juré, Esgard.

Tableau mouvant, est un tableau dans lequel sont inscrits dans les bureaux des communautés les noms de tous ceux qui ont été gardes ou jurés. On l’appelle tableau mouvant, parce que chacun de ces noms est écrit séparement sur une petite carte large d’un pouce, insérée dans le tableau ; à mesure qu’il meurt quelqu’un de ceux qui sont ainsi inscrits, le concierge a soin de tirer de sa place le nom du défunt, & de la remplir aussi-tôt du nom de celui qui suit, en faisant remonter tous les autres jusqu’au dernier, ensorte que les places d’en-bas qui demeurent vacantes soient destinées pour les premiers gardes ou jurés qu’on élira. Diction. de Commerce.

Tableau, on donne aussi ce nom à certaines pancartes, où en conséquence des ordonnances ou par ordre de justice, on inscrit les choses que l’on veut rendre publiques. Ces tableaux, lorsque les affaires concernent le commerce, se déposent dans les greffes des jurisdictions consulaires, où il y en a, sinon dans ceux des hôtels-de-ville des juges royaux ou des juges des seigneurs. Selon l’ordonnance de 1573, l’extrait des sociétés entre négocians, & la déclaration de ceux qui sont venus au bénéfice de cession, doivent être insérées dans ces tableaux publics. Voyez Cession. Id. ibid.

Tableau de baie, (Archit.) c’est dans la baie d’une porte ou d’une fenêtre, la partie de l’épaisseur du mur qui paroît au-dehors depuis la feuillure, & qui est ordinairement d’équerre avec le parement.

On nomme aussi tableau le côté d’un pié droit ou d’un jambage d’arcade sans fermeture. (D. J.)

Tableau, (Courroyer.) c’est un morceau de cuir fort dont la figure est quarrée. (D. J.)

Tableau, (Jardinage.) se dit d’une piece de parterre qui occupe tout le terrein en face d’un bâtiment ; ainsi l’on dit un parterre d’un seul tableau. On pourroit encore nommer un parterre qui se répete en deux pieces paralelles, un parterre séparé en deux tableaux.

TABLÉE, s. f. (Tonder. de draps.) ce terme se dit de l’étoffe qui est attachée avec des crochets sur la table à tondre, lorsque cette partie de l’étoffe a été entierement tondue. Chaque tablée porte ordinairement un tiers d’étoffe de long. (D. J.)

TABLER, v. n. (Trictrac.) c’est la même chose que caser ou disposer ses dames convenablement pour le gain de la partie. Voyez Trictrac.

TABLETTE, s. f. (Archit.) pierre débitée de peu d’épaisseur pour couvrir un mur de terrasse, un bord de réservoir ou de bassin. Toutes les tablettes se font de pierre dure.

On donne aussi le nom de tablette à une banquette.

Tablette d’appui, tablette qui couvre l’appui d’une croisée, d’un balcon, &c.

Tablette de bibliotheque, assemblage de plusieurs ais traversans, soutenus de montans, rangés avec ordre & symmétrie, & espacés les uns des autres à certaine distance, pour porter des livres dans une bibliotheque. Ces sortes de tablettes sont quelquefois décorées d’architecture composée de montans, pilastres, consoles, corniches, &c. On les appelle aussi armoires.

Tablette de cheminée, c’est une planche de bois ou une tranche de marbre profilée d’une moulure ronde, posée sur le chambranle, au-bas d’un attique de cheminée.

Tablette de jambe étriere, c’est la derniere pierre qui couronne une jambe étriere, & qui porte quelque moulure en saillie sous un ou deux poitrails. On la