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ont chacun une cheville, à la reserve d’un qui reste vuide. Ce jeu consiste à prendre toutes ces chevilles les unes après les autres, en sorte qu’il n’en reste plus aucune. Elles se prennent comme on prend les dames au jeu de dames, en sautant par dessus, & se mettant à la place vuide qui est de l’autre côté de celle qu’on prend & qu’on enleve. Ce jeu n’a pas grand attrait quand on en ignore la marche, & n’en a point quand on la sait. (D. J.)

Solitaire, (Jeu de cartes.) c’est une espece de quadrille, ainsi appellé parce que l’on est obligé de jouer seul sans appeller. S’il arrive que les quatre joueurs n’ayent pas assez beau jeu pour jouer sans prendre, ou même pour appeller un médiateur, on est obligé de passer, ne pouvant contraindre spadille à jouer, comme au quadrille ordinaire ; on laisse alors les deux fiches du poulan sur le jeu, & l’on continue d’en faire mettre le même nombre par celui qui mêle jusqu’à ce que l’un des quatre joueurs puisse faire jouer sans prendre, ou avec un médiateur. A l’égard des bêtes, elles augmentent de vingt-huit jettons de plus que tout ce qui se trouve sur le jeu ; & sur les poulans doubles de cinquante-six jettons.

Solitaire, le médiateur solitaire à trois, (Jeu de cartes.) Ce jeu ne se joue à trois que faute d’un quatrieme, & n’en est pas moins amusant. On l’appelle solitaire parce qu’on joue toujours seul.

Il faut ôter dix cartes du jeu ordinaire, c’est-à-dire neuf carreaux & le six de cœur, & laisser le roi de carreau ; par ce moyen on peut jouer dans les quatre couleurs quoiqu’il y en ait une presque supprimée. Par exemple, un joueur ayant les deux as noirs avec des rois pourra jouer en carreau, il aura par conséquent tous les matadors qui lui seront payés comme au médiateur à quatre : de même celui qui a de quoi demander un médiateur, peut demander le roi de carreau, puisque l’on le laisse dans le jeu, ce qui le rend aussi divertissant qu’à quatre. Ce jeu se marque comme au médiateur, c’est-à-dire que celui qui fait met deux fiches devant lui, & l’on ne joue point en appellant, l’on ne renvoie point aussi à spadille. Si l’on n’a pas dans son jeu de quoi jouer un médiateur, ou sans prendre, il faut passer. Alors celui qui mêle doit mettre encore deux fiche, devant lui, ce qui se continue jusqu’à ce qu’un des joueurs fasse jouer. A l’égard des bêtes, elles augmentent toujours de vingt-huit les unes sur les autres comme au médiateur ordinaire à quatre. La seule différence qu’il y ait c’est que la bête faite par remise doit augmenter d’autant de jetons qu’il se trouvera de passe sur le jeu ; au-lieu que celle qui est faite par codille ne sera pas de plus de jettons qu’au médiateur ordinaire à quatre. Comme à ce jeu l’on joue un coup de moins à chaque tour il est convenable de jouer douze tours au-lieu de dix, pour que la reprise soit finie ; pour ce qui regarde le reste, on suit à ce jeu les lois du médiateur à quatre.

Autre maniere de jouer le médiateur solitaire à trois. L’on ôte pour jouer à ce jeu les quatre trois qui n’y sont pas d’un grand usage, ce qui le réduit au nombre de trente-six cartes au-lieu de quarante. Celui qui mêle donne à chacun des joueurs douze cartes, trois à trois ou quatre à quatre, & non autrement, ce qui emploie les trente-six cartes du jeu. Celui qui fait jouer en telle couleur que ce soit est obligé de faire sept levées pour gagner. L’on peut aussi demander un médiateur lorsqu’on n’a que de quoi faire six levées dans son jeu, sinon il faut passer, en suivant pour le reste les regles du médiateur ordinaire à quatre.

SOLITAURILIES, (Antiq. rom.) nom d’un sacrifice solemnel qu’on faisoit chez les Romains, d’un verrat, d’un bélier & d’un taureau. Voyez-en les détails au mot Suove-taurilies. (D. J.)

SOLITUDE, s. f. (Religion.) lieu desert & inhabité. La religion chrétienne n’ordonne pas de se retirer absolument de la société pour servir Dieu dans l’horreur d’une solitude, parce que le chrétien peut se faire une solitude intérieure au milieu de la multitude, & parce que Jesus-Christ a dit : que votre lumiere luise devant les hommes, afin qu’ils voyent vos bonnes œuvres, & qu’ils glorifient votre pere qui est aux cieux. L’âpreté des regles s’applanit par l’accoutumance, & l’imagination de ceux qui croient par dévotion devoir s’y soumettre, est plus atrabilaire, plus maladive, qu’elle n’est raisonnable & éclairée. C’est une folie de vouloir tirer gloire de sa cachette. Mais il est à propos de se livrer quelquefois à la solitude, & cette retraite a de grands avantages ; elle calme l’esprit, elle assure l’innocence, elle appaise les passions tumultueuses que le désordre du monde a fait naître : c’est l’infirmerie des ames, disoit un homme d’esprit. (D. J.)

Solitude, état de, (Droit naturel.) état opposé à celui de la société. Cet état est celui où l’on conçoit que se trouveroit l’homme s’il vivoit absolument seul abandonné à lui-même, & destitué de tout commerce avec ses semblables. Un tel homme seroit sans doute bien misérable, & se trouveroit sans cesse exposé par sa foiblesse & son ignorance à périr de faim, de froid, ou par les dents de quelque bête féroce. L’état de société pourvoit à ses besoins, & lui procure la sûreté, la nourriture & les douceurs de la vie. Il est vrai que je suppose l’état de paix & non pas l’état de guerre, qui est un état destructeur, barbare, & directement contraire au bonheur de la société. (D. J.)

SOLIVE, s. f. (Charpent.) piece de bois, de brin ou de sciage, qui sert à former les planchers ; il y en a de plusieurs grosseurs, selon la longueur de leur portée. Les moindres solives sont de 5 à 7 pouces de gros ; pour les travées, depuis 9 jusqu’à 15 piés. Les solives de 15 piés ont 6 pouces sur 8 ; celles de 21 piés ont 8 pouces sur 10 ; celles de 24 piés 9 pouces sur 11 ; & celles de 27 piés 10 pouces sur 12 : ces proportions sont générales dans toutes les solives. Dans les solives ordinaires & celles d’enchevêtures, elles ne sont pas tout-à-fait les mêmes, comme on le verra dans la table suivante.

Table des dimensions des solives, eu égard à leur longueur.
solives d’enchevêtures. solives ordinaires.
longueur. largeur. hauteur. largeur. hauteur.
6 piés. 5 pouces. 7 pouces 4 pouces 5 pouces
9 6 7 4 6
12 6 8 5 7
15 8 9 6 7
18 9 10 6 8
21 10 11 7 8
24 11 12 8 9

Les solives d’une grande portée doivent être liées ensemble avec des liernes entaillées, & posées en travers par-dessus, ou avec des étrésillons entre chacune. Selon la coutume de Paris, article 206, il n’y a que les solives d’enchevêture qu’on peut mettre dans un mur mitoyen, & dans un mur même non mitoyen ; mais elles doivent porter sur des sablieres. On les pose de champ, & à distances égales à leur hauteur : ce qui donne beaucoup de grace à leur intervalle. Le mot de solive vient du mot solum, plancher.

Solive de brin, solive qui est de toute la longueur d’un arbre équarri.

Solive de sciage, solive qui est débitée dans un gros arbre, suivant sa longueur.