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fans, qui consiste dans un amaigrissement de toutes les parties du corps au-dessous de la tête, dans une courbure de l’épine & de la plûpart des os longs, dans un gonflement des épiphyses & des os spongieux, dans les nœuds qui se forment à leurs articulations, dans une dépression des côtes dont les extrémités paroissent nouées, dans un retrécissement de la poitrine, & dans un épuisement & une espece de retrécissement des os des îles & des omoplates, pendant que la tête est fort grosse, & que le visage est plein & vermeil. Le ventre est gonflé & tendu, parce que le foie & la rate sont d’un volume considérable. On remarque que les enfans qui en sont attaqués, mangent beaucoup, & qu’ils ont l’esprit plus vif & plus pénétrant que les autres ; & enfin, quand on ouvre ceux qui en meurent, on trouve que les poumons adhérens à la plevre sont livides, skirrheux, remplis d’abscès, & presque toutes les glandes conglobées, gonflées d’une lymphe épaisse.

Glisson, fameux médecin anglois, prétend que la courbure des os arrive par la même raison qu’un épi de blé se courbe du côté du soleil, ou qu’une planche, du papier, un livre & autres choses semblables se courbent du côté du feu, parce que le soleil ou le feu enleve quelques-unes des parties humides qui se rencontrent dans les pores de la surface opposée ; ce qui fait à l’égard de ces surfaces ce que feroient plusieurs coins de bois que l’on mettroit dans les séparations des pierres qui composent une colonne ; car si tous les coins étoient du même côté, le pilier ou la colonne se courberoit du côté opposé.

Voulant faire l’application de cet exemple à la courbure des os, il dit qu’ils se courbent lorsque la nourriture se porte en plus grande abondance d’un côté que d’autre ; parce qu’un côté venant à s’enfler & à croître considérablement, oblige la surface opposée à se courber : c’est pour cette raison que le même auteur ordonne de frotter le côté courbé d’huile pénétrante & de linges chauds, pour rappeller la nourriture dans cette partie, & faire entrer dans ces pores des particules nourricieres pour alonger ces fibres ; & pour favoriser cet effet, il veut qu’on applique des bandages & des attelles aux côtés opposés à la courbure.

Ce système de Glisson a été réfuté par plusieurs auteurs. On ne connoît aucune cause qui puisse produire une distribution inégale de la nourriture dans quelque os ; & l’on voit que, contre cette opinion, les os se courbent du côté où ils devroient recevoir le plus de nourriture.

Mayow propose un système tout différent, où il dit que dans le rhachitis, les cordes tendineuses & les muscles sont desséchés & raccourcis faute de nourriture, à cause de la compression des nerfs de la moëlle de l’épine qui se distribuent à ces organes ; que par conséquent dans leurs différentes contractions, il font courber les os, de même qu’une corde attachée à l’extrémité du tronc d’un jeune arbre l’obligeroit de se courber à mesure qu’il croîtroit.

On a fait quelques objections à ce système que M. Petit adopte dans son traité des maladies des os ; mais à la réfutation de ces objections, par laquelle il prouve que la courbure des os dépend de la contraction des muscles, il ajoute que sans leur mollesse ils ne pourroient se courber. M. Petit explique la courbure de chaque os en particulier par la contraction des muscles qui s’y attachent, la pesanteur du corps & leur courbure naturelle, trois causes qui ne peuvent agir qu’autant que les os seront mous.

La mollesse des os étant la cause occasionnelle de leur courbure, il faut rechercher la cause de cette mollesse dans l’altération des humeurs nourricieres, qui ne peut être produite que par le mauvais usage des choses non-naturelles. Voyez Choses non-naturelles.

Les causes primitives qui paroissent pouvoir agir sur les enfans en altérant leurs humeurs, peuvent se réduire à cinq ; savoir, les régions & les climats différens, les dents qui doivent sortir ou qui sortent, les vers auxquels ils sont sujets, le vice du lait & des autres alimens, & le changement de nourriture quand on les sevre. M. Petit explique fort au long comment ces différentes causes contribuent au vice des humeurs, qui détruisant la consistance naturelle des sucs nourriciers, produit la mollesse des os. L’action des muscles & la pesanteur naturelle du corps agissent principalement sur l’épine à cause de sa courbure naturelle ; les nerfs de la moëlle de l’épine sont comprimés, & c’est à cette compression qu’on peut attribuer tous les phénomenes qu’on remarque dans cette maladie. M. Petit répond à toutes les objections qu’on peut faire contre sa théorie ; & cet auteur finit l’article de rhachitis, en disant que s’il s’est étendu beaucoup plus sur les causes, & sur l’explication des symptomes que sur les formules, c’est qu’il est persuadé que les maladies qui sont bien connues indiquent elles-mêmes le remede qui leur convient. On voit par ce qui a été dit, qu’on peut prévenir cette maladie en prenant autant qu’il est possible, des précautions contre les causes qui la produisent, & qu’on peut la pallier & la guérir même entierement, en s’attachant à bien discerner la cause pour la combattre par les moyens que le régime & les remedes fournissent contre elle. (Y)

RHACOLE, s. f. (Médec.) relâchement de la peau du scrotum, sans qu’il y ait des corps contenus ; indisposition qui défigure la partie.

RHADAMANTHE, (Mythol.) Rhadamanthus ; un des trois juges des enfers, frere de Minos, fils de Jupiter & d’Europe. Il s’acquit la réputation d’un prince d’une grande vertu. Après s’être établi dans quelqu’une des îles de l’Archipel sur les côtes d’Asie, il y gagna tous les cœurs par la sagesse de son gouvernement. Son équité & son amour pour la justice lui valurent l’honneur d’être un des juges des enfers, où on lui donna pour son partage les Asiatiques & les Afriquains. C’est lui, dit Virgile, qui préside au tartare, où il exerce un pouvoir formidable ; c’est lui qui informe des fautes, & qui les punit ; il force les coupables de réveler eux-mêmes les horreurs de leur vie, d’avouer les crimes dont ils ont vainement joui, & dont ils ont différé l’expiation jusqu’à l’heure du trépas :

Gnossius hæc Rhadamanthus habet durissima regna
Castigatque auditque dolos, subigitque sateri,
Quæ quis apud superos, furto lætatus inani
Distulit in serum commissa piacula mortem.

Æneid. lib. VI.

Cependant le poëte n’offre Rhadamanthe que comme un juge éclairé qui inflige des peines ; & au hasard de déplaire à Auguste, il ne s’est pas contenté de jetter des fleurs sur la tombe de Caton, il le peint à la place de Rhadamanthe, donnant seul des lois aux heureux habitans des champs élysées :

Secretosque pios his dantem jura Catonem.

C’est-là un trait de républicain qui fait honneur à Virgile. (D. J.)

RHÆAS, s. m. terme de Médecine, qui signifie la diminution ou la consomption de la caroncule lacrymale qui est située dans le grand angle de l’œil. Voyez Caroncule. Ce mot vient du grec ρειν, couler. Le rhæas est opposé à l’encanthis, qui est l’augmentation excessive de la même caroneule. Voyez Encanthis. Il est causé par une humeur corrosive qui tombe sur cette partie, & qui la ronge & la consomme par degrés ; & souvent par le trop grand usage