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qui suivoient l’armée, affreux instrumens de débauche & de dépense, furent chassés sous peine de mort, s’ils reparoissoient ; il ne s’agissoit plus que de rendre le courage aux troupes ; le visir s’en chargeoit, en leur traçant la route de Vienne avec le sabre de son pere Cuprogli.

Il avoit déja remporté une victoire complette sur les Impériaux, soumis l’Albanie, la Bulgarie, & repris toute la Servie, Belgrade même, malgré une garnison de six mille hommes ; enfin l’année suivante il vint camper devant Salankemen, sur les bords du Danube. Le prince Louis de Bade, général des Impériaux, fut à peine arrivé pour le combattre, qu’il sembla n’avoir plus que le parti de la retraite. Les Turcs l’attaquerent avec tant de fureur & de conduite, que sa perte paroissoit inévitable ; le champ de bataille étoit déja couvert de chrétiens expirans ; mais la fortune de Léopold voulut qu’un boulet emportât le visir, qui n’avoit guere joui de sa haute fortune, il périt dans le moment où il étoit le plus glorieux & le plus nécessaire. L’aga des janissaires auroit pu le remplacer : un autre boulet l’étendit mort, & les infideles consternés abandonnerent la victoire, qui n’eut cependant d’autre suite que la prise de Lippa, ville infortunée, sans cesse prise & reprise, également maltraitée par les amis & par les ennemis. Les sauvages dans les forêts sont plus heureux. L’abbé Coyer. (D. J.)

SALANT, adj. (Gram.) épithete que l’on donne aux fontaines dont les eaux sont salées, & aux marais où l’on fait du sel. Voyez Sel, & Salines.

SALAPIA, (Géog. anc.) ancienne ville d’Italie, dans la Pouille daunienne, selon Pline, l. III. c. xj. qui ajoute qu’elle est fameuse par l’amour qu’y fit Hannibal, à une beauté de cette ville. Il y a eû deux villes de ce nom, ou plutôt la même ville a été en deux lieux différens. L’ancienne Salapia, dans sa premiere situation, avoit été bâtie par Diomède, & fut abandonnée à cause de l’air mal-sain ; les habitans s’allerent établir en un lieu plus sain, à quatre milles de là, vers la mer. La ville est détruite, & le lieu conserve le nom de Salpe. (D. J.)

SALAPINA palus, (Géog. anc.) marais voisin de la ville de Salapia, d’où il tiroit son nom ; Lucain, l. V. v. 377. en parle à l’occasion des barques que l’on amassa de tous les endroits :

Quâ recipit Salapina palus, & subditc Sypùs
Montibus.

Vitruve, l. I. c. jv. dit que Marcus Hostilius, qui transporta les habitans d’un endroit à l’autre, après ce changement de lieu, ouvrit ce lac du côté de la mer, & en fit un port pour le municipe de Salapia. Cela s’accorde avec Strabon, l. VI. qui dit que Salapia étoit le port d’Argypine. (D. J.)

SALAPITIUM, (Littérat.) bouffonnerie ; les uns prétendent qu’il faut dire salaputium, & d’autres encore salicipium. Vossius s’est finalement déclaré pour salapitium ; sur cela il nous apprend que salapitta, dans les meilleures gloses, signifie un soufflet, & que de-là est venu que les bouffons, qui se laissoient donner cent coups sur le visage pour divertir le peuple, ont été appellés salpitones, du mot grec σαλπιττειν, qui veut dire sonner de la trompette, parce qu’à l’exemple des trompettes, ils enfloient les joues de leur mieux, afin que les soufflets qu’ils recevoient, fissent plus de bruit, & divertissent davantage les assistans ; en un mot, Vossius tire de cette remarque, l’origine du mot bouffon, parce que bouffer & enfler signifient la même chose. (D. J.)

