Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/676

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cou du criminel. Ils se servoient aussi de ceps ou d’entraves, qui étoient des bois ouverts de distance en distance dans lesquelles on faisoit passer les jambes des prisonniers à une plus ou moins grande distance, selon qu’on vouloit les tourmenter. Prudence a exprimé ce supplice dans ces deux vers de son hymne 4e.

Lignoque plantas inferit
Divaricatis cruribus.

Il en est aussi parlé dans le livre de Job, c. xiij. v. 27, & dans les proverb. c. vij. v. 22.

6°. Le supplice de l’épée ou la décollation. On en a plusieurs exemples dans l’Ecriture. Le pannetier de Pharaon eut la tête tranchée, & après cela son cadavre fut pendu à un poteau, Genes. xl. v. 19. Abimelech, fils de Gédeon, fit décapiter 70 fils de Gédeon ses freres sur une seule pierre, Indic. ix. v. 2. Ceux de Samarie firent couper les têtes aux 70 fils d’Achab, & les envoyerent à Jehu dans des paniers. S. Jean fut décapité dans sa prison par le commandement d’Hérode. Matth. xij.

7°. Le supplice de la scie. On n’en trouve d’exemple que dans la personne d’Isaïe qui fut, dit-on, scié par le milieu du corps depuis la tête jusqu’au cuisses par ordre de Manassé, & l’on ajoute que ce fut avec une scie de bois. Mais le p. Calmet remarque que S. Jérôme & les septante appellent quelquefois du nom de scie certains gros rouleaux de bois armés de pointes de fer qu’on faisoit passer sur les gerbes pour les battre & en tirer le grain, & que ce fut sous une semblable machine que le prophete Isaïe fut déchiré & mis en pieces. Que si l’on veut entendre le passage de S. Paul où il en est parlé, d’une scie proprement dite, il faut reconnoitre que c’étoit une scie de fer à scier du bois, supplice qui n’étoit pas inconnu aux anciens, qui est en usage à Siam, & qu’on prétend aussi usité parmi les Suisses.

8°. Précipiter les coupables du haut d’un rocher. On en a quelques exemples parmi les Hébreux. Amasias, roi de Juda, fit sauter à bas d’un rocher dix mille iduméens qu’il avoit pris à la guerre, II. Paralip. xxv. 12. Les juifs de Nazareth voulurent précipiter Jesus-Christ du haut de leur montagne. S. Jacques le juste fut jetté en bas de l’endroit le plus élevé du temple dans la vallée qui étoit au pié.

9°. Le précipiter dans une tour remplie de cendre ou de poussiere pour les étouffer. C’étoit un supplice plus en usage chez les Perses & les autres peuples voisins des Hébreux, que chez les Hébreux mêmes, où l’on n’en cite aucun exemple particulier à la nation.

10°. Ecraser sous les épines, sous des traineaux ou sous les piés des éléphans sont des supplices inconnus aux peuples d’occident, mais dont on trouve quelques exemples dans l’Ecriture. Il est dit dans les Juges, c. viij. v. 16, que Gédeon étant de retour de la poursuite des Madianites, écrasa sous les épines & les ronces du désert les principaux de la ville de Socoth qui lui avoient insulté. Il mit apparemment du gros bois ou de grosses pierres sur les épines qui couvroient ces malheureux, afin de les écraser & de les faire mourir. C’est ainsi à-peu-près qu’en usoient les Romains envers ceux qu’ils faisoient mourir sous la claie : sub crate necare ; on mettoit le patient sous une claie qu’on chargeoit de grosses pierres. David fit encore souffrir un supplice plus cruel aux Ammonites pris en guerre ; car il les coupa avec des scies ; il fit passer sur eux des chariots armés de fer, les fit couper en pieces avec des couteaux, & les fit jetter dans les fourneaux où l’on cuit les briques, ainsi qu’il est rapporté dans le II. liv. des Rois, c. xij. v. 31. mais par les scies il faut entendre les rouleaux de bois armés de pointes de fer dont nous avons parlé ci-dessus. Les

chariots étoient des machines propres à briser les gerbes, & à en faire sortir le grain, il y en avoit de plusieurs sortes, mais tous étoient armés de pierre ou de fer. Enfin il les fit passer par des couteaux de fer & par un lieu où l’on cuit la brique, soit qu’on entende ces derniers mots d’un four à brique ou du lieu où l’on broie la terre des tuiliers où on écrasa ces malheureux ; supplices horribles, mais tolérés parmi ces peuples qui se permettoient de mettre à mort tout ce qui étoit pris en guerre.

