que les procureurs au parlement se plaignoient que divers solliciteurs portant grande barbe, s’ingéroient de faire leur profession, en sorte qu’il ne restoit plus aux procureurs que le chaperon. Peu de tems après on quitta l’usage des longues barbes.
Le rang des procureurs est immédiatement après les avocats, & avant les huissiers & notaires reçus dans le même siege.
Aux sieges des maîtres particuliers, élections, greniers-à-sel, traites foraines, conservations des privileges des foires, aux justices des hôtels & maisons-de-ville & autres jurisdictions inférieures, & dans toutes les justices seigneuriales, les parties ne sont point obligées de se servir du ministere des procureurs, quoiqu’il y en ait d’établis dans plusieurs de ces jurisdictions, les parties sont ouies en l’audience 24 heures après l’échéance de l’assignation, & jugées sur le champ ; mais comme la plûpart des parties ont besoin de conseil pour se défendre, elles ont ordinairement recours à un procureur, lors même qu’elles ne sont pas obligées de le faire.
Dans tous les autres tribunaux le demandeur doit coter un procureur dans son exploit, & le défendeur qui ne veut pas faire défaut, doit aussi en constituer un de sa part.
Les procureurs doivent avoir un registre pour enregistrer les causes, & faire mention par qui ils sont chargés.
Ils sont aussi obligés d’avoir des registres séparés en bonne forme pour y écrire toutes les sommes qu’ils reçoivent de leurs parties, ou par leur ordre, & les représenter & affirmer véritables toutes les fois qu’ils en seront requis, à peine contre ceux qui n’auront point de registres, ou qui refuseront de les représenter & affirmer véritables, d’être déclarés non-recevables en leurs demandes & prétentions de leurs frais, salaires & vacations.
Le ministere des procureurs consiste à postuler pour les parties, c’est-à-dire, à occuper pour elles ; en conséquence ils se constituent pour leur partie par un acte qu’on appelle acte d’occuper ; ils se présentent au greffe pour leur partie, ils fournissent pour elle d’exceptions, fins de non recevoir, défenses, répliques & requêtes ; ils donnent copies des pieces nécessaires, font les sommations pour plaider, font signifier les qualités, levent les jugemens, les font signifier ; & en général ce sont eux qui font toute la procédure, & qui font entr’eux toutes les significations qu’on appelle expéditions de palais, ou de procureur à procureur ; ce qui se fait avec tant de bonne foi au parlement de Paris, que l’on se contente de mettre la signification sur l’original.
A l’audience, le procureur assiste l’avocat qui plaide la cause de sa partie.
L’usage a aussi introduit que les procureurs peuvent plaider sur les demandes où il s’agit plus de fait & de procédure, que de droit.
Dans les instances & procès ce sont eux qui mettent au greffe les productions qui font les productions nouvelles & autres écritures de leur ministere.
Les procureurs ont chacun un banc au palais, c’est-à-dire le lieu où ils s’arrêtent, stationes. Ils étoient autrefois obligés d’être dès 5 heures du matin, à leur banc, & y travailloient à la lumiere. Chaque procureur avoit son banc à part ; mais le nombre des procureurs s’étant multiplié, ils se mirent dans un même banc, & ensuite un plus grand nombre ; & pour indiquer le lieu où chacun se mettoit, leurs noms étoient écrits en grosses lettres au-dessus de leurs bancs, comme on en voit encore dans la grande salle à Paris ; mais depuis l’usage des listes imprimées, on a cessé de faire écrire les noms au-dessus des bancs.
Dans quelques tribunaux, comme à Lyon, leurs clercs signent pour eux en leur absence ; à Paris ils
sont obligés, suivant les réglemens, d’avoir chacun deux de leurs confreres pour substituts, lesquels signent pour eux en cas d’absence ou autre empêchement.
Outre ces substituts, ils ont chez eux des clercs qui sont des jeunes éleves qui les aident dans leurs expéditions, & qui viennent ainsi apprendre chez eux la pratique du palais. L’étude des procureurs est l’école où viennent se former presque tous les jeunes gens destinés à remplir des offices de judicature, ou qui se destinent au barreau, ou à la profession de procureur ou autre emploi du palais.
Les procureurs ne sont garans de la validité de leur procédure que dans les decrets seulement, & cette garantie ne dure que dix ans.
Dans les autres matieres, s’ils excedent leur pouvoir, ils sont sujets au désaveu.
S’ils font quelque procédure contraire aux ordonnances & réglemens, on la déclare nulle, sans aucune répétition contre leur partie.
Un procureur est obligé d’occuper pour sa partie jusqu’à ce qu’il soit révoqué.
Quand la partie qui l’avoit chargé vient à décéder, son pouvoir est fini ; il lui faut un nouveau pouvoir des héritiers pour reprendre & occuper pour eux.
Lorsque c’est le procureur qui décede pendant le cours de la contestation, on assigne la partie en constitution de nouveau procureur.
Ils ont hypotheque du jour de la procuration.
Lorsque leur partie obtient une condamnation de dépens qu’ils ont avancés, ils peuvent en demander la distraction, & dans ce cas les dépens ont la même hypotheque que le titre.
Suivant la jurisprudence du parlement de Paris, il est défendu aux procureurs de retenir les titres & pieces des parties, sous prétexte de défaut de payement de leurs frais & salaires ; mais on ne peut les obliger de rendre les procédures qu’ils ne soient entierement payés.
La déclaration du 11 Décembre 1597 porte que les procureurs, leurs veuves & héritiers ne pourront être poursuivis ni recherchés directement, ni indirectement pour la restitution des sacs & pieces dont ils se trouveront chargés cinq ans auparavant l’action intentée contre eux, lesquels cinq ans passés, l’action demeurera nulle, éteinte & prescrite ; l’arrêt d’enregistrement du 14 Mars 1603 porte qu’ils seront pareillement déchargés, au bout de dix ans, des procès indécis & non jugés, & de ceux qui sont jugés, au bout de cinq ans, & que leurs veuves ou autres ayant droit d’eux, seront déchargés au bout de cinq ans après le décès des procureurs, des procès tant jugés qu’indécis.
Les procédures qui sont dans l’étude d’un procureur, forment ce que l’on appelle sa pratique ; c’est un effet mobilier que les procureurs, leurs veuves & héritiers peuvent vendre avec l’office, ou séparément.
Les procureurs ne peuvent être cautions pour leurs parties ; ils ne peuvent prendre le bail judiciaire, ni se rendre adjudicataires des biens dont ils poursuivent le decret, à moins qu’ils ne soient créanciers de leur chef & poursuivans en leur nom, suivant le réglement du parlement du 22 Juillet 1690.
On tient communément qu’ils ne peuvent recevoir aucune donation universelle de la part de leurs cliens pendant le cours du procès ; il y a cependant quelques exemples que de telles libéralités ont été confirmées ; cela dépend des circonstances qui peuvent écarter les soupçons de suggestion.
Il y a à ce sujet un arrêt mémorable, qui est celui du 22 Juin 1700, qui confirma un legs universel fait au profit de Me François Pillon, procureur au châtelet, par la dame du Buat sa cliente. C’étoit par un testament olographe que la testatrice, trois ans avant sa