SALARIA, (Géog. anc.) nom des deux villes de l’Espagne tarragonnoise, l’une au pays des Bastitains, dans les terres, l’autre au pays des Orétains, dans les terres semblablement ; c’est Ptolomée qui les

distingue ainsi : Salaria in Bastitanis, longitude 13. latit. 39. 20. Saluria in Oretanio. Longit. 9. 24. latit. 40.

La derniere est entre la Guadiana & le Tage ; les Espagnols croient que c’est présentement Cazorla. La premiere est aux environs du Xucar, selon les indices de Ptolomée. On a des inscriptions où on lit Col. Jul. Salariensis, & Pline, l. III. c. iij. parle d’une colonie nommée de même. (D. J.)

SALASSES, les, (Géog. anc.) Salassi, ancien peuple d’Italie, dans les Alpes. Strabon, liv. IV. p. 205. en décrit aussi le pays. Le canton des Salasses, dit-il, est grand, dans une profonde vallée entre des montagnes qui l’enferment de tous côtés, quoiqu’en quelques endroits le terrein s’éleve un peu vers les montagnes au-dessous desquelles est cette vallée. Il dit encore que la Doria traverse ce pays-là, & qu’elle est d’une grande utilité aux habitans pour laver l’or. C’est pour cela qu’en quelques endroits ils l’avoient partagée en quantité de coupures, qui réduisoient presqu’à rien cette riviere.

Lorsque les Romains furent une fois maîtres des Alpes, les Salasses perdirent leur or, & la jouissance de leur pays ; l’or fut affermé ; & les Salasses qui conserverent encore les montagnes, furent réduits à vendre de l’eau au fermier dont l’avarice donnoit lieu à de fréquentes chicanes.

De cette maniere ils furent tantôt en paix, tantôt en guerre avec les Romains ; & s’adonnant au brigandage, ils faisoient beaucoup de mal à ceux qui traversoient leur pays, qui est un passage des Alpes. Lorsque Decimus Brutus, s’enfuyant de Modene, faisoit défiler son monde, ils lui firent payer tant par tête ; & Messala, hivernant dans le voisinage, fut obligé d’acheter d’eux du bois de chauffage & des javelots de bois d’orme, pour exercer ses soldats.

Ils oserent même piller la caisse militaire de César, & arrêterent des armées auprès des précipices, faisant semblant de raccommoder les chemins, ou de bâtir des ponts sur les rivieres. Enfin César les subjugua, & les vendit tous à l’encan, après les avoir menés à Ivrée, où l’on avoit mis une colonie romaine pour s’opposer aux courses des Salasses. On compta entre ceux qui furent vendus, huit mille hommes propres à porter les armes, & trente-six mille en tout. Terentius Varron eut tout l’honneur de cette guerre.

Auguste envoya trois mille hommes au lieu où Terentius Varron avoit eu son camp. Il s’y forma une ville qui fut nommée Augusta Prætoria ; c’est aujourd’hui Aoste ou Aouste, qui donne le nom à la vallée qui appartient à la maison de Savoie. (D. J.)

SALAT, le, (Géog. mod.) riviere de France, en Languedoc. Elle a sa source au sommet des Pyrénées, dans la montagne de Salau, passage d’Espagne, court dans le comté de Conserans, & se jette enfin dans la Garonne à Foure. Cette riviere, comme l’Ariege, roule quelques petites paillettes d’or, que de pauvres paysans d’autour de S. Girons, s’occupent à ramasser, mais dont ils tirent à-peine de quoi vivre. (D. J.)

SALAYASIR, s. m. (Ornithol.) nom que les habitans des Philippines donnent à la plus petite espece de canards connue, & qu’on trouve en quantité sur leurs lacs & leurs marais ; ces sortes de canards ne sont pas plus gros que le poing, & ont le plumage admirable.

SALBANDES, s. f. pl. (Hist. nat. Minéral.) les minéralogistes allemands se servent de ce mot pour désigner les parties de la roche d’une montagne qui touchent immédiatement à un filon métallique, & qui séparent ou tranchent la mine d’avec ce qui n’en est point. On pourroit en françois rendre ce mot par lisieres ou ailes, parce que ces salbandes terminent