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conde année ; pour lors elle se trouve de bonne qualité ; celle de l’année n’est point bonne à manger ; lorsque les salaisons sont bien faites, celles de la troisieme & de la quatrieme années sont les plus recherchées, parce qu’alors le poisson se trouve confit dans sa saumure.

On transporte ces salaisons à Nantes & à Bordeaux par la mer, d’où elles passent jusqu’à Cette & à Montpellier par le canal ; on en charge encore quelquefois des bâtimens qui vont en droiture ; par le détroit, à Marseille, à Cette, & autres côtes du Levant.

La grande vente de ces anchois & sardines se fait à la foire de Beaucaire, d’où elles passent dans les lieux de leur consommation.

Avant la venue des Provençaux en Bretagne, on n’y faisoit aucun cas des anchois ; les pêcheurs les rejettoient à la mer aussi-tôt qu’ils les avoient pris ; depuis leur arrivée, on achete les anchois le quadruple des sardines, & quelquefois six fois plus, & quoiqu’ils ne prennent que les plus petits de ces derniers poissons, que les pêcheurs bretons méprisoient, leur choix n’a pas laissé que de doubler le prix ordinaire des sardines, en quoi les intéressés à cette pêche & les pêcheurs trouvent aujourd’hui un profit considérable sur leurs poissons, dans les lieux où on les sale en rouge.

Les marchands presseurs de sardines, de l’amirauté de Quimper, demandent que les barrils de sardines soient marqués à feu, tant du lieu de la salaison, que de celui du presleur qui l’aura préparé, & cela conformément à ce qui se pratique le long des côtes de la Normandie & de la Picardie, pour les harengs blancs de différentes qualités ; cette police si nécessaire aux marchands commissionnaires, auxquels les négocians forains & étrangers ordonnent de gros achats de ces salaisons, empêchera la fraude des petits presseurs, soit par rapport aux sels usés dont ils se servent contre la défense, que pour empêcher le mélange des sardines de mauvaise qualité, ou de celles qui sont surannées, qu’ils mettent au milieu de leurs barrils, & qu’il n’est pas possible de vérifier quand une fois ils sont pressés ; elle mettra aussi en réputation les marchands presseurs qui prépareront leurs salaisons loyales & marchandes, & empêchera les commissionnaires d’être trompés comme ils le sont souvent, en contenant les presseurs, dont les fraudes se découvriront aisément.

Description de la pêche de la sardine à boiter & affarer à la rave, reve, rogue, ou resure, telle qu’elle se pratique aux côtes de Poitou. Cette pêche de la sardine ne se peut faire que de jour ; les pêcheurs n’ont ordinairement qu’un ret ou filet d’une seule piece, qui peut avoit dix-huit à vingt brasses de long quand il est monté, & vingt-cinq brasses non monté, parce que le haut est lâche & flotté, pour donner lieu aux sardines de mailler ; il a quatre brasses de chute, il est amaré à l’arriere de la chaloupe, avec un cordage qui peut avoir quelques brasses au long du corps du bateau, à la tête du ret ; il est soutenu à fleur d’eau par les flottes du liege dont la tête est garnie, & le bas, pour le faire caler de sa hauteur, est chargé de plomb, de boules de terre cuite, ou de pierres percées ; à mesure qu’il y a du poisson maillé dans le ret, les pêcheurs s’en apperçoivent aisément, par le liege qui plonge ; le maître de la chaloupe est placé à l’arriere pour boiter la sardine, en semant la rave avec une cuilliere ; les autres pécheurs soutiennent à la marée, avec deux, quatre ou six avirons, suivant la force du vent, ou de la dérive des courans ; la sardine se maille dans le ret en montant du fond pour venir gober l’appât de la rave, ou résure.

Les pêcheurs relevent leurs rets d’heure en heure, plutôt ou plus tard, quand ils s’apperçoivent qu’il y a du poisson de pris.

