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de fer : on en ajusta, l’une sur l’autre, de la façon qu’il a été dit, jusqu’à ce qu’on sentît que le sabot portoit sur la marne, dans laquelle on les fit descendre de 2 piés à petits coups de hie, afin de ne pas déranger les molles-bandes ni les jointures. On raccourcit les buises à la hauteur des coffres, & on y introduisit une petite tariere, montée sur des barreaux d’un pouce de grosseur ; elle descendit jusque sur la marne qui étoit entrée dans les buises : on sentit qu’elle rencontroit de la résistance, on la retira avec quelque peu de gravier blanc & transparent, on se servit d’un petit instrument, qui lui ôta toute difficulté : on la redescendit, on la fit entrer d’un pié : on la retira pleine de gravier, & d’une marne grasse, blanche, & collante : on vuida la buise, & on alla avec le même instrument jusqu’à deux piés au-dessous du sabot, on sentit du ferme qu’il ne put entamer, on reprit le petit instrument, qui entra fort aisément : les barreaux dont on se servit, n’avoient qu’un pouce de grosseur : on ne pouvoit pas, de peur de les affoiblir, y faire des trous pour y passer des étriers, comme à ceux qui avoient 16 lignes : au-lieu de cela, on les arrêtoit avec le coin dans la manivelle, soit en les descendant, soit en les remontant : cette manivelle portoit sur deux tasseaux qui tenoient au coffre, & qui l’élevoient assez haut pour que le coin qu’on y frappoit, ne touchât point aux buises : on faisoit sortir ce coin, lorsqu’on vouloit mettre les barreaux en liberté, soit pour les descendre ou les remonter : on les prenoit d’ailleurs à telle hauteur qu’on vouloit, avec un instrument qui étoit attaché au cable de l’engin que les ouvriers nomment le diable.

On retira le petit instrument qui avoit percé un lit de gravier de 5 à 6 pouces ; on redescendit la petite tariere, qui revint toujours remplie de marne, jusqu’à 5 piés de profondeur, où il se trouva un autre lit de gravier. Le petit instrument lui fraya de nouveau son chemin, & on continua à la faire entrer. Elle descendit de 4 piés : on finit la journée. Un ouvrier couvrit la buise avec le bonnet. Le lendemain, à la pointe du jour, il alla le lever ; il sortit un bouillon d’eau qui étonna. Elle parut se mettre de niveau avec l’orifice de la buise ; elle conservoit cependant un mouvement qu’on ne put appercevoir qu’en mettant un petit morceau de papier sur la superficie. On descendit la petite tariere qui fut arrêtée à 20 piés près de la profondeur où l’on avoit été auparavant. On reprit le petit instrument qui perça une espece de tampon de plus d’un pié d’épaisseur de terre, de bois, de cloux & de tout ce que l’eau du fond avoit eu la force de chasser. Jusque-là on en fut d’autant plus surpris, que la petite tariere & le petit instrument n’avoient rien ramené de pareil. Peut-être ces matieres s’étoient-elles rangées de côté, & que l’eau qui commençoit à s’élever les avoit forcées à remonter avec elle, & n’avoit cependant pas eu la force de les conduire plus haut. Il ne faut pas s’étonner si l’instrument tient quelquefois très-fortement dans les buises : il forme avec la marne qui s’y colle extérieurement, & celle dont il se charge par-dessus en remontant, une espece de piston. On se sert, pour le soulager, d’un tourne-à-gauche, avec lequel on tourne & détourne les barreaux ; la marne qui l’enduit extérieurement se délaie : l’eau de dessous se communique à celle de dessus, & la difficulté cesse.

