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Une roue désigne les chemins publics raccommodés par ordre du prince, pour la commodité des charrois, comme via Trajana. Au pié de la Fortune, elle désigne l’inconstance : à ceux de Némésis, elle indique le supplice des méchans.

Une espece de siege sur lequel est assis Apollon dans le revers des médailles des rois de Syrie, qu’on prendroit pour une petite montagne percée de plusieurs petits trous, c’est le couvercle qu’on mettoit sur l’ouverture où les prêtres d’Apollon alloient recevoir les oracles, ou se remplir de la fureur sacrée qui les faisoit eux-mêmes répondre en gens inspirés à ceux qui les consultoient.

La toise marquée à chaque pié, signifie une nouvelle colonie dont on avoit toisé l’enceinte, & les champs qui lui étoient attribués. Cette toise se trouve quelquefois accompagnée d’un boisseau, qui désigne le blé qu’on avoit donné pour commencer à ensemencer les terres.

Les déïtés se reconnoissent presque toutes par des symboles particuliers, dont je ne marquerai que les principaux.

Jupiter par la foudre & par l’aigle ; Neptune par le trident & le dauphin. Quelques-uns veulent que le trident marque la troisieme région que tient l’eau dans le monde après le feu & l’air.

Les dieux marins, Mélicerte, Palémon & Portumne, soit qu’ils ne fassent que la même déïté sous trois noms différens, soit qu’on les ait regardés comme trois dieux, n’ont que le même symbole ; car ils sont représentés par un enfant assis sur un dauphin, & ils désignent les jeux de l’Isthme, qui furent institués par Sisyphe en l’honneur du premier de ces dieux.

Junon se reconnoît par le paon qui devint son oiseau, après qu’elle en eut donné la forme à son fidele Argus.

Esculape, Hygée & Salus, par le serpent, qui est le premier inventeur de ce que la Médecine cherche inutilement, savoir le moyen de rajeunir.

Bacchus est couronné de pampres, marque de la joie que le vin inspire ; le pot à la main, toujours prêt à boire, & à faire boire les autres ; une panthere est à ses piés, parce que le vin rend furieux. Un tyrse est à la main de ce dieu, & son char est tiré par des tigres. Il est tantôt barbu, tantôt sans barbe, parce que les jeunes gens boivent par débauche, & les vieillards par nécessité. Quelquefois nud, d’autrefois habillé, parce que l’excès du vin ruine les buveurs, au-lieu que le vin pris modérement entretient la santé, & aide la chaleur naturelle.

Le Canope, dieu d’Egypte, est représenté par un pot de terre, d’où il sort une tête qui porte la fleur d’Isis. Ce pot plein d’eau, percé de tous côtés, mais dont les trous étoient bouchés avec de la cire, éteignit le feu des Perses qui consumoit toutes les autres déïtés. Ainsi furent confondus les prêtres de Mithra, qui se vantoient que leur dieu étoit le plus grand de tous les dieux.

Le dieu Lunus est distingué par le croissant, dont il a les épaules chargées ; par le bonnet arménien qui lui couvre la tête, & par un coq qu’on met auprès de lui ; Latone, mere de Diane, avoit fait du coq son oiseau favori, depuis qu’il lui avoit été d’un grand secours à ses couches.

Astarte, la déesse des Sidoniens, est placée sur un char à deux roues ; c’est ainsi qu’on la menoit dans le pays, pour amasser de l’argent. Quoique l’on ne convienne ni de son nom, ni de sa figure, on croit avec assez peu d’apparence, que c’est l’Astaroth, dont il est parlé dans l’Ecriture. On la voit quelquefois sur un lion, tenant en main la foudre, principalement sur les médailles de Carthage.

Cybele porte la couronne de tours, parce que la terre porte les villes. Elle a des lions à ses piés, qui

marquent ses amours furieuses pour Atys. Le crotale, espece de tambour de basque, est l’instrument dont ses prêtres se servoient, comme ceux d’Isis du sistre.

