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quer ce passage, & la variété de leurs sentimens marque assez l’incertitude de leurs conjectures. Il semble, à les entendre, que les Pygmées obligés de céder à la guerre continuelle que leur faisoient les grues, s’étoient retirés sur les côtes de Phénicie pour se mettre au service des Tyriens, qui les placerent sur leurs tours, comme si de pareils soldats avoient pû faire l’ornement d’une ville, qui, selon le même prophete, avoit dans ses troupes des soldats de presque toutes les nations.

Il est vrai que le texte des Septante les nomme simplement Φύλακες, des gardes, & dans une autre leçon Μῆδοι, les Medes. Le chaldéen a traduit ce mot par celui de Gaffadin, les Cappadociens ayant changé le Μ en Π ; mais l’hébreu s’est servi du mot de gammadin ; & comme gomed signifie une coudée, c’est ce qui a donné lieu à l’auteur de la vulgate, à saint Jérôme & à Aquila, de traduire ce mot par celui de pigmæi.

L’origine de l’équivoque est par-là bien prouvée ; mais il reste toujours à savoir qui étoient ces Gammadins qu’on avoit mis sur les tours de la ville de Tyr. Etoit-ce de véritables Pygmées, comme Schottus, Bartholin, & quelques interpretes l’ont dit après R. Chimchi ? ou bien étoit-ce les habitans de Maggédo, ainsi que l’ont avancé d’autres savans, ou de simples gardes, comme le veut Forstérus, ou enfin les Gamaliens dont parle Pline ?

Un savant académicien de Paris, après avoir examiné ce passage avec attention, voyant que le prophete semble preférer les Gammadins aux Perses, aux Assyriens, aux Grecs, & à tous les autres peuples qui avoient pris parti dans les armées des Tyriens, & qu’ils faisoient l’ornement de leur ville, pense qu’il a voulu parler des divinités qu’on avoit placées sur les tours, avec leurs armes & leurs fleches, comme on mettoit les dieux pataïques sur la proue des vaisseaux, dont ils faisoient le principal ornement ; & que les uns & les autres, étoient représentés par de petites idoles, comme Hérodote le dit formellement de ces derniers, que Cambise trouva dans le temple de Vulcain en Egypte, & qui selon cet historien, ressembloient à des Pygmées.

Au reste, ce n’est là qu’une simple conjecture, mais suivant laquelle disparoissent les rêveries des rabbins & des commentateurs, qui sur la simple étymologie du mot gomed, avoient mis des Pygmées sur les tours de Tyr, au-lieu de trouver dans le passage d’Ezéchiel, ou un peuple de Phéniciens robuste, adroit à tirer de l’arc, & marqué à la suite des autres comme distingué ; ou des dieux patrons d’une ville idolâtre, qui mettoit en eux toute sa confiance, & en faisoit son principal ornement. (D. J.)

Pygmées, (Géog. anc.) peuples fabuleux, à qui les anciens ne donnoient qu’une coudée de hauteur ; ils ont mis de tels peuples dans l’Inde, dans l’Ethiopie, & à l’extrémité de la Scythie. Des voyageurs modernes mettent à leur tour des Pygmées dans les parties les plus septentrionales de l’univers. Il est vrai que quelques nations qui habitent les terres arctiques, comme les Lapons & les Samoyedes, sont d’une petite taille ; mais quelque petite que soit leur taille, ils ont plus de deux coudées ; les Pygmées d’une coudée n’existent que dans les fables des Poëtes, dont les anciens écrivains s’amusoient, sans en croire un mot. Pline, liv. VI. ch. x. dit simplement, que quelques-uns avoient rapporté que les nations des Pygmées habitoient dans les marais où le Nil prenoit sa source. Strabon, liv. XVII. regarde absolument les Pygmées comme un peuple imaginaire, car il ajoute qu’aucune personne digne de foi ne soutenoit en avoir vû ; cependant l’abbé Danet, dans son dictionnaire, s’est avisé de prêter au même Strabon & à Pline, tous les contes d’enfans des autres auteurs. (D. J.)

