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guette divinatoire qui tournoit de son propre mouvement, sans effort ni secours de la part de la personne qui la tenoit. L’effet est certain, constaté par des expériences sans nombre. D’où ce tournoyement provient-il ? est-il naturel ? est-il surnaturel ?

C’est à ces deux questions que se réduit tout ce qu’on a écrit pour ou contre la baguette. Parmi les savans, les uns en ont regardé le mouvement comme naturel, & par conséquent explicable par les lois de la physique : les autres l’ont regardé comme surnaturel, inexpliquable & produit par des intelligences supérieures à l’homme. Nous allons donner au lecteur l’analyse de l’un & de l’autre sentiment, d’après M. l’abbé de la Chambre dans son traité de la religion, tome II. troisieme part. ch. x. p. 473. & suiv.

Ceux qui ont regardé comme naturel le tournoyement de la baguette, ont pris différentes routes pour en développer la cause & le principe.

1o. Willenius & Frommann croyent que le tournoyement de la baguette vient de la communication du mouvement à l’occasion de la rencontre & du choc des corps, quoiqu’ils ne puissent absolument expliquer le méchanisme de ce phénomene, & aux objections qu’on leur fait que la baguette ne tourne pas entre les mains de toutes sortes de personnes, & qu’elle ne tourne pas toujours dans les mains de la même personne ; ils répondent 1o. qu’il faut que la vertu de la baguette soit aidée de celle du tempérament qui est différent dans tous les hommes. 2o. Que la variation du mouvement de la baguette vient ou de ce que la même personne n’est pas toujours dans les mêmes circonstances pour le sang & les humeurs, ou de ce que les influences des autres s’unissent & se fortifient quelquefois, & quelquefois se combattent. Traité de la baguette imprimé en 1671 ; traité de la fascination, en 1674.

2o. M. de S. Romain explique le mouvement de la baguette par le mouvement des corpuscules qui sortent des corps qu’on cherche, & qui viennent agraffer la baguette. Si la baguette ne tourne pas entre les mains de tout le monde, c’est qu’il y a, dit cet auteur, des tempéramens qui ralentissent la force de ces corpuscules ; & si elle ne tourne pas toujours entre les mains de la même personne, c’est que le tempérament n’est pas toujours dans la même situation & le même état. Traité de la science naturelle dégagée des chican. de l’école 1679.

3o. D’autres disent que les particules qui s’exhalent des sources d’eaux & des métaux empreignent la verge de coudrier, & la déterminent à se baisser pour la rendre parallele aux lignes verticales qu’elles décrivent en se levant. Ces particules d’eau sont poussées au-dehors par le feu central, & par les fermentations qui se font dans les entrailles de la terre. Or, la baguette étant d’un bois poreux, il donne aisément passage à ces corpuscules, qui sont extrémement subtils & déliés. Ces vapeurs pressées par celles qui les suivent, & pressées par l’air qui pese dessus, sont forcées d’entrer dans les petits intervales de la baguette, & par cet effort elles la contraignent à s’incliner perpendiculairement, afin de se rendre parallele avec les colomnes que forment ces vapeurs en s’élevant. Les objections ne sont pas moins difficiles à résoudre dans ce sentiment que dans les deux précédens.

4o. L’abbé de Vallemont dans le traité qu’il a donné sur cette matiere, édit. de 1696, p. 379, s’efforce de prouver que cette baguette n’a rien de commun avec toutes les especes de divinations comprises sous le nom de rabdomanie, & que ses effets sont purement physiques. « On conjecture, dit-il, par son mouvement, qu’il y a de l’eau dans la terre, comme on juge par le mouvement d’un hygrometre qu’il y a des vapeurs aqueuses dans l’air, & que conséquemment il y aura de la pluie ». Mais cette

raison qui satisfait pour un phénomene, ne satisfait pas pour tous, & ne leve point les difficultés ci-dessus proposées.

5o. M. le Royer prétendoit expliquer le mouvement de la baguette par l’antipathie & la sympathie des Péripatéticiens, si la baguette ne remue pas entre les mains de tout le monde ; c’est qu’il y a, dit-il, des personnes qui ont une antipathie à la vertu de la baguette, & qui en arrêtent l’effet. Si elle ne remue pas toujours entre les mains de la même personne, c’est qu’il y a, ajoute-t-il, auprès de la baguette un corps qui lui ôte toute sa force. L’aimant, par exemple, perd sa vertu quand il y a de l’ail ou un diamant auprès de lui. Mais outre que cet exemple est faux, on sent que ces grands mots d’antipathie & de sympathie sont vuides de raison, & aussi peu propres à expliquer le point en question, que l’opinion de Peucer sur la même matiere ; elle est conçue en ces termes : ad φυτοσκοπικὸν seu divinationem ex plantis, pertinent certæ in plantis aliquibus notæ indicantes initia, finesve aut conditiones quatuor universalium anni temporum. Eodem divinationes pertinent metallariis usitatæ quæ fiunt sciotericis & virgulâ divinâ. Ea est ex corylo decisus bifidus surculus, quo venas illi auri argentive feraces explorant, inclinante sese eo virgula quà sub terrâ venæ feruntur atque incedunt. Qua viad soli corylorum præstant surculi, & non item cæterarum arborum quæ in iisdem proveniunt locis, eodem terræ altæ refectæque succo obscurum est : nisi quod conjicio συμπάθειαν habere corylos ad metalla connatam & occultam, &c. Solution merveilleuse qui suppose faux & ne débrouille rien.

Ceux, au contraire, qui rejettent le mouvement de la baguette sur des êtres intelligens, supérieurs à l’homme, l’attribuent au démon. C’est le sentiment de Tollius, de M. Hennin & du P. Mallebranche.

Ils avancent 1o. que la baguette ne tourne naturellement ni sur l’eau, ni sur les métaux, ni sur quelqu’autre chose que ce soit : car elle tourne souvent où il n’y a rien, & ne tourne pas toujours où il y a quelque chose ; on a des exemples de l’un & de l’autre. D’ailleurs, elle ne remue que sur ce qu’on a envie de trouver ; or une pensée, un desir ne peuvent faire remuer un bâton. 2o. Que le mouvement de la baguette ne vient point d’un tour de poignet, ni d’une certaine pression de doigts, puisqu’elle tourne sans art entre les mains de plusieurs personnes, & même malgré elles. L’exemple du président de Grenoble que cite le P. le Brun en est une preuve. 3o. Que le mouvement de la baguette doit être rejetté sur l’action des intelligences supérieures à l’homme, & ces intelligences ne pouvant être ni Dieu, ni les anges, parce que le mouvement de la baguette est équivoque, & qu’il est quelquefois fautif dans son opération, ils en concluent que ces intelligences supérieures sont les démons à qui Dieu permet quelquefois de séduire les hommes, & qui agissent quelquefois par notre ministere, sans que nous ayons fait aucun pacte avec eux. Si ces raisons ne paroissent pas évidentes, on conviendra que les systèmes des Physiciens ne sont pas plus satisfaisans. Traité de la religion, t. II. troisieme partie, chapitre x. p. 473 & suiv.

N. B. Cet article est tiré en partie des mémoires de M. Formey, historiographe de l’académie royale de Prusse.

RABES de morue, (Commerce.) ce sont les œufs de la morue que l’on sale, & qu’on met en barriques. Ce terme n’est en usage qu’à la Rochelle ; ailleurs on dit des raves.

RABETTE, (Com.) on dit huile & graine de rabette. La rabette est une espece de choux, dont la graine donne une huile par expression, qu’on emploie dans la pharmacie & dans la draperie.

RABIA prior, (Chronolog.) nom du troisieme mois de l’année arabique. Il a 30 jours.

RABIA posterior, (Chronolog.) nom du qua-