Lex nulla capto parcit, aut pœnam impedit. Senec.

Ptolomée Philopator voulut faire écraser les Juifs sous les piés de ses éléphans ; on dit que c’étoit chez les Carthaginois la peine qu’on infligeoit quelquefois aux deserteurs.

11°. Arracher les yeux & faire perdre la vue, c’étoit des supplices peu communs, & dont l’on n’a des exemples que dans la personne de Samson & de Nabuchodonosor.

12°. Le supplice du chevalet consistoit à étendre violemment le coupable sur une espece de banc avec des cordes & des poulies, & là on le tourmentoit de diverses manieres. Voyez Chevalet.

13°. Couper les cheveux des coupables, paroit être un supplice plus ignominieux que douloureux ; cependant on croit que l’on joignoit la douleur à la honte, qu’on ne se contentoit pas de couper & de raser les cheveux, mais qu’on les arrachoit avec violence, comme on plume un oiseau vivant : c’est la propre signification de l’hébreu & du grec qui se lit dans Néhémie, qui dit qu’il reprit les juifs qui avoient épousé des femmes étrangeres, qu’il en battit quelques-uns & leur arracha les cheveux, decalvavit eos, en grec, μαδαρουσα αυτους. Quelquefois on jettoit de la cendre chaude sur la peau dont on avoit arraché le poil, afin de rendre la douleur plus aiguë & plus vive. C’est ainsi qu’on en usoit à Athènes envers les adulteres, comme le remarque le scholiaste d’Aristophane, & c’est encore ainsi qu’en usent les sauvages d’Amérique qui, lorsqu’ils brûlent leurs prisonniers, leur arrachent la peau de la tête, & leur répandent ensuite de la cendre chaude sur le crâne sanglant & dépouillé.

Ce supplice étoit commun en Perse. Artaxerxès y apporta quelques changemens ; il ordonna qu’au lieu d’arracher les cheveux à ceux de ses satrapes ou généraux qui avoient commis quelque faute, on les obligeroit à quitter la tiare. L’empereur Domitien fit raser les cheveux & la barbe au philosophe Apollonius. En France on coupe les cheveux aux sorciers. On a souvent fait souffrir cette peine aux martyrs de la religion chrétienne. Les Juifs, dans le livre impie qu’ils ont composé de la vie de Jesus-Christ sous le nom de Toledos Jesu, disent que leurs ancêtres lui firent couper les cheveux, & lui firent ensuite frotter la tête d’une liqueur qui empêcha les cheveux de croître, & qui le rendit chauve pour toute sa vie. Mais il y a bien d’autres calomnies & d’autres impertinences dans cet ouvrage. Calmet, Dictionn. de la Bibl. tom. III. pag. 599. & suiv. & dissert. sur les supplices des Hébreux.

SUPPLICIER, v. act. (Gram.) exécuter la sentence de mort prononcée contre un criminel.

SUPPLIQUE, s. f. (Gram. Jurisprud.) est un acte qui contient quelque supplication ou réquisition faite à un supérieur, comme la supplique que fait au pape celui qui requiert de lui la provision d’un bénéfice : cette supplique commence en ces termes : beatissime pater supplicat humiliter sanctitati vestrœ devotus illius orator N…, &c. C’est au bas de cette supplique que le pape ou le préfet met la signature qui tient lieu de provision. Voyez Provision, Signature.

On appelle aussi supplique la réquisition qu’un gra-