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cette regle ; savoir, le roi & la reine qui plaident chacun par leur procureur général ; tous les seigneurs justiciers plaident dans leur justice sous le nom de leur procureur-fiscal ; les mineurs sous le nom de leur tuteur ou curateur ; les commandeurs de l’ordre de Malte plaident sous le nom du procureur-général de leur ordre, comme prenant leur fait & cause, lorsqu’il s’agit du fond d’un bien ou droit appartenant à l’ordre ; mais lorsqu’il s’agit de simple administration, les commandeurs plaident en leur nom. Les capucins plaident au nom de quelque personne de considération, qui est leur protecteur & syndic, & que l’on condamne à payer pour eux ; il est de même des autres ordres mendians, qui ne plaident qu’assistés de leur pere temporel.

Dans les îles & dans les tribunaux maritimes, il est assez commun de voir les commissionnaires plaider en leur nom pour les intérêts de leur commettant ; ce qui n’a lieu sans doute qu’à cause de l’absence du commettant, & que l’on ne connoît que le commissionnaire, sauf à lui son recours.

Les premiers qui s’adonnerent en France à faire la fonction de procureurs, n’étoient point personnes publiques, mais il paroît qu’il y en avoit d’établis en titre dès le tems que le parlement fut rendu sédentaire à Paris.

Il y en avoit pour le châtelet en particulier dès 1327, comme il paroît par des lettres de Philippe VI. du mois de Février, qui défendent qu’aucun soit tout ensemble avocat & procureur, & ordonnent que si l’avocat, procureur, notaire, sergent étoit repris parjure, il sera privé du châtelet à toujours & de tous offices.

Il y avoit des procureurs au parlement dès 1341, il falloit même que leur établissement fût plus ancien ; car on trouve qu’en cette année ils instituerent entr’eux une confrairie de dévotion, qui a sans doute servi de fondement à leur communauté ; ils étoient au nombre de vingt-sept, lesquels firent un traité avec le curé de Sainte-Croix en la cité, dans l’église duquel ils étoient apparemment convenus d’établir leur confrérie.

Dans les statuts qu’ils dresserent eux-mêmes, ils se qualifient les compagnons-clercs & autres procureurs & écrivains, fréquentans le palais & la cour du roi notre sire à Paris & ailleurs ; & le roi en confirmant ces statuts, les qualifie de même procureurs & écrivains au palais notre sire le roi à Paris & à ailleurs en la cour & en l’hôtel dudit seigneur.

Ces expressions sont connoître que la fonction des procureurs étoit d’écrire les procédures nécessaires, qu’ils faisoient leurs expéditions au palais à Paris, comme cela se pratique encore à Rouen. Les procureurs au parlement de Paris se regardoient encore comme ambulatoires à la suite de la cour, sans doute parce qu’il n’y avoit pas long-tems que le parlement avoit commencé à être sédentaire à Paris.

Le reglement fait par la cour le 11 Mars 1344, contient plusieurs dispositions par rapport aux procureurs des parties qu’il qualifie de procureurs-généraux. Il veut entr’autres choses que leurs noms soient mis par écrit après ceux des avocats, & qu’ils prêtent serment, & qu’aucun ne soit admis à exercer l’office de procureur-général qu’il n’ait prêté ce serment & ne soit écrit in rotulis, c’est-à-dire sur les rouleaux ou rôles des procureurs, auxquels depuis ont succédé les listes imprimées.

Il n’étoit donc plus permis à personne d’exercer la fonction de procureur ad lites, sans être reçu en cette qualité, les aspirans étoient présentés par ceux qui exerçoient cette profession. Quand il vaquoit une place, c’étoit ordinairement la récompense de ceux qui avoient employé leur jeunesse à servir de clercs dans les études de procureurs, ou dans celles des conseillers, ou dans les greffes. Le récipiendaire

présentoit requête pour être reçu ; elle étoit communiquée aux gens du roi qui s’informoient diligemment des vie & mœurs du récipiendaire, & s’il n’y avoit point d’empêchement, il étoit examiné & reçu au serment autant qu’il fût trouvé capable, ainsi que cela se pratique encore présentement.

Mais depuis long-tems il est d’usage constant au palais, qu’aucun ne peut être reçu en un office de procureur au parlement qu’il n’ait été inscrit sur les registres de la communauté des procureurs, & sur ceux de la bazoche du palais, pour justifier des dix années de cléricature au palais.

Le nombre des procureurs de chaque siege n’étoit point limité, le juge en recevoit autant qu’il jugeo t à propos ; on se plaignit au châtelet que le nombre des procureurs étoit excessif ; c’est pourquoi Charles V. par des lettres du 16 Juillet 1378, ordonna que le nombre de ces officiers seroit réduit à quarante : il donna commission aux gens du parlement pour révoquer tous ceux qui exerçoient alors, & voulut qu’en appellant avec eux le prevôt de Paris & quelques-uns de ses conseillers, il en choisissent quarante des plus capables pour être procureurs généraux du châtelet, & que quand il vaqueroit un de ces offices, le prevôt de Paris, assisté de quelques conseillers, y nommeroit.

Mais Charles VI. par des lettres du 19 Novembre 1393, ordonna que le nombre des procureurs du châtelet ne seroit plus fixé à 40, & que tous ceux qui voudroient exercer cet emploi pourroient le faire, pourvû que trois ou quatre avocats notables de cette cour certifiassent au prevôt de Paris qu’ils en étoient capables.

Le nombre des procureurs au parlement s’étoit aussi multiplié à tel point que Charles VI. par des lettres du 13 Novembre 1403, donna pouvoir aux présidens du parlement de choisir un certain nombre de conseillers de la cour avec lesquels ils diminueroient celui des procureurs : il leur ordonna de retrancher tous ceux qui n’auroient pas les qualités & capacités requises ; mais il ne fixa point le nombre de ceux qui devoient être conservés.

Louis XII. en 1498, ordonna pareillement que le nombre des procureurs au parlement seroit réduit par la cour, & que les autres juges feroient la même chose chacun dans leur siege.

Il n’y avoit eu jusqu’alors au parlement que 80, 100, ou au plus 120 procureurs ; mais en 1537 il y en avoit plus de 200. C’est pourquoi la cour ordonna par un arrêt du 18 Décembre, que dorénavant il n’y seroit plus reçu de procureurs en si grand nombre que par le passé, jusqu’à ce que la cour eût avisé à réduire le nombre qui étoit alors existant.

François I. voyant que l’ordonnance de son prédécesseur n’avoit pas été exécutée, ordonna le 16 Octobre 1544, que dans ses cours de parlemens, bailliages, sénéchaussées, prevôtés, sieges y ressortissans, & autres jurisdictions royales quelconques, aucun ne seroit reçu à faire le serment de procureur, outre ceux qui étoient alors en exercice, jusqu’à ce qu’il en eût été autrement par lui ordonné.

Il déclara néanmoins le premier Novembre suivant, qu’il n’avoit entendu par-là déroger aux prérogatives accordées à son parlement de Paris, & aux autres cours souveraines, baillis & autres juges royaux, de pourvoir aux états & charges de procureurs, qu’il feroit lever les défenses par lui faites, après que le nombre des procureurs auroit été réduit d’une maniere convenable.

L’édit des présidiaux de l’année 1551, annonce que le roi avoit toujours pour objet de réduire le nombre des procureurs de chaque siege, suivant ce qui seroit arrêté par l’avis des juges & officiers.

François II. défendit encore le 29 Août 1559, de