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déclarant que toutes les fois que les deux fils viendront à se joindre, de maniere que le fil aille double sur un seul échevau, il faudra faire tourner l’hasple en arriere, jusqu’à ce qu’on ait trouvé le commencement du doublage. Un fil semblable doit demeurer entre les deux écheveaux, pour former un lien qui servira à les attacher ; avec défense de se servir d’autre matiere : le tout sous les peines susdites, outre la perte de la soie.

Observation. Ce quatrieme article n’est de conséquence qu’à l’égard des croisemens des soies. Il se pratique par-tout du plus au moins.

V. Toutes les soies préparées de cette façon, devront être levées, bien purgées, nettes & égales, selon leur qualité respective.

VI. Les chevalets sur lesquels seront filées les susdites soies, devront avoir les piliers éloignés de deux piés liprandi, 28 pouces les deux, l’un de l’autre, afin que du tour à la lame il se trouve un tel éloignement, que les fils croisés comme il a été dit ci-devant, puissent aller sur le tour plus secs & mieux conditionnés : sous peine contre les maîtres des filatures de 25 livres pour chaque chevalet qui sera disposé différemment.

Observation. Ce sixieme article, qui ordonne que les piliers qui supportent le va-&-vient seront éloignés de deux piés liprandi de ceux qui soutiennent le tour, détruit totalement l’usage des machines nouvellement inventées pour tirer la soie : il faut le prouver. La raison de cet éloignement n’a d’autre objet que celui de donner lieu à la soie de se trouver sur le tour ou hasple plus seche & mieux conditionnée. Or selon le système des auteurs des nouvelles machines, ils prétendent tirer la soie avec plus de célérité ; ce qui ne lui donneroit pas le tems de venir sur le tour aussi seche & aussi conditionnée que l’article l’exige, mais plus humide & plus baveuse, & le détruiroit totalement, si la méthode étoit bonne : au lieu que si l’article est bon, il faut nécessairement que les nouvelles machines soient détruites ; puisque plus la soie se trouvera seche sur le tour, plus elle sera aisée à devider, ce qui est précisément l’objet qu’on doit se proposer. Vide le mémoire envoyé à M. le Tourneur le 15 Janvier 1747 ; à M. de Montaran le 12 Janvier idem.

Deux piés liprandi composent 28 pouces pié de roi.

VII. Les tours sur lesquels se fileront les susdites soies, ne pourront avoir plus de 48 onces de circonférence, ni moins de quarante ; observant néanmoins que tous les tours d’une filature soient d’une mesure égale, sous les peines susdites.

Observation. Les 48 onces de circonférence ordonnées par le septieme article, qui sont autant que 76 pouces, pié de roi, ne sont pas d’une grande conséquence pour le plus ou le moins ; mais il est d’une conséquence extraordinaire que dans une filature tous les tours soient égaux : il seroit même nécessaire que tous les tours du royaume ne fussent pas plus grands les uns que les autres.

VIII. Les écheveaux ne seront point levés de dessus le tour qu’ils ne soient bien secs ; & pour cet effet chaque chevalet sera pourvu de deux tours ; & ceux qui seront doubles, de quatre, sous la peine susdite.

Observation. Ce qui est contenu dans ce huitieme article, se pratique presque par-tout.

IX. Chaque flotte ou écheveau de soie de la premiere & seconde qualité, ne pourra être que de trois à quatre onces pour le plus haut poids ; celle de la troisieme & quatrieme qualités pourra être depuis six onces jusqu’à huit, sous la peine susdite.

Observation. A l’égard du poids des écheveaux mentionnés dans ce neuvieme article, comme il se fait peu de soie de la premiere & seconde qualités, il n’est pas pratiqué.

X. Après que chacune desdites flottes aura été levée, elle sera pliée à deux tours seulement, sans être

liée avec du fil, cottée ou moresquée, faisant passer seulement une tête dans l’autre, de façon qu’on puisse reconnoître facilement si elle aura été travaillée sans fraude, & en conformité du présent reglement ; sous la peine dite ci-dessus.

Observation. Cette façon de tirer la soie de dessus le tour, contenue dans ce dixieme article, n’est simplement que pour examiner sa qualité.

XI. L’eau des bassines sera changée au-moins trois fois par jour, ayant soin de bien purger les cocons de la moresque, afin de rendre la soie bien nette & égale, & sans aucune bave. Il faudra lever au-moins une livre de moresque sur chaque rub de cocons, eu égard à la qualité des susdits cocons, sous peine de 10 livres contre la fileuse, chaque fois qu’elle sera trouvée en contravention.

Observation. Le changement d’eau dans les bassines est très-utile pour donner à la soie cette propreté qui lui est nécessaire. A l’égard de la bourre ou moresque qui enveloppe le cocon, comme elle est très-grossiere en comparaison de celle qui se forme, il est nécessaire d’en lever au-moins une livre sur chaque rub, qui vaut autant que 25 livres de notre poids.

XII. Tout maître de filature sera tenu, à chaque demande qui lui en sera faite par l’ordinaire du lieu, ou par les commis du consulat de Turin, de donner un état de la soie, des douppions, de la chique & de la moresque, le tout distinctement & séparément, sous peine de 25 écus d’or.

Observation. La peine de 25 écus d’or attachée à cet article, n’est précisément que pour savoir la quantité & qualité des soies de chaque particulier, afin qu’elles ne puissent pas être vendues sans payer les droits considérables, qui ne se perçoivent que sur la soie œuvrée, trame ou organsin, c’est-à-dire prête à être mise en teinture ; ce qui fait qu’il est défendu sous des peines très-rigoureuses de sortir aucune soie grézée du Piémont, ou qui ne soit travaillée.

XIII. Le salaire des fileuses sera réglé à journées, & non à raison de tant la livre de la soie qu’elles fileront ; & en cas de contravention, le maître de la filature encourra la perte de toute la soie déja filée, & la fileuse celle de 20 livres, outre la perte de son salaire.

Observation. C’est un usage établi en beaucoup d’endroits de France & d’Italie, de ne payer les fileuses de soie qu’à raison de tant chaque livre, ce qui fait qu’elles négligent la qualité pour s’attacher à la quantité, & par conséquent laissent passer toutes les ordures occasionnées par les mauvais croisemens, qui ne sont négligés que pour avancer l’ouvrage, & gagner plus par conséquent ; au lieu que dès que la fileuse est payée à journée, on a soin de la veiller, & elle a soin de faire mieux.

XIV. Chaque fourneau devra avoir un conduit de telle hauteur, qu’il empêche la fumée d’aller sur le tour, à peine de 25 livres contre le maître.

Observation. Comme la fumée noircit la soie & la rend moins brillante, il est nécessaire de donner au conduit du fourneau une hauteur qui puisse parer à cet inconvénient, très-préjudiciable à la vente.

XV. Les bassines ou chaudieres devront être ovales, minces & profondes d’un quart de ras, environnées d’une couverture de planches, & les chevalets pourvus de leur jeu nécessaire pour faire les croisemens de la soie juste. Chaque jeu aura un pignon de 35 dents ; la grande roue 25 ; l’étoile du tour & la petite roue 22 chacune. Il faudra maintenir un ordre semblable pour bien faire, défendant totalement l’usage des chevalets de corde : le tout sous la peine susdite.

Sept tours de l’hasple donnent cinq tours au va-&-vient.

Sept tours de celui de Rouviere, n’en donnent qu’un.