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Les sudorifiques élevent le pouls, augmentent la chaleur naturelle, sont véritablement échauffans. Voyez Échauffant. Par conséquent on doit être très-reservé sur l’usage des sudorifiques chez ceux qui sont d’un tempérament vif, ardent, mobile, sec, ou sanguin, & très-plétorique, qui sont sujets à des hémorragies, qui ont la poitrine délicate ou quelque suppuration intérieure, & qui sont dans la fievre hectique ; quoiqu’il ne faille pas croire que des sueurs abondantes & critiques ne puissent être utiles dans les cas ordinaires aux sujets ainsi constitués, nous voulons dire seulement que les fautes dans l’administration de ce secours peuvent être plus dangereuses pour eux que pour les autres.

Quant aux précautions pratiquées & aux contr’indications tirées de l’état de maladie, ces choses découlent d’elles-mêmes de la loi générale, de n’employer ce remede que d’après l’indication propre & directe levée de la tendance de la nature vers cette évacuation ; tendance estimée principalement par le pouls. Nous observerons seulement que ceux qui se gouvernent par cette boussole, ne trouvent pas toujours les sudorifiques contr’indiqués par l’état de très-grande chaleur de fievre très-forte, d’inflammation, d’orgasme ; car non-seulement cet état peut se trouver avec la sueur imminente, mais même la sueur imminente est ordinairement précédée de cet état, & elle en est souvent la plus heureuse solution : tandis que les Médecins qui se conduisent sous les indications artificielles redoutent cet état, méconnoissent l’événement qu’il présage, éloignent cet événement par des saignées ou d’autres remedes à contre-tems, &c. (b)

SUDSUTETE, s. m. (Critiq. sac.) ce mot est employé par saint Paul dans sa I. épître aux Corinthiens, ch. j. v. 20. ποῦ σοφός ; ποῦ γραμματεύς ; ποῦ συνζητητὴς τοῦ αἰῶνος τούτου ; c’est-à-dire, où est le sage ? où est le scribe ? où est le rechercheur de ce siecle ? συνζητητὴς, disquisitor, de συν & ζητέω, quæro. Le rechercheur dont il s’agit ici, est le juif qui étudie la science énigmatique des prophéties, & qui pretend en découvrir le sens. Le passage de saint Paul s’explique par un passage analogue de l’Ecclésiastique, c. xxxix. v. 1. Le sage, le scribe, le savant, recherchera la sagesse de tous les anciens, s’occupera de l’étude des prophéties & du sens caché de leurs sentences ; car il passe sa vie dans l’étude des paraboles énigmatiques. Les Juifs syzétetes se nommoient en hébreu darschan, & leurs explications midrasch. (D. J.)

SUEDE, (Géog. mod.) un des royaumes des plus grands & des plus septentrionaux de l’Europe. Les terres qu’il renferme, sont comprises à-peu-près entre le 30. & le 45. degré de longitude, & entre les 55. & 70 degrés de latitude septentrionale. Il a ainsi dans sa plus grande longueur plus de 350 lieues du septentrion au midi, & plus de 140 d’orient en occident. Il est borné au nord par la Laponie norwégienne ou danoise, & par l’Océan septentrional ; au sud par la mer Baltique & par le golphe de Finlande ; à l’orient par la Moscovie, & au couchant par la Norwege, le détroit du Sund & le Categat.