L’obstacle étant levé, l’eau commença à couler avec assez de force ; on continua à se servir alternativement de la tariere & du petit instrument jusqu’à 25 piés de profondeur. On rencontra encore dans cette marche des lits de gravier, & on s’apperçut que l’eau augmentoit sensiblement à mesure qu’on les perçoit. On mesura la quantité qu’il en sortoit par le haut des buises qu’on trouva être d’un pouce & ,

ou 20 pintes de Paris par minute. On voulut mal-à-propos en tirer un plus gros volume ; on redescendit le petit instrument : on ne lui eut pas fait faire quatre tours, que les barreaux se rompirent à 74 piés de profondeur, & en abandonnerent 81 piés dans le fond. La consternation des anciens serviteurs du roi & des ouvriers fut dans ce moment très-grande ; on chercha à les rassurer : on fit faire un instrument extrèmement simple : on le descendit avec les 74 piés de barreaux qu’on avoit retirés : on le joignit à ceux qui étoient dans le fond ; il les saisit avec tant de force, & l’instrument qui étoit engagé dans la marne tenoit si fort, que deux hommes appliqués au treuil de l’engin en rompirent le cable sans qu’il quittât prise : on envoya chercher une chevre à l’arsenal ; dès le premier coup de levier l’eau devint blanche : on jugea que l’instrument avoit fait un mouvement dans le fond ; au deuxieme coup de levier, les barreaux monterent de 4 pouces ; & au troisieme tout fut dégagé. On reprit le cable de l’engin, & on retira les barreaux cassés au grand contentement des spectateurs. On ne jugea pas à propos de s’exposer une seconde fois à un accident de cette nature, d’autant moins que la quantité d’eau dont on étoit sûr suffisoit pour le fort S. François. Elle est augmentée, & donne aujourd’hui premier Décembre 35 pintes par minute mesure de Paris.

Sonde de mer, ou Plomb de sonde, (Marine.) c’est une corde chargée d’un gros plomb, autour duquel il y a un creux rempli de suif, que l’on fait descendre dans la mer, tant pour reconnoître la couleur & la qualité du fond, qui s’attache au suif, que pour savoir la profondeur du parage où l’on est. Ce dernier article est susceptible de beaucoup de difficultés quand cette profondeur est considérable.

On dit être à la sonde, lorsqu’on est en un lieu où l’on peut trouver le fond de la mer avec la sonde ; aller à la sonde, lorsqu’on navige dans des mers ou sur des côtes dangereuses & inconnues, ce qui oblige d’y aller la sonde à la main ; venir jusqu’à la sonde, quand on quitte le rivage de la mer, & qu’on vient jusqu’à un endroit où l’on trouve fond avec la sonde ; & enfin on dit que les sondes sont marquées, & cela veut dire que les brasses ou piés d’eau sont marqués sur les cartes, près des côtes.

Sonde, (terme de Mineur.) le mineur se sert d’une sonde à tariere pour agrandir le trou, lorsqu’il veut crever les galeries par quelque bombe, ou gargouge chargée ; c’est ce qu’il exécute en enfonçant la lombe dans les trous, & en maçonnant ensuite l’ouverture de même qu’aux fourneaux. (D. J.)

Sonde, est un instrument de Chirurgie dont on se sert pour examiner & sonder l’état des blessures, ulceres & autres cavités.

Il y a des sondes de différentes figures suivant leurs différens usages. La sonde pour les plaies & les ulceres, est une verge de fer, d’acier ou d’argent très polie, longue tout au plus de cinq pouces & demi, mousse & boutonnée par ses extrémités, afin qu’elle ne blesse pas les parties dans lesquelles on l’introduit. La plus menue s’appelle stilet, stilus. Elle est de la grosseur d’une aiguille à tricoter ; une de ses extrémités se termine en poire ou en olive, l’autre est un peu mousse. Sa matiere est ordinairement d’argent. On a coutume de la faire recuire pour la plier facilement, & lui donner une figure convenable aux sinuosités ou détours des plaies & des ulceres. Voyez fig. 5. Pl. I. Les autres sondes sont plus ou moins grosses, suivant le besoin. Quelques-unes sont percées par un bout, comme les aiguilles, pour passer les setons : quelques stilets le sont aussi. L’usage des sondes est pour faire connoître la profondeur, l’étendue, le trajet des plaies & des ulceres, leur pénétra-