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Cicéron rapporte qu’en arrivant dans la province, il resta trois jours à Laodicée, cinq à Apamée, deux à Symades, cinq à Philomele, dix à Ionium.

Quelquefois ils appelloient les communes dans les villes qu’ils jugeoient être à leur bienséance ; c’est ainsi que Cicéron assembla à Laodicée les communes de Cibaris & d’Apamée, aux ides de Février ; celles de Symades, de Pamphilie & d’Isaurie aux ides de Mars ; & qu’une autre fois il tint les états de toutes les communes de l’Asie dans la même ville, depuis les ides de Février jusqu’aux ides de Mai : mais ordinairement ils se transportoient dans les lieux mêmes d’assemblée, comme fit Cesar dans les Gaules, & plusieurs autres préteurs en d’autres provinces.

IV. L’audience se tenoit au milieu de la place, comme à Rome dans le forum ou dans une basilique. On croit que quelques villes d’Italie se nomment Rhege, parce qu’il y avoit des basiliques appellées en latin regiæ.

V. Ils traitoient les affaires selon les lois publiées par leurs prédécesseurs, ou par celles qu’ils donnoient de l’avis de leurs dix lieutenans, ou par des sénatusconsultes particuliers ; ils étoient seulement astreints à ne rien changer dans l’édit qu’ils avoient formé de l’aveu du sénat, avant que de partir de Rome. Les romains répandus dans les provinces ressortissoient à leur tribunal.

VI. Ils prononçoient par decret, par jugement, & par diplome. 1°. Par decret, quand ils mettoient en liberté, qu’ils émancipoient, qu’ils adjugeoient la possession d’un héritage, qu’ils nommoient des tuteurs, qu’ils vendoient à l’encan, qu’ils interdisoient, & dans d’autres causes. 2°. Par jugement, quand ils nommoient des juges pour examiner une affaire de peu d’importance ; c’étoient ordinairement leurs lieutenans qui étoient chargés de cette commission ; ou bien ils choisissoient, du consentement des parties, trois récupérateurs. Il falloit qu’ils fussent pris dans la ville ou dans le forum où l’affaire avoit été entamée. Cicéron reproche à Verrès d’avoir nommé des récupérateurs tirés de sa cohorte. Quelquefois ils n’en nommoient qu’un ; & alors ce juge prenoit avec lui quelques jurisconsultes habiles pour l’éclairer. 3°. par diplome ; c’étoit quand le magistrat notifioit dans les provinces son jugement sur une affaire qu’il avoit examinée avec soin dans le secret de son cabinet.

VII. Les peuples avoient cependant la permission de demander un jugement conforme aux formalités & aux coutumes de leurs pays, ou de choisir la jurisdiction du préteur. Les Grecs sur-tout, pour qui les Romains avoient une attention particuliere, jouissoient de cet heureux privilége. « Souvenez-vous, écrit Pline à un de ses amis, que Trajan envoyoit pour gouverneur dans la Grece, souvenez-vous que c’est à Athènes que vous allez, que c’est à Lacédémone que vous devez commander ; il y auroit de l’inhumanité & de la barbarie à dépouiller ces villes célebres, qui autrefois ne connoissoient point de maîtres, de l’ombre & du simulacre de leur ancienne liberté. » Quibus reliquam umbram & residuum libertatis nomen eripere durum, ferum, barbarumque est.

Mais ailleurs ils se conduisoient avec plus de hauteur ; le rhéteur Albutius Silus se voyant repoussé à Milan par les licteurs du proconsul Pison, qui vouloient l’empêcher de défendre un accusé, s’écria que la liberté de l’Italie étoit perdue.

VIII. Quand une cause leur paroissoit embarrassée, ou d’une discussion critique & nuisible à leur réputation, ils la renvoyoient au sénat, ou au tribunal supérieur de la nation, ou à l’aréopage.

