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tout, afin que quand on voudra le vérifier, on le puisse faire sans confusion.

Or 80 toises, à 2 livres la toise, font 160 livres, dont ôtant le dixieme qui est 16 liv. il reste pour les sappeurs 144 liv. qui distribués à 24 hommes, font 6 liv. pour chacun, ce qui est un gain raisonnable. Ils ne gagneront pas davantage dans le courant du siege, quoique le prix de la sappe augmente à mesure qu’ils approchent de la place, parce que le péril augmentant aussi, il est sûr que plus ils en approcheront, & moins ils feront d’ouvrage.

On a accoutumé de leur payer quelque chose de plus que le prix de la toise courante, pour chaque coupure qu’ils font dans la tranchée, par la raison qu’il y a plus d’ouvrage qu’ailleurs ; cela se peut réduire à doubler le prix de la toise & rien de plus.

Au reste, il y a une chose à quoi les officiers doivent bien prendre garde ; c’est que souvent les sappeurs s’enivrent à la tête de leur sappe, après quoi ils se font tuer comme des bêtes, sans prendre garde à ce qu’ils font ; c’est de quoi il faut les empêcher, en ne leur permettant pas d’y porter du vin qui ne soit mêlé de beaucoup d’eau.

Comme rien n’est plus convenable à la sûreté, diligence & bonne façon des tranchées, que cette maniere d’en conduire les têtes, & de les ébaucher, rien n’est aussi plus nécessaire que d’en régler la conduite ; car outre que la diligence s’y trouvera, il est certain qu’on préviendra beaucoup de friponneries qui s’y font par la précipitation confuse avec laquelle elles se conduisent, qui font qu’il y a toujours de l’embrouillement, & quelqu’un qui en profite. Attaque des places par M. le maréchal de Vauban. Voyez Pl. XVI. de Fortification, fig. 2. n°. 1. le plan d’une sappe, sa vue du côté intérieur, n°. 2. & du côté extérieur, n°. 3. le profil d’une sappe achevée, n°. 4. & le profil représentant l’excavation des quatre sappeurs n° 5. de la même Pl.


SAPPER une muraille, (Fortificat.) c’est creuser la terre qui est au pié d’un mur, afin de le renverser tout-d’un coup faute de soutien. Sapper, selon Daviler, c’est ruiner un ouvrage avec des marteaux, des pioches, des bêches, &c. en étayant la partie supérieure, & en creusant par-dessous, & alors on met le feu aux étais, ou si c’est un rocher, en creusant une mine sous lui.

Pour démolir des murailles fortes & épaisses des vieilles citadelles, &c. on a coutume de se servir de la sappe. Chambers.

SAPPEUR, (Fortification.) soldat du régiment de royal artillerie destiné à travailler dans les sappes.

On instruit dans les écoles d’artillerie les sappeurs à poser les gabions avec adresse, & en s’exposant le moins qu’il est possible. On dresse les gabions avec la fourche & le crochet de sappe, & l’on fait à genouil un boyau de deux piés de profondeur. Le sappeur doit laisser un grand pié de relais entre les excavations & les gabions, afin qu’ils ne culbutent pas dans la tranchée, ce qui arrive assez souvent. Voyez Sappe. (Q)

SAPPHIQUE, adj. (Littérat.) nom d’un vers fort usité dans la poésie greque & latine, ainsi appellé de Sappho à qui l’on en attribue l’invention.

Le vers sapphique consiste en onze syllabes ou cinq piés, dont le premier, le quatrieme & le cinquieme sont des trochées, le second un spondée, & le troisieme un dactyle ; comme,

Vivitar parvo bene, cui paternum
Splendet in mensâ tenui salinum :
Nec leves somnos timor, aut cupido
              Sordidus aufert. Horat.

Ce dernier vers se nomme adonique, & on le joint ordinairement à trois vers sapphiques pour en former une strophe.

