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Succursale, s. f. (Gram.) ne se dit que de l’église d’une paroisse qui sert de secours à une autre trop étendue. Ainsi S. Joseph est succursale de S. Eustache.

SUCEMENT, SUCER, (Gram.) termes qui désignent l’action d’attirer à soi, par le moyen de la bouche, des levres & de l’haleine. On les dit aussi des plantes ; & au figuré, des opinions que nous avons reçues de bonne heure, sucées avec le lait.

Sucement des plaies, ou Succion des plaies, (Médec.) la réputation où étoient autrefois les psylles pour guérir la morsure des serpens par la succion, fit que quand les personnes d’un autre pays avoient été mordues d’un serpent, on employoit par préférence un psylle lorsqu’il s’en trouvoit quelqu’un sur le lieu pour sucer la plaie, & en épuiser le venin.

C’est ce qu’on pratiqua néanmoins sans succès par rapport à Cléopatre, qui, au rapport de quelques historiens & poëtes, Velléïus, Paterculus, Florus, Properce, Horace, &c. dont je ne garantis point le témoignage, s’étoit fait piquer par des aspics, pour ne point paroître au triomphe d’Auguste.

Celse remarque judicieusement que quiconque auroit eu la hardiesse d’un psylle pour tenter la même épreuve, auroit également réussi, & que même toute personne peut sans danger sucer une plaie produite par la morsure d’un serpent, pourvu que cette personne-là n’ait point d’ulcere ou d’excoriation dans la bouche. Cette remarque de Celse est confirmée par un grand nombre d’expériences que l’on a faites dans le siecle passé sur le venin des viperes, qui n’est nuisible qu’autant qu’il se mêle immédiatement avec la masse du sang.

Les femmes & les meres des Germains suçoient les blessures de leur maris & de leurs enfans, & tâchoient ainsi de les guérir. Cette méthode de panser les blessures est assez naturelle, & son origine se perd dans l’antiquité la plus reculée. Homere en fait mention au quatrieme livre de l’Iliade. (D. J.)

SUCET, voyez Remore.

SUCHE, (Géog. anc.) ville de l’Ethiopie. Pline, l. VI. c. xxix. la place au voisinage du golfe d’Adulique. Elle tiroit apparemment son nom de Suchus, son fondateur. Strabon, l. XVI. p. 770. parle d’un château bâti par Suchus, & la place dans les terres. Le P. Hardouin veut que ce château & la ville Suche soient la même chose, & il ajoute que le nom & la situation conviennent également à la ville Suaquem d’aujourd’hui. (D. J.)

SUCHET, (Géog. mod.) montagne de la Suisse. Elle fait partie de la joux au-dessus d’Orbe, & est fort élevée. (D. J.)

SUCHUEN, (Géog. mod.) province de la Chine. Elle ne cede ni pour la grandeur, ni pour l’abondance à aucune autre de l’empire. Le fleuve Kiang la coupe en deux parties. La province de Huquang se borne à l’orient, le royaume de Tibet à l’occident, la province de Xensi au nord, & celle de Junnan au midi. Elle produit beaucoup de fer, d’étain & de plomb. Cette province est la sixieme en rang. On y compte huit métropoles, six grandes cités, quatre villes militaires, une cité militaire, & plusieurs forteresses qui en dépendent. Ching-Tu est la capitale de la province. (D. J.)

SUCHUTCH, (Médecine.) maladie à laquelle sont sujets les habitans de Kamtschatka. C’est une espece de gale, qui forme comme une ceinture autour de la partie du corps qui est au-dessous des côtes. On prétend que tout homme dans ce pays a cette maladie une fois en sa vie, comme parmi nous la petite vérole : elle est mortelle lorsque la gale n’entre pas en suppuration, & ne tombe pas ensuite d’elle-même.

SUCHZOW, (Géog. mod.) ville de la Turquie européenne, dans la partie de la Valachie soumise à la Porte, sur la riviere de Strech, avec un château, où les Turcs tiennent garnison. (D. J.)

SUCK, (Géog. mod.) riviere d’Irlande, dans la province de Connaught. Elle sépare le comté de Roscommon du comté de Galloway, & se jette dans le Shanon. (D. J.)

SUÇOIR, (Conchyliol.) c’est dans un coquillage une partie concave qui a la faculté de se resserrer pour s’attacher au corps environnant, & pour pomper l’eau dans laquelle il nage. (D. J.)

SUCRE, s. m. (Hist. nat. Art.) personne n’ignore que le sucre est une substance solide, blanche, douce, agréable au goût, fort en usage dans les offices, les cuisines, & même en pharmacie pour la confection des sirops & la préparation de plusieurs remedes, se dissolvant parfaitement dans l’eau, à laquelle il donne une saveur gracieuse, sans lui communiquer ni couleur ni odeur.

Quoiqu’il soit assez difficile de prescrire le tems auquel le sucre a commencé de paroître sous une forme concrete, il est cependant certain que les anciens l’ont connu, puisqu’au rapport de Théophraste, de Pline & autres, ils faisoient usage du suc de certains roseaux, qui vraissemblablement étoient des cannes à sucre, & dont Lucien entend parler lorsqu’il dit : quique bibunt tenera dulces ab arundine succos. Mais nous ne voyons point que l’antiquité ait possédé l’art de cuire ce suc, de le condenser & de le réduire en une masse solide & blanche, comme nous faisons aujourd’hui ; c’est ce dont il sera question dans cet article, après avoir parlé des cannes à sucre & de leur culture, des machines, des ustensiles & des ingrédiens nécessaires à la préparation de cette production exotique, qui fait un des principaux objets du commerce maritime.

Des cannes à sucre. La canne à sucre, ou canne de sucre, selon l’usage du pays, differe de certains roseaux creux, qu’on nomme cannes d’Espagne, en ce qu’elle est massive ; ses nœuds sont plus rapprochés les uns des autres, son écorce est moins ligneuse, plus mince, & sert d’enveloppe à une multitude de longues fibres parallelement disposées, formant une espece de tissu célulaire, rempli d’un suc doux, agréable, un peu gluant, & ressemblant à du syrop délayé de beaucoup d’eau.

Le corps de la canne est divisé par nœuds, dont les intervalles croissent à proportion qu’ils s’éloignent du pié de la souche : c’est de ces nœuds que sortent les feuilles qui sechent & tombent à mesure que la plante acquiert de l’accroissement, ensorte qu’il n’en reste qu’un bouquet vers le sommet ; elles sont longues, étroites, dentelées imperceptiblement sur les bords, partagées d’une seule nervure, & ressemblant à de grandes lames d’espadon : lorsque la plante fleurit, il sort du milieu de ses feuilles un jet ou fleche très-droite, longue de 30 à 35 pouces, grosse à-peu-près comme l’extrémité du petit doigt, garnie à son sommet d’un grand panache parsemé de petites houpes très-déliées, renfermant la semence.

Les cannes plantées dans une bonne terre croissent ordinairement de six à huit piés de hauteur, portant environ douze à quinze lignes de diametre ; elles acquierent une belle couleur jaune en mûrissant, & le suc qu’elles renferment est savoureux. Celles que produisent les terreins bas & marécageux s’élevent jusqu’à douze & quinze piés, même plus ; elles sont presqu’aussi grosses que le bras ; mais leur suc, quoiqu’abondant, est fort aqueux & peu sucré ; les terreins arides au contraire donnent de très-petites cannes, dont le suc est peu abondant, trop rapproché, & comme à demi-cuit par l’ardeur du soleil.

Culture des cannes. Quoique la fleche ou fleur dont