Ce royaume jouit d’un air sain, qui est cependant si froid & si peu tempéré, qu’à l’hiver qui occupe les trois quarts de l’année, succedent durant deux mois des chaleurs excessives. Il n’y a presque point de milieu entre un froid très-violent & une chaleur étouffante ; & par conséquent il n’y a que peu ou point du tout de printems ni d’automne. Le soleil, dans sa plus grande élevation, est dix-huit heures & demie sur l’horison de Stockolm, & fait pendant quelques semaines un jour continuel ; mais les jours d’hiver sont bien courts à proportion, car le soleil n’y paroît que cinq heures & demie. La lumiere de la lune, la blancheur de la neige & la clarté du ciel

dédommagent foiblement de l’absence du soleil. On se précautionne contre l’âpreté du froid par le moyen des poëles qui sont dans les maisons, & par de bonnes fourures quand on est obligé de sortir. Les pauvres même sont obligés de se servir de peaux de mouton, & autres peaux semblables pour pouvoir résister au froid du climat. La négligence en ce genre seroit fatale, car on ne sauroit être mal-vêtu en Suede, sans courir risque de perdre le nez, les doigts des mains & des piés, & quelquefois même la vie.

La Suede se divise en Suede propre, Gothlande, Nortlande & Finlande. La Suede propre est située entre les Nordelles au nord, l’Ostrogothland au sud, la mer à l’orient, & les gouvernemens de Bahus, d’Aggerhus & de Drontheim vers occident ; elle renferme cinq provinces, savoir l’Uplande, la Sudermanie, la Westmanie, la Néricie & la Dalécarlie.

La Suede est un pays arrosé de rivieres & entrecoupé de grands lacs, qui, avec les montagnes & les forêts, occupent plus de la moitié du royaume. La terre y est ingrate en plusieurs choses utiles à la vie. On y voit des campagnes à perte de vue, couvertes de chênes & de sapins d’une hauteur prodigieuse. La chasse & la pêche produisent de quoi nourrir cette vaste contrée. On chasse les bêtes-fauves pour les manger ; les loups, les renards, les chats sauvages pour en avoir les peaux, qui servent à des fourrures. Il y a quantité d’aigles, de faucons & d’autres oiseaux de proie qui nous sont inconnus. Les renards & les écureuils y deviennent grisâtres, & les lievres blancs comme de la neige. Outre la mer, les lacs y fourmillent de poissons qu’on ne connoît point ailleurs. On y prend quantité de stréamlings, sorte de poisson plus petit qu’un hareng ; on le sale, on l’encaque dans des barrils, & on le vend ensuite dans tout le pays. Le bétail de la Suede est en général petit, ainsi que dans les autres pays septentrionaux. La laine que donnent les moutons est extrêmement grossiere, & ne peut servir qu’aux habits des paysans. Les chevaux, quoique petits, sont légers, vigoureux, forts, & excellens pour le traîneau, qui est l’unique voiture des habitans pendant la longue durée de l’hiver.

Les forêts produisent du bois de charpente & à brûler tant qu’on veut ; on en fait un grand débit, tant pour les bâtimens que pour les mâtures des vaisseaux. Les mines de cuivre & de fer font un objet de commerce considérable. Il y a telle mine de cuivre dont on tire annuellement la valeur d’un million. Outre le fer qui se consume dans le pays, il s’en transporte tous les ans chez l’étranger pour d’assez grosses sommes ; mais voilà toutes les ressources de cette monarchie.

Son origine & son commencement nous sont inconnus. Les révolutions qu’elle a essuyées ont été exactement décrites par Puffendorf, & agréablement par l’abbé de Vertot. La Suede, probablement épuisée d’habitans par les anciennes émigrations dont l’Europe fut inondée, parut comme ensevelie dans la barbarie pendant les huit, neuf, dix & onzieme siecles. Le christianisme qui y fut préché dès le neuvieme, n’y fit aucun progrès. Elle renonça au christianisme dans le siecle suivant, & dans le onzieme siecle, toutes les côtes de la mer Baltique étoient encore payennes.

Les premiers rois de cet état étoient absolus. Les Suénones, dit Tacite, sont tombés sous la domination d’un seul ; ce n’est plus une monarchie tempérée, c’est le pur despotisme. Les Suénones sont les Suédois ; je n’ai pas besoin d’en avertir, ni de remarquer que les choses ont bien changé. Les Suédois, ce peuple de tous les Germains le seul esclave du tems de Tacite, & l’un des plus barbares dans les