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ces honteuses impostures, qui déshonoroient la religion, obligerent les moines à se retirer de-là ; & pour empêcher à l’avenir leurs fourberies, ils firent démolir leurs habitations & ouvrir la caverne, qui a toujours été découverte & exposée aux yeux du public depuis ce tems-là. (D. J.)

RAGOT, adj. (Maréchal.) on appelle ainsi un cheval qui a les jambes courtes & la taille renforcée & large du côté de la croupe ; il differe du goussaut en ce que celui-ci a l’encolure plus épaisse & qu’il a plus d’épaules. Voyez .

Ragot, terme de Chasse, nom que l’on donne au sanglier qui n’a que deux ans & demi.

Ragot, s. m. (terme de voiturier) sorte de crampon de fer qui est attaché au limon, & où on attache la chaîne de l’avaloire. (D. J.)

RAGOUT, s. m. (Cuisine.) fausse ou assaisonnement pour chatouiller ou exciter l’appétit, quand il est émoussé ou perdu.

Ragout, se dit aussi du mets même assaisonné ; comme un plat de viande, de poisson, de légume, ou d’autres choses, dont on a fait une étuvée en le faisant cuire avec du lard, du sel, du poivre, des clous de girofle & autres épices.

Toutes les différentes façons de préparer les viandes ou autres mets, sont autant de ragouts différens.

Ragout, (Hist. rom.) quoique le luxe des Romains fût porté fort loin sur la fin de la république, il est à remarquer qu’ils conservoient encore dans leurs tables des restes de leur premiere frugalité, & leur bonne chère tenoit encore à l’ancienne cuisine. Ciceron se plaint dans la lettre 26 du VII liv. à ses amis, d’une dyssenterie causée par l’excès des ragoûts qu’il avoit mangés. Quels étoient ces ragoûts ? Des légumes & toutes sortes d’herbes ; herbas omnes ita condiunt, ut nihil possit esse suavius. Ces herbes si délicatement apprêtées, étoient des cardes de poirée & des mauves, car, ajoûte le consul de Rome, moi qui sçavois bien m’abstenir des murènes & des huitres, je n’ai pas su me défendre des cardes de poirée, ni des mauves : ita ego qui me facilè ostreis & muranis abstinebam, à betâ & à malvâ deceptus sum. (D. J.)

RAGRAFFER, v. a. (Gram.) c’est rattacher avec des agraffes.

RAGRANDIR, v. a. (Gram.) c’est rendre plus grand. Il se dit d’une ouverture, d’une mesure, d’un corps.

RAGRÉER, v. a. (Archit.) c’est après qu’un bâtiment est fait, repasser le marteau & le fer aux parement de ses murs pour les rendre unis & ôter les balévres. En menuiserie & en serrurerie, ragréer, c’est mettre la derniere main à un ouvrage. On dit aussi faire un ragréement, pour ragréer. (D. J.)

Ragréer, (terme de Jardinier.) ce mot se dit des branches d’arbres qui ont été sciées. C’est couper avec la serpette la superficie de la partie sciée & comme brûlée par le mouvement de la scie. Il faut ragréer les parties sciées, parce qu’elles pourriroient autrement & ne se recouvriroient jamais. (D. J.)

RAGUÉ, adj. terme de riviere. Un cable ragué, c’est un cable ou cordage gâté, écorché ou coupé.

RAGUET, s. m. (Com. de morue) c’est une sorte de petite morue verte en Bretagne ; dans le triage que l’on fait des différentes especes & qualités de morues, le raguet tient le troisieme rang. Savary.

Ragundona, (Géog. anc.) ville de la Pannonie ; l’itinéraire d’Antonin la marque sur la route d’Ariminum à Cesena, entre Celcia & Poctovios, à 18 milles de la premiere, & à égale distance de la seconde. (D. J.)