Iris a pour symbole une étoile, c’est la canicule : un sistre qui rappelle à l’imagination l’harmonie des cieux dans leur mouvement continuel ; une fleur sur la tête, parce que les immortels ne vieillissent point.

Cerès se reconnoît par la couronne d’épis, par le char que traînent des serpens, & par les flambeaux allumés au mont Ethna, pour chercher Proserpine.

Proserpine a pour symbole une grenade, parce que Cerès ayant pressé Jupiter de lui faire rendre sa fille, il la lui promit, pourvu qu’elle n’eût encore rien mangé chez Pluton. Or il se trouva qu’elle avoit mangé quelques grains de grenade.

Diane s’annonce par le croissant, par l’arc, par le carquois, par l’habit de chasseuse, & par le char où des cerfs sont attelés.

Pour la Diane d’Ephèse, son type est très singulier ; elle a une infinité de mamelles, parce qu’on la regarde comme la mere de toutes choses ; elle est soutenue sur des appuis, ayant à ses piés, tantôt deux cerfs, tantôt deux bœufs, & sur la tête un panier de fruits. Tout cela est mystérieux, & se trouve expliqué dans le savant ouvrage de M. Menêtrier, intitulé, Symbolica Dianæ Ephesiæ statua, Rom. 1657, in-4°. Il y en a aussi une édition in-fol.

On donne ordinairement à Minerve le chathuant & le serpent, tous deux symboles de la sagesse, l’un parce qu’il voit clair au milieu des ténèbres, l’autre parce qu’il sait garder adroitement sa tête, & exposer tout son corps pour la couvrir. Il a l’adresse de se dépouiller de sa vieille peau pour en prendre une nouvelle ; enfin, il sait se précautionner contre les charmes de l’enchanteur en se bouchant les oreilles.

Vénus se connoît par la pomme que Pâris lui adjugea, par son fils Cupidon qui est souvent auprès d’elle, & par un gouvernail qu’on lui donne, pour montrer le pouvoir de l’amour ; quelquefois par le bouclier & le casque, pour peindre la force de cette passion. Dion dit que Jules dans les affaires les plus importantes, se servoit d’un cachet où étoit gravé Venus victrix ; & qu’à la bataille de Pharsale, il donna ce mot aux soldats, comme Pompée celui d’Hercules invictus.

La Vénus adorée à Paphos, n’avoit point d’autre figure qu’une pierre taillée en borne, telle qu’on la voit sur quelques médailles de cette ville, & sur celle d’Hadrien, frappée avec ces mots, παφίη σαρδιανῶν.

Jupiter étoit aussi figuré par une grosse pierre ronde coupée par la moitié, tel qu’on le voit sur les médailles avec l’inscription ΖΕΥϹ ΚΑϹΙΟϹ. La tête est de Trajan, & le revers porte ϹΕΛΕΥΚΕΩΝ πίεριακ, où étoit adoré celui que Cicéron appelle Jupiter lapis.

Vesta est représentée ordinairement assise, ou debout, tenant d’une main le palladium, & de l’autre une patere, ou la capeduncula. On trouve même dans le livre de M. Vaillant, une médaille de Julia Pia, où au-lieu d’une patere, Vesta tient une corne d’abondance. D’autres fois elle tient une haste, ou droite, ou transversale. On la voit assise au revers d’une médaille de Vitellius, tenant d’une main la patere, & de l’autre un flambeau allumé ; elle est debout avec les mêmes symboles sur une médaille de Salonine ; l’une & l’autre se trouvent dans le savant ouvrage de M. Spanhein, de Vestâ & Prytanibus, & on verra dans le même livre les différens types de cette déesse, tant sur les médailles greques que sur les latines.

Mars est figuré avec le casque & la cuirasse, tenant une pique ou haste d’une main, & un trophée de l’autre.