PYLACAEUM, (Géog. anc.) ville de la grande Phrygie. Ptolomée, liv. V. ch. ij. la place entre Themisonium & Salat.

PYLÆ, (Géog. anc.) ce mot latin vient du grec Πύλη, qui signifie une porte ou une colonne, soit de pierre de taille, soit de brique. On entend communément dans l’ancienne géographie par le mot pylæ, des passages étroits entre des montagnes ; & on appelle aussi ces passages portæ, des portes, parce qu’elles sont comme les portes d’un logis, par lesquelles il faut nécessairement entrer & sortir.

Quelquefois ces passages sont l’ouvrage de la nature ; quelquefois ils sont faits de main d’hommes dans des montagnes que l’on a coupées ; ce qui répond au mot claustra des anciens, & à ce que nous appellons présentement un pas, un port, un col. Pline, liv. IV. ch. vj. nomme Pylæ un lieu de l’Arcadie. Ptolomée, liv. IV. ch. viij. appelle aussi Pilæ, des montagnes d’Ethiopie sous l’Egypte.

Pylæ Persides ou Suziades, est un détroit célebre entre la Perside & la Suziane, ce qui fait qu’on l’appelle indifféremment du nom de l’une ou de l’autre de ces contrées. Diodore de Sicile dit Persides, & Arrien Suziades.

Pylæ sarmatinæ, est le mont Caucase, qui borne la Sarmatie au midi & la sépare des contrées voisines. Ptolomée, liv. V. ch. ix. distingue dans cette fameuse montagne deux passages étroits, dont l’un, qui donnoit entrée dans l’Ibérie, s’appelloit portæ Caucasiæ ; & l’autre qui donnoit entrée dans l’Albanie, se nommoit pylæ Albaniæ. (D. J.)

PYLÆA, (Géog. anc.) ville de la Macédoine, dans la Trachinie ; elle étoit au pié du mont Oéta, & donnoit le nom au golfe Pylaïque, dont parle Strabon, liv. IX. pag. 430. (D. J.)

PYLAGORES, s. m. (Hist. anc.) nom que les villes grecques donnoient aux députés qu’elles envoyoient à l’assemblée des amphyctions selon le droit qu’elles en avoient. Chacune y envoyoit un pylagore & un hieromnemon, avec plein pouvoir à celui-ci de traiter de toutes les matieres qui concernoient la religion, le pylagore n’étant chargé que des intérêts politiques. Cependant les grandes villes députerent quelquefois deux ou trois pylagores, & jamais qu’un hieromnemon ; mais dans ce cas-là même, ces quatre députés n’avoient toujours que deux voix. On choisissoit toujours les pylagores au sort, & ils étoient ordinairement pris d’entre les orateurs, parce que dans l’assemblée des amphyctions, ils étoient obligés de porter la parole ; ils délibéroient sur les affaires générales de la Grece, y formoient des decrets, dont ils représentoient des copies à leurs républiques respectives, auxquelles à leur retour ils rendoient compte de leur députation. On croit que ces decrets portoient en tête le nom de l’hieromnemon ; cependant il s’en trouve qui commencent par ces mots : il a paru à propos, il a plu aux pylagores & aux autres qui ont droit de séance à l’assemblée des amphyctions. M. de Valois pense néanmoins que les hieromnemons avoient la préséance. Sur les hieromnemons, voyez Hieromnemon.

PYLÉES, s. m. pl. (Antiq. grecq.) πυλαῖα, nom donné à l’assemblée des amphyctions, soit qu’elle se tînt à Delphes ou aux Thermopyles. Le concours du peuple étoit si grand à ces assemblées, que le mot pylées, pylæa, fut employé dans la suite pour désigner toute assemblée nombreuse, ou foule de peuple dans quelque endroit que ce fût. (D. J.)

PYLENE, (Géog. anc.) ville de l’Etolie, selon Homere, Pline, l. IV. c. ij. la met sur le golfe de Corinthe ; & Strabon nous apprend qu’elle changea de nom, & prit celui de Proschium, quand on la changea de place, pour la bâtir sur les hauteurs du voisinage.