RAGUSA, (Géog. mod.) petite ville de Sicile, dans le val de Noto, avec titre de baronnie. Cette ville est située dans les terres au nord occidental de

Modica, sur la riviere de Giarratana, qui, au-dessous de la ville jusqu’à la mer, se nomme Fiume di Mauli, ou Fiume di Agusa. (D. J.)

RAGUSAN, le, (Géog. mod.) ou l’état de Raguse ; petit état d’Europe dans la Dalmatie, qui subsiste depuis plusieurs siecles sous un gouvernement aristocratique, & depuis plus de 250 ans sous la protection des Vénitiens & du grand-seigneur, auquel cette république paye chaque année vingt-cinq mille écus d’or. Raguse en est la capitale. La ville ou bourg de Stagno, ainsi que les îles Méléda, Augusta & Cazola, dépendent de l’état de Raguse, en sorte que son domaine consiste (dans le petit comme dans le grand, celui de la république de Venise) en terre ferme & en îles. (D. J.)

RAGUSE, (Géog. mod.) ville capitale de la république de même nom, dans la Dalmatie proche la mer, à 26 lieues au nord-ouest de Scutari, avec un port défendu par un fort appellé S. Nicolas. Elle fut presqu’entierement détruite par un tremblement de terre en 1667. On l’a rebâtie depuis, plus belle & plus grande qu’auparavant ; elle est ornée de beaux édifices, fortifiée de bons ouvrages, & munie d’une forteresse qui met son port en sureté contre les entreprises de ses ennemis. L’évêché qui étoit à Epidaure (aujourd’hui Raguse la vieille), fut transféré à Raguse dans le septieme siecle & érigée en archevêché dans le dixieme. Long. de cette ville, 36. lat. 42. 48.

Raguse a été autrefois connue sous les noms d’Hybla minima, d’Hera, ou d’Heroea, d’où l’on a lieu de conjecturer que les monts Hérées de Diodore de Sicile & de Vibius Sequester, sont ceux qu’on trouve près de Raguse. Fazellus & Cluvier se sont persuadés par enthousiasme, que c’étoient les Monti-Sori.

Tout le monde sçait que Raguse est une très-petite république, située sur les côtes de la mer Adriatique ; sa foiblesse l’oblige de ménager toutes les puissances, & même d’acheter du sultan des Turcs, par une espece de tribut, une protection qui la met à couvert des courses des Dulcignotes : ce sont des pirates qui désolent les côtes du golphe adriatique, comme les corsaires de Barbarie désolent celles de la Méditerranée.

Les habitans de Raguse sont riches, parce qu’ils font tous le commerce ; ils se gouvernent à-peu-près comme à Venise, mais conformément à leur petit état. Le grand conseil est composé des nobles qu’on y reçoit à l’âge de vingt-quatre ans ; un noble ne sçauroit découcher sans en avoir donné avis au sénat. Les étrangers qui se trouvent dans la ville, y sont enfermés à clef durant la nuit : les portes se ferment au coucher du soleil & s’ouvrent à son lever.

Le chef de la république de Raguse qu’on nomme recteur, change tous les mois ; les autres officiers toutes les semaines ; le gouverneur du château tous les jours. Cette forme d’administration ne peut être excusée que dans une petite république environnée de puissances formidables, qui corromproient aisément de petits magistrats : car, comme le dit M. de Montesquieu, quoiqu’il soit vrai que dans toute magistrature il faille compenser la grandeur de la puissance par la briéveté de sa durée, cependant il ne faut pas si fort diminuer cette briéveté, qu’elle en devienne une cause de corruption. Qui est-ce qui voudroit gouverner ainsi ses affaires domestiques ?

Banduri (D. Anselme) bénédictin, a fait honneur à Raguse sa patrie. On lui doit une espece de corps complet des antiquités de Constantinople ; il en composa deux volumes in-folio, qui parurent à Paris en 1711, sous le titre d’Imperium orientale. Il y ajouta, outre divers plans topographiques, deux cartes relatives à l’état de l’empire de Constantino-