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le cheval d’un meunier, vint inconnu à Rennes, pour y joûter dans un tournois qui s’y célébroit, & remporta le prix.

Il ne faut pas néanmoins croire tout ce que les vieilles chroniques disent de lui ; car les auteurs de cette espece d’ouvrages étoient encore entichés de la maladie qui a produit les histoires merveilleuses de Roland, d’Oger le danois, & semblables ; mais on peut consulter sa vie publiée par M. du Chatelet, en 1666 ; elle est meilleure que celle qui avoit été imprimée en très-vieux gaulois, & dans laquelle néanmoins on trouve un passage fort singulier, qui fait voir qu’anciennement les laïcs ont eu le droit d’administrer les sacremens dans certains cas de nécessité.

Cette ancienne vie de du Guesclin nous apprend que dans la bataille de Pontvalin, qu’il gagna sur les Anglois, ses soldats avant que de venir aux mains, se confesserent l’un l’autre, & s’entre donnerent la communion.

« Et en icelle place (ce sont ces termes) se desjuner de pain & de vin qu’ils avoient apporté avec eux. Et prenoient les aucuns d’iceux du pain, & le segnoient au nom du sainct sacrement. Et après ce qu’ils estoient confessés l’un à l’autre de leurs péchés, le usoient en lieu d’escommichement. Après dirent mainte oraison, en dé priant à Dieu, qu’il les gardast de mort, de mahaing & de prison ».

Le mot escommichement ou accommichement est dans Froissard, & vient selon Borel, du mot adcommunicare, communier. On trouve même des traces de ces communions beaucoup plus anciennes encore, dans nos vieux romans ; entre autres au ch. xxxvj. de Galien restauré, où Roland blessé à mort, & couché dans un champ de blé, s’escomiche lui-même de trois brins de blé en herbe, au nom des trois personnes de la très-sainte Trinité.

On sait, dit M. de Voltaire, quels honneurs Charles rendit à du Guesclin. Il fut enterré dans l’église destinée aux tombeaux des rois de France, auprès de celui que Charles V. s’étoit fait préparer. Il a dans le mausolée une lampe de son nom, qui brûle toujours à sa gloire. Son corps fut porté avec les mêmes cérémonies que ceux des souverains. Quatre princes du sang le suivoient. Ses chevaux, selon la coutume du tems, furent présentés dans l’église à l’évêque qui officioit, & qui les bénit en leur imposant les mains. Ces détails sont peu importans ; mais ils font connoître l’esprit de la chevalerie. L’attention que s’attiroient les grands chevaliers célebres par leurs faits d’armes s’étendoit sur les chevaux qui avoient combattu sous eux. (D. J.)

RANDONNÉE, s. f. terme de Chasse, c’est le nom de la course que les chasseurs font après la bête qu’ils chassent.

RANETTE. Voyez Rennette.

RANG, s. m. (Gramm.) ordre institué entre les choses, ou par la nature, ou par l’art ; ou par des conventions, ou par la justice. Entre les êtres Dieu tient le premier rang ; les rois sont au second. Dans les cérémonies chacun marche à son rang. Les citoyens occupent des rangs différens qu’ils doivent à la fortune, à la naissance, à la force, ou au mérite. Un homme de mon rang, dit un grand. J’ai dans cette compagnie le rang d’ancienneté. Rang se dit encore d’une longue suite d’objets placés sur une même ligne ; un rang de soldats ; un rang d’oignons ; un rang d’arbres : il est quelquefois synonyme à tour ; chacun en son rang ou à son tour se mettra sur les rangs. Il est aussi relatif à collocation ; on le met au rang des saints, au rang des hommes illustres de la nation. Voyez dans les articles suivans d’autres acceptions du même mot.

Rang, (Art milit.) ce mot est employé souvent dans l’art militaire. Le rang d’un escadron ou d’un bataillon, est la ligne droite que font les soldats pla-

cés l’un à côté de l’autre. Doubler les rangs, c’est

mettre deux rangs en un, & par ce moyen diminuer la hauteur & augmenter le front. A droite par demi-file, doublez vos rangs. Pour faire ce doublement, en cas que le bataillon soit à six de hauteur, les hommes qui sont depuis la demi-file jusqu’au serre file, c’est-à-dire le quatrieme, le cinquieme & le sixieme rang, quittent leur terrein, marchent en avant, & passent par les intervalles des rangs qui les précedent, se vont ranger à leur droite, à savoir la demi-file avec le chef de file, le cinquieme rang avec le second, & le serre-file avec le serre demi-file ; ainsi la hauteur du bataillon est réduite à la moitié.

Rang est encore l’ordre établi pour la marche & pour le commandement des différens corps de troupes, & de divers officiers qui sont en concurrence les uns avec les autres. Diction. milit. (D. J.)

Rang, (Marine.) terme dont on se sert pour distinguer la grandeur & la capacité des vaisseaux de guerre. On a coutume de distinguer les vaisseaux de différentes grandeurs par des classes qu’on appelle rang ; les plus gros sont du premier rang, & les plus petits sont du troisieme ; passé ce terme, ce sont des frégates que l’on distingue par le nombre des canons qu’elles portent ; les plus petites s’appellent des corvettes.

Outre la distinction des vaisseaux par rang, on divise encore chaque rang en deux classes, qu’on nomme ordre : ainsi on dit des vaisseaux du premier rang, premier ordre ; du premier rang, deuxieme ordre ; du deuxieme rang, premier ordre, &c.

Nous avons cru qu’il convenoit de commencer par donner une idée de cette division des vaisseaux, avant que de parler de leur construction.

Les vaisseaux du premier rang, premier ordre, ont trois ponts, trois batteries complettes, un gaillard d’arriere placé, un barot en-avant du grand mât, un château d’avant & une dunette, un barot en-avant du mât d’artimon ; ces vaisseaux portent depuis 100 jusqu’à 120 canons.

Les vaisseaux du premier rang, deuxieme ordre, ont trois ponts, trois batteries complettes, un gaillard d’arriere jusqu’au sep de grande drisse, une dunette jusqu’au mât d’artimon, & un château d’avant de 32 piés de long ; cet ordre comprend tous les vaisseaux qui portent moins de 110 canons, mais plus de 90.

Les vaisseaux du deuxieme rang, premier ordre, ont trois ponts, trois batteries complettes, un gaillard, un barot en-avant du grand mât, une dunette de trois barots en-arriere du mât d’artimon, & un château d’avant de 32 piés de long ; ces vaisseaux portent depuis 90 jusqu’à 74 canons exclusivement.

Les vaisseaux du deuxieme rang, deuxieme ordre, ont deux ponts, deux batteries complettes, un gaillard jusqu’au grand mât, un château d’avant de 32 piés de long, & une dunette d’un barot en-avant du mat d’artimon ; cet ordre comprend les vaisseaux depuis 74 canons jusqu’à 60 exclusivement.

Les vaisseaux du troisieme rang, premier ordre, ont deux ponts. deux batteries complettes, un gaillard jusqu’au grand-mât, un château d’avant de 28 piés de long, une dunette jusqu’au mât d’artimon ; cet ordre comprend les vaisseaux qui portent depuis 60 canons jusqu’à 50 exclusivement.

Les vaisseaux du troisieme rang, deuxieme ordre, qu’on commence à appeller frégate, & à désigner par le nombre de leurs canons, ont deux ponts, deux batteries complettes, un gaillard, deux barots en-avant du grand cabestan, un château d’avant de 26 piés de long ; cet ordre comprend les vaisseaux de 50 canons jusqu’à 46 exclusivement.

Les frégates depuis 32 canons jusqu’à 46, ont deux