Cependant on trouve dans les anciens poëtes tragiques des chœurs composés d’un grand nombre de vers sapphiques qui se suivent immédiatement. En général un vers sapphique est dur quand il n’y a pas une césure après le second pié.

On a tenté, mais sans succès, de faire des vers sapphiques en françois.

SAPRA PALUS, (Géog. anc.) lac dans l’isthme de la Chersonnèse taurique, selon Strabon, l. VII. p. 308. Ce mot σαπρα, féminin de σαπρος, veut dire pourri, corrompu. Le lac que Casaubon croit être le même que Byce est au nord de la Chersonnèse à l’orient de l’isthme qui la joint à la terre-ferme, & qui, comme dit Strabon, le sépare de la mer, c’est-à-dire du Pont-Euxin, ou, ce qui revient au même, du golfe Carcinite. Il étoit plus enfermé qu’il n’est présentement par une langue de terre qui s’avance vers le nord au couchant de ce lac, & qui ne l’empêchoit pas de communiquer avec le Palus Méotide. Cette langue de terre, qui peut bien avoir été anciennement un isthme entier, est encore présentement assez considérable pour marquer l’ancienne étendue du lac Sapra.

2°. Sapra Palus, lac de l’Asie mineure, vers la Troade, auprès d’Astyra, il se décharge dans la mer en un endroit où le rivage est bordé de rocher. (D. J.)

SAQUEBUTE, s. f. (Lutherie.) instrument de musique & à vent ; c’est une espece de trompette différente de l’ordinaire, tant par la figure que par la grandeur. La saquebute est très-propre pour les basses, & elle est construite de maniere qu’on peut la raccourcir ou l’alonger, suivant que l’on veut des tons aigus ou des tons graves. Voyez la fig. Planche de Lutherie. Les Italiens la nomment trombone, les Latins l’appelloient tuba ductilis.

Cet instrument est composé de quatre différentes pieces ou branches, & a ordinairement une espece d’anneau tors dans le milieu, qui n’est que la continuation du tuyau plié deux fois en cercle ; par cette construction il peut aller d’un quart plus bas que son ton naturel. Il a encore deux pieces cachées dans l’intérieur, & qu’on tire avec une barre de fer lorsqu’on veut donner à la saquebute la longueur nécessaire pour un certain ton.

La saquebute a ordinairement 8 piés de long, sans être tirée & sans développer ses cercles. Lorsqu’on l’étend, sa longueur peut aller à 16 piés. L’anneau tors a 2 piés 9 pouces de tour ; on l’emploie comme basse dans tous les concerts d’instrument à vent.

Il y a des saquebutes de différentes grandeurs, selon les différentes parties qu’on veut exécuter. Il y en a particulierement une petite appellée par les Italiens trombone picciolo. & par les Allemands kleine alt-posaune, propre pour les hautes-contres. La partie qui lui convient est appellée trombone primo ou I°. Il y en a une autre plus grande, appellée trombone maggiore, qu’on emploie comme taille ; la partie qu’elle exécute est nommée trombone secondo ou II°. Une troisieme encore plus grande, appellée trombone grosso, & dont la partie est le trombone terzo ou III°. Enfin une autre qui est de toutes celles-là, & dont le son est très-violent, principalement dans les bases, sa partie est appellée trombone quarto ou IV°. ou simplement trombone. Elle a ordinairement pour clé celle d’F ut Fa sur la 4e ligne, & même souvent sur la 5e ligne d’en haut, à cause de l’étendue que cet instrument a dans le bas. Voyez Trompette, & la figure dans nos Pl. de Lutherie.

SARABAITES, s. m. plur. (Hist. ecclésiast.) nom que l’on donnoit autrefois à certains moines errans & vagabonds qui ne suivoient aucune regle approuvée, & alloient de ville en ville, vivans à leur discrétion. Ce mot vient de l’hébreu sarab, se révolter.

Cette étymologie paroît conforme à l’idée que