IX. Les empereurs apporterent quelques changemens à ces usages. Auguste nomma des propréteurs pour l’Italie, & des préfets pour les provinces. Adrien confia la jurisdiction de l’Italie à des consulaires, &

celle des provinces à ceux qui avoient le titre de spectables ou d’illustres : c’étoient là les juges souverains ; ce qui n’excluoit pas les juges ordinaires. Marc Antonin substitua à ces souverains magistrats des jurisconsultes pour le civil seulement, juridicos. Alexandre Sévere nomma des orateurs avec une autorité aussi étendue. (D. J.)

Province consulaire, (Hist. rom.) on nommoit provinces consulaires celles de l’empire romain qui étoient gouvernées par des consuls après l’exercice de leur consulat. Du tems de César, il y avoit sept provinces consulaires, savoir l’Espagne ultérieure, l’Espagne citérieure, la Gaule cisalpine, la Gaule transalpine, l’Eselavonie jointe à la Dalmatie, la Cilicie, & la Syrie. (D. J.)

Provinces-Unies, (Géog. mod.) province des Pays-bas, ainsi appellées, à cause de l’union ou confédération qu’elles firent entre elles au mois de Janvier 1579, pour la défense de leur liberté contre Philippe II. roi d’Espagne. Les provinces qui composent cette république sont au nombre de sept ; savoir, le duché de Gueldres, dans lequel est compris le comté de Zutphen, les comtés de Hollande & de Zélande, les seigneuries d’Utrecht, de Frise, d’Overissel & de Groningue.

Outre ces sept provinces qui composent l’état, la république compose plusieurs villes conquises depuis l’union d’Utrecht, ou qui se sont incorporées dans les Provinces-unies, & que l’on appelle le Pays de la généralité, parce qu’elles dépendent immédiatement des états généraux, & non d’aucune province particuliere.

Ces places sont situées dans le Brabant, dans le pays de Limbourg, en Flandres & dans le haut quartier de Gueldre. Le pays de Drenthe qui est une province souveraine, située entre la Westphalie, Groningue, Frise & Overissel, fait aussi partie de la république, & contribue un pour cent aux frais de la généralité : aussi cette province prétend-elle avoir droit d’entrée dans l’assemblée des états-généraux, mais on lui a toujours donné l’exclusion.

Les deux compagnies des Indes orientales & occidentales, & la société de Surinam possedent aussi sous la protection des états-généraux de vastes états en Asie, en Afrique, & en Amérique. Outre tous ces pays, la république depuis la paix d’Utrecht, en éxécution du traité de Barriere, entretient des garnisons jusqu’au nombre de douze mille hommes dans les places d’Ypres, Furnes, Menin, Dendermonde, Tournay & Namur.

Les Provinces-unies & les pays de leur domination, sont situés entre le 24 & le 26e degré de longitude, & entre le 51 & le 54e degré de latitude septentrionale. Ces pays sont contigus les uns aux autres, & bornés au midi par la Flandre, le Brabant, l’évêché de Liége, la Gueldre prussienne & autrichienne ; au levant par les duchés de Cleves & de Juliers, l’évêché de Munster, le comté de Bentheim, & par le pays d’Oost-Frise ; la mer du nord ou d’Allemagne les baigne au septention & au couchant. On donne à toutes ces provinces environ quarante-huit lieues de longueur depuis l’extrémité du Limbourg-hollandois, jusqu’à celle de la seigneurie de Groningue. Leur largeur depuis l’extrémité de la Hollande méridionale jusqu’à celle de l’Overissel, est d’environ quarante lieues.

Le pays des Provinces-unies est en général mauvais, mais l’industrie des habitans l’a rendu également fertile & florissant. Deux principales rivieres l’arrosent ; j’entends le Rhin & la Meuse. Pour se garantir des inondations de la mer, on a partout opposé des digues à la fureur de l’Océan, & à l’impétuosité des rivieres. Ces digues ont couté des sommes immenses, & l’on prétend que leur entretien monte