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vouloient faire profession de leur religion. On remarque même que du tems de notre Sauveur ils se donnoient de grands mouvemens pour les y attirer & les convertir. On initioit ces sortes de prosélytes par le baptême, par des sacrifices & par la circoncision. Après cela ils jouissoient des mêmes privileges, & étoient admis aux mêmes rites & aux mêmes cérémonies que les juifs naturels. Il faut seulement excepter les mariages en fait de privileges, parce qu’il y avoit des nations qui en étoient exclues pour toujours ; & d’autres seulement pour un certain nombre de générations, comme les Edomites, jusqu’à la troisieme ; ce fut avec cette clause qu’Hyrcan les reçut prosélytes de justice ; mais dans la fuite, ils ne firent plus qu’un même corps avec les Juifs, & perdirent leur nom d’Edomites.

Ceux qui desireront de plus grands détails sur les prosélytes de la porte & de la justice, doivent consulter l’ouvrage de Mede ; les remarques de Hammond sur S. Matth. c. iij. vers. 1. & c. xxiij. 15. le dictionnaire rabbinique de Buxtorf, & le traité de Maimonidès, traduit en latin, avec des notes par le célebre Prideaux, sous le titre de jure pauperis & peregrini. (Le chevalier de Jaucourt.)

Prosélytes, baptême des, (Hist. de l’Egl. prim.) Justin, martyr, décrit ainsi dans sa seconde apologie le baptême des prosélytes. Lorsque quelqu’un, dit-il, est persuadé de notre doctrine, & qu’il promet de vivre conformément aux préceptes de Jesus-Christ, nous lui déclarons qu’il doit prier avec jeûne, demandant à Dieu la remission de ses péchés. Nous jeûnons nous-mêmes, nous prions avec lui ; ensuite nous le menons dans un endroit où il y a de l’eau, & nous le régénérons comme nous l’avons été, en le lavant au nom de Dieu le Pere, le Maître de toutes choses, de notre Sauveur, & du S. Esprit. Il y a d’autres peres qui ont eu une idée bien fausse du baptême. Saint Chrysostôme en parle plus en orateur qu’en théologien dans son Homélie 40. sur la I. aux Corinth. il dit qu’une personne qui a été baptisée devient plus pure que le rayon du soleil, & même plus pure que l’or, & en sépare toute l’impureté. Cette opinion n’est cependant fondée ni dans l’Ecriture, ni dans la raison, ni dans l’expérience. Le baptême n’est autre chose que le signe de la confirmation du pardon que Dieu daigne accorder au pécheur, & le signe de la promesse que fait le pécheur de renoncer à ses vices. Beausobre. (D. J.)

PROSERPINE, s. m. (Mythologie.) fille de Cérès, femme de Pluton & souveraine des enfers. Pluton ne put l’épouser qu’en l’enlevant à Cérès sa mere.

Les Siciliens célébroient tous les ans l’enlevement de Proserpine par une fête qu’ils mettoient vers le tems de la récolte, & la recherche que fit Cérès de sa fille dans le tems des semailles. Celle-ciduroit dix jours entiers, & l’appareil en étoit éclatant ; mais dans tout le reste, dit Diodore, le peuple assemblé affectoit de se conformer à la simplicité du premier âge. On dit que Jupiter sous la figure d’un dragon eut commerce avec Proserpine sa propre fille ; de-là vient que dans les mysteres sabasiens, on faisoit entrer un serpent qui se glissoit sur le sein de ceux qu’on initioit.

Proserpine étoit la divinité tutélaire de Sardes. Une médaille qui paroît avoir été frappée sous le regne de Gordien Pie, représente du côté de la tête une femme couronnée de tours, avec la légende ϹΑΡΔΙϹ ; & au revers la figure de Proserpine. On voit la même déesse représentée sur une médaille du cabinet de M. Pellerin, avec la légende ϹΑΡΔΙΑΝΩΝ Β. ΝΕΩΚΟΡΩΝ ; de l’autre côté, une tête de femme couronnée de tours & voilée, avec le nom ϹΑΡΔΙϹ. La tête de Proserpine sans légende paroît sur deux médailles du cabinet du roi, & au revers une massue dans une cou-

ronne de feuilles de chêne avec le nom ϹΑΡΔΙΑΝΩΝ.

