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on voit que c’étoit lui qui mettoit les conseillers au châtelet ; qu’il mandoit quand il vouloit au châtelet les conseillers de ce siege ; qu’il pouvoit priver de leur office les officiers de son siege qui manquoient à leur devoir, puis en écrire au roi pour savoir sa volonté. Il paroît même qu’il fut nommé pour la réformation des abus du châtelet. On mettoit les procès du châtelet dans un coffre dont il avoit la clé, & c’étoit lui qui en faisoit la distribution ; c’étoit lui qui instituoit les notaires, & qui nommoit les sergens à cheval.

Il étoit chargé en 1348, de faire observer dans son ressort, les ordonnances sur le fait des monnoies. Il avoit le tiers des confiscations ; & si le roi faisoit remise d’une partie de la confiscation, le prevôt de Paris n’en avoit pas moins son tiers.

Il avoit inspection sur tous les métiers & marchandises ; c’est pourquoi il étoit appellé avec les maîtres des métiers pour connoître de la bonté des marchandises amenées à Paris par les marchands forains.

Il moderoit la taxe que le prevôt des marchands & les échevins de la ville de Paris levoient sur les Cabaretiers de cette ville, lorsque cette taxe étoit trop forte.

Les Bouchers lui devoient une obole tous les dimanches qu’ils coupoient de la viande.

Les anciens statuts des métiers portoient qu’il pourroit y faire des changemens lorsqu’il le jugeroit à propos ; on voit même qu’il en dressoit de nouveaux, appellant à cet effet avec lui le procureur du roi & le conseil du châtelet ; & même du tems du roi Jean, cette inspection s’étendoit sur le sel.

Il avoit aussi alors inspection sur tout ce qui concernoit la marée ; c’étoit lui qui élisoit les jurés de la marée & du poisson d’eau douce ; il recevoit le serment des prud’hommes du métier de la marée : les vendeurs de marée donnoient caution devant lui.

C’étoit lui qui faisoit exécuter les jugemens du concierge & bailli du palais en matiere criminelle. Lorsqu’il s’agissoit du criminel laïc, les officiers de sa justice le livroient hors la porte du palais au prevôt de Paris pour en faire l’exécution ; ils retenoient seulement les meubles des condamnés.

Le roi Charles VI. par des lettres du 27 Janvier 1382, supprima la prevôté des marchands de Paris, l’échevinage & le greffe de cette ville, & ordonna que leur jurisdiction seroit exercée par le prevôt de Paris, auquel il donna la maison-de-ville, située dans la place de Greve, afin que le prevôt de Paris eût une maison où il pût se retirer lui & ses biens, & dans laquelle ceux qui seroient dans le cas d’avoir recours à lui, comme à leur juge, pussent le trouver ; & il ordonna que cette maison seroit nommée dans la suite la maison de la prevôté de Paris.

L’auteur du grand coutumier qui écrivoit sous le regne de Charles VI. dit que le prevôt de Paris est le chef du châtelet, & institué par le roi, & qu’il représente sa personne quant au fait de justice.

Jean le Cocq (Joannes Galli), célebre avocat de ce tems-là, & qui fut aussi avocat du roi, dit en plaidant en 1392, une cause pour le roi contre l’évêque de Paris, au sujet d’un prisonnier qui avoit été reconnu dans une église par le prevôt de Paris, dit que ce prevôt étoit le premier après le roi dans la ville de Paris, & après MM. du parlement qui représentent le roi ; qu’il lui appartenoit de conserver & défendre les droits royaux, & que ce que le prevôt de Paris avoit fait, c’étoit en conservant les droits du roi & ceux de son office, qui lui avoient été adjugés par arrêt.

Dans ce même siecle, en 1350, le roi Jean commit le prevôt de Paris pour rendre hommage à l’évêque de Paris des châtellenies de Tournan & de Torcy en Brie, comme avoit dejà fait Louis le Gros en

1126 ; il est toujours qualifié præpositus nosier, le prevôt du roi.

Il a la garde du parquet & le droit d’assister aux états généraux, comme premier juge ordinaire & politique de la capitale du royaume.

3°. Il a un dais toujours subsistant au châtelet, prérogative dont aucun autre magistrat ne jouit, & qui vient de ce qu’autrefois nos rois, & notamment S. Louis, venoient souvent au châtelet pour y rendre la justice en personne.

4°. Le prevôt de Paris est le chef de la noblesse de toute la prevôté & vicomté, & la commande à l’arriere-ban, sans être sujet aux gouverneurs, comme le sont les baillis & sénéchaux.

5°. Il a douze gardes, appellés sergens de la douzaine, qui doivent l’accompagner soit à l’auditoire, ou ailleurs par la ville & dans toutes les cérémonies. Ce droit lui fut accordé des 1309, par Philippe-le-Bel. L’habillement de ces gardes est un hocqueton ou espece de cotte d’armes : ils sont armés de hallebardes. Le prevôt de Paris a été maintenu en possession de ces gardes & de leur habillement, par un arrêt solemnel du 27 Juin 1566, comme premier juge ordinaire de la ville de Paris.

6°. Son habillement qui est distingué, est l’habit court, le manteau & le collet, l’épée au côté, un bouquet de plumes sur son chapeau ; il porte un bâton de commandant, couvert de toile d’argent ou de velours blanc.

7°. Il vient dans cet habillement à la tête de la colonne du parc civil, en la grand-chambre du parlement, à l’ouverture du rôle de Paris, & après l’appel de la cause, il se couvre de son chapeau, ce qui n’est permis qu’aux princes, ducs & pairs, & à ceux qui sont envoyés de la part du roi.

8°. Suivant une ordonnance de Charles VI. en 1413, pour être prevôt de Paris il faut être né dans cette ville ; tandis qu’au contraire cette même ordonnance défend de prendre pour baillis & sénéchaux, ceux qui sont natifs du lieu.

9°. Les ordonnances distinguent encore le prevôt de Paris des baillis & sénéchaux, en le désignant toujours nommément & avant les baillis & senéchaux, lorsqu’on a voulu le comprendre dans la