Les vents les meilleurs pour faire cette pêche aux côtes du Poitou, sont ceux des rumbs d’aval, qui amenent & poussent le poisson à la côte ; ceux d’est sont tout-à-fait contraires à la pêche, parce qu’ils chassent au large les sardines.

Les sardines du port des Sables sont plus petites que celles que l’on pêche au port de S. Gilles, où les sardines sont même plus grasses & meilleures, & où il n’est pas d’usage d’en faire aucune salaison, tout le poisson de la pêche se consommant à demi salé, dans le pays ; il s’en transporte quelquefois jusqu’à Orléans.

Les pêcheurs ont différentes especes de rets à sardines, comme ceux des sables d’Olone ; ils se servent des filets à plus larges mailles, à mesure qu’ils s’apperçoivent que les poissons des mattes, lites ou bouillons de sardines qui terrissent, sont de plus grosses pieces ; on change les rets alors, & communément ils en ont toujours à bord de deux diverses sortes, pour s’en servir suivant l’occurrence ; les plus larges mailles sont celles dont on se sert ordinairement à la fin de la saison, le poisson augmentant à mesure qu’on s’en approche.

Les pêcheurs de S. Gilles ont de cinq especes de mailles à sardines ; les plus larges ont neuf lignes en quarré, celles qui suivent ont huit lignes, la troisieme sorte de mailles a sept lignes aussi en quarré, la quatrieme en a six, & les plus serrées, qui sont les dernieres, n’en ont au plus que cinq en quarré ; on ne charge le pié ou le bas de ces rets, qu’autant qu’il faut pour les faire seulement caler de leur hauteur, les flottes restant à fleur d’eau.

SARDINIERS, s. m. pl. terme de pêche, rets à sardines. Voyez Sardines.

SARDINS, voyez Jardins & Galeries.

SARDO, s. m. (Diete.) espece d’hydromele ou de liqueur fermentée, en usage chez les Ethiopiens & Abyssins. Pour la faire, on met cinq ou six parties d’eau contre une de miel ; on y joint une ou deux poignées de farine d’orge germé : ce qui occasionne une fermentation ; après quoi l’on y met quelques morceaux d’un bois qui a la propriété de faire disparoitre le goût doucereux & fade du miel ; par-là, cette liqueur devient, dit-on, assez agréable.

SARDOA ou SARDONNE, s. m. (Botan. anc.) nom donné par les anciens à la renoncule à feuilles de ache, autrement dite apiastrum ; c’est un poison reconnu de tout tems pour tel ; mais Pline l’a confondu avec le baume sous le nom d’apiastrum, que les abeilles, dit-il, recueillent en Italie. Le sardoa a été nommé par les Grecs sardonia herba, parce que cette plante abonde dans l’île de Sardaigne, autrefois nommée Sardonia. (D. J.)

SARDOINE, s. f. (Hist. nat. Litholog.) pierre fine d’une couleur jaune, de la nature de l’agate ; elle a beaucoup de transparence, & elle varie pour le plus ou le moins de vivacité de sa couleur, qui est tantôt d’un jaune clair, tantôt d’un jaune plus foncé & tirant un peu sur le brun, tantôt plus ou moins pure & nette. La plûpart des auteurs ont confondu cette pierre avec la cornaline (carneolus), mais il paroit que c’est à tort, puisqu’il est, pour ainsi dire, de l’essence de la cornaline d’être rouge ; & c’est sur cette couleur qu’est fondée la dénomination qu’on lui donne, tandis que la sardoine est toujours jaune. Le nom de cette pierre vient, dit-on, de ce qu’on la trouvoit près de la ville de Sardes, dans l’Asie mineure, ou suivant d’autres, de l’île de Sardaigne, où l’on dit qu’il s’en rencontroit assez communément. Les anciens s’en servoient très-fréquemment pour graver des cachets ; cet usage n’est pas si commun chez les modernes ; on les grave plus ordinairement sur des cornalines. Il y a tout lieu de croire que c’étoit la sardoine que les anciens ont voulu désigner