L’enlevement de cette déesse par Pluton est représenté sur plusieurs autres médailles. Enfin les médailles frappées sous les Antonins, pour constater l’ΟΜΟΝΟΙΑ de cette ville avec Ephese, représentent Proserpine d’un côté, & Diane éphésienne de l’autre.

Les jeux ΚΟΡΑΙΑ, célébrés à Sardes en l’honneur de cette déesse tutélaire de leur ville, sont marqués sur deux médailles très-rares du cabinet de M. Pellerin, frappées sous Caracalla. Elles représentent d’un côté la tête de l’empereur couronnée de laurier avec la légende ΑΥΤ. Κ. Μ. ΑΥΡ. ϹΕ..... ΑΝΤΟΝΕΙΝΟϹ ; au revers Proserpine assise, ayant à droite un pavot, & à gauche un épi, légende ΕΠΙ ΑΝ. ΡΟΥΦΟΥ ΑΡΧ. Α. ΤΟ. Γ... dans le champ ; ΚΟΡΑΙΑ. ΑΚΤΙΑ sur une base, & au-dessous ϹΑΡΔΙΑΝΩΝ ΔΙϹ ΝΕΩΚΟΡΩΝ.

Les fêtes de Proserpine sont appellées ΚΟΡΕΙΑ par le scholastique de Pindare, par Plutarque & par Hésychius, dont Meursius cite les témoignages. Les Sardiens célébroient les jeux actiaques, ΚΟΡΑΙΑ ΑΚΤΙΑ, en l’honneur de Proserpine.

Dans les sacrifices qu’on offroit à cette déesse, on lui immoloit toujours des vaches noires ; le pavot étoit son symbole. Les Gaulois regardoient Proserpine comme leur mere, & lui avoient bâti des temples. Claudien, poëte latin, qui vivoit sous l’empire de Théodose, a donné un poëme sur le ravissement de Proserpine.

On sait que la plûpart des mythologues regardent cet enlevement comme une allégorie qui a rapport à l’agriculture. Selon eux, Proserpine est la vertu des semences cachées dans la terre ; Pluton est le soleil qui fait son cours au-dessous de la terre au solstice d’hiver. Le grain qu’on jette dans le sein de la terre, & qui, après y avoir demeuré environ six mois, en sort par la moisson ; c’est Proserpine qui est six mois sur la terre & six mois aux enfers. D’anciens historiens croient que Proserpine, fille de Cérès, reine de Sicile, fut réellement enlevée par Pluton ou Aidonée, roi d’Epire, parce qu’elle lui avoit été refusée par sa mere.

Au reste, le peuple croyoit que personne ne pouvoit mourir que Proserpine par soi-même, ou par le ministere d’Atropos, ne lui eût coupé un certain cheveu dont dépendoit la vie des hommes. C’est ainsi que Didon, dans Virgile, après s’être percé le sein, ne pouvoit mourir, parce que Proserpine ne lui avoit pas encore coupé le cheveu fatal, & ne l’avoit pas encore condamnée à descendre aux enfers.

Nondum illi flavum Proserpina vertice crinem
Abstulerat, stygioque caput damnaverat orco.

(D. J.)

PROSEUCHE, s. f. (Critique sacrée.) προσευχή ; oratoire des juifs, bâti dans leurs maisons des fauxbourgs, ou sur des lieux élevés, pour y faire leurs prieres.

Les anciens hébreux qui demeuroient trop loin du tabernacle ou du temple, ne pouvant pas s’y rendre en tout tems, bâtirent des cours sur le modele de la cour des holocaustes, pour y offrir à Dieu leurs hommages. On donna dans la suite à ces cours, le nom de proseuches. Juvenal, Satyre III. en parle sur ce ton-là, & emploie le mot proseucha. L’Evangile nous apprend que Notre Seigneur entra dans une de ces proseuches pour y faire ses prieres, & qu’il y passa toute la nuit ; c’est ce que nous lisons dans S. Luc, ch. vj. V. 12. L’original qu’on a traduit, & il fut toute la nuit en prieres à Dieu, porte, καὶ ἦν διανυκτερεύων ἐν τῇ προσευχῇ τοῦ θεοῦ, ce qui signifie, & il passa la nuit dans l’oratoire de Dieu. Ce fut dans un autre de ces oratoires que S. Paul enseigna Philippe, Actes, ch. xvj. Dans ce même chapitre, nous avons traduit par