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ces, soit qu’il s’agisse de les attirer, soit qu’il s’agisse de les écarter.

La lumiere est un acte simple, une image divine imprimée dans tous les êtres, émanée du pere au fils, du fils à l’esprit saint, de l’esprit saint aux anges, des anges aux astres, des astres à la terre, aux hommes, aux plantes, aux animaux. Elle affecte le sens & l’imagination de l’homme.

L’imagination violemment émue peut changer le corps, lui donner de l’empire, de l’action & de la passion, l’approprier à certaines maladies, à certaines impressions, &c.

La contention violente de l’ame humaine, l’éleve, l’unit aux intelligences, l’éclaire, l’inspire, porte dans ses actions & ses concepts quelque chose de divin & de surnaturel.

L’ame humaine a en elle la vertu de changer, d’approcher, d’éloigner, de lier ; elle peut dominer & les choses & les esprits, par une énergie particuliere de sa vertu ou de ses passions.

Les noms des choses ont aussi leur pouvoir. L’art magique a sa langue ; cette langue a ses vertus ; c’est une image des signatures. De-là l’effet des invocations, évocations, adjurations, conjurations, & autres formules.

Il paroît que le nombre est la raison premiere de l’enchaînement des choses.

Les nombres ont leur vertu, leur efficacité bien ou malfaisante.

L’unité est le principe & la fin de tout ; elle n’a ni fin ni principe.

Le nombre binaire est mauvais. Le dualisme est un démon malfaisant, ou il y a multitude matérielle.

Le ternaire représente Dieu, l’ame du monde, l’esprit de l’homme.

Le quaternaire est la base de tous les nombres.

Le quinaire a une force particuliere dans les expiations sacrées. Il est tout. Il arrête l’effet des venins. Il est redoutable aux mauvais génies.

Le septenaire est très-puissant, soit en bien soit en mal.

Dieu est la monade. Avant qu’elle ne s’étendît hors d’elle, & ne produisît les êtres, elle engendra en elle le nombre ternaire.

Le nombre denaire est la mesure de tout.

Les caracteres des mots ne sont pas sans vertu. On en peut tenir la connoissance des propriétés & des événemens.

L’harmonie analogue au concert des cieux, en provoque merveilleusement l’influence.

L’homme a tout en lui, le nombre, la mesure, le poids, le mouvement, les élémens, l’harmonie.

Il y a une cause sublime, secrette & nécessaire du sort. Il peut conduire à la vérité.

Le monde, les cieux, les astres ont des ames ; ces ames ne sont pas sans affinité avec la nôtre.

Le monde vit ; il a ses organes ; il a ses sens.

L’ame du monde a ses opérations intellectuelles ; elle tient de la nature divine.

Les imprécations ont leurs efficacités. Elles s’attachent sur les êtres, & les modifient.

La liaison universelle des choses constate la réalité & la certitude de la magie.

La magie est un art sacré qu’il ne faut pas divulguer.

Elle suppose une suspension du commerce de l’ame avec le corps, une absence entiere de toutes distractions, une union intime avec les intelligences. On l’obtient par les cérémonies religieuses, les expiations, les sacrifices, la priere, les consécrations, &c.

Il faut avoir sur-tout la foi, l’espérance & la charité : ce sont ces vertus qui levent le voile qui couvre le miroir divin, & qui permettent à l’œil de l’homme

de recevoir par réflexion la connoissance des états, des effets & des causes.

Quoique Dieu soit tout dans l’union essentielle des trois personnes, on peut cependant y considérer encore quelques qualités divines, quelques intelligences réelles que les philosophes des nations ont appellées divinités, les Hébreux sephiroth, & que nous appellons attributs.

Les différens noms de Dieu ne désignent point des essences divines, mais des propriétés analogues à ses bienfaits, à ses châtimens.

Dieu est le maître ; mais il a des ministres bien & malfaisans. Les astres sont aussi des instrumens de sa puissance : elle a encore d’autres canaux.

L’intelligence de Dieu est incorruptible, immortelle, insensible, présente à tout, influant sur tout.

Il y a trois classes de démons ; des esprits célestes, intelligens, sans corps. Leur fonction unique est de transmettre la lumiere de Dieu. Des esprits qui président à ce monde, & qui résident dans les astres. Des esprits qui nous sont attachés. Ils sont dans l’air, dans l’eau, dans le feu, dans la terre. Ils ont des corps ; ils sont susceptibles de passions. Leurs corps ne sont pas sensibles.

L’aspect des planetes au moment de la naissance de l’homme, indiquera la nature de son génie tutélaire.

L’homme est abandonné à trois démons ; l’un est divin, il préside à son ame ; l’autre est ou bien ou malfaisant, il domine à sa naissance ; le troisieme décide de son sort.

Les caracteres des esprits & leurs signatures, ne sont pas intelligibles à tous les yeux : c’est une lecture réservée à quelques hommes privilégiés.

On enchaîne les démons, & on leur commande par des moyens empruntés ou du monde élémentaire, ou du monde céleste, ou du monde intellectuel & divin.

Voici l’ordre des êtres animés. Dieu, les intelligences, les démons, les héros, les semi-dieux, les dieux mortels, les dieux terrestres, les hommes, les animaux.

L’esprit humain est corporel, mais sa substance est très-subtile, & d’une union facile avec la particule qui est en nous.

Le mal nait de la mauvaise disposition de ce qui reçoit, & non de la dépravation de ce qui influe.

L’ame qui sera souillée dans ce monde, sera punie après la dissolution du corps, par son union avec un autre corps formé de vapeurs élémentaires, où elle subira toute la gêne d’une prison.

Ces ames punies se précipitent quelquefois dans les corps des animaux, les tourmentent & les obsedent ; leur présence y opere à l’instar des démons.

Elles se plaisent à errer autour des cadavres ; elles en aiment la vapeur ; c’est un moyen de les évoquer. De-là la nécromantie.

Il y a dans l’homme le corps, l’esprit, la raison & l’idole. Ces trois derniers constituent l’ame qui est une. L’esprit éclaire la raison ; la raison s’occupe de l’idole ; l’idole vient des objets.

L’ame qui est de Dieu, ou qui émane du monde intelligible, est immortelle & éternelle.

Celui qui attend un oracle se disposera à le recevoir par la pureté, l’abstinence, les jeûnes, la continence, la solitude, la tranquillité, le silence & l’élévation.

La pénitence & l’aumône sont les deux grands moyens expiatoires.

Qui croiroit que des hommes instruits aient donné sérieusement dans ce tissu indigeste & ridicule de suppositions ? Qui croiroit que dans ce siecle même où l’esprit humain a fait de si grands progrès en tout genre, il y ait encore des gens qui n’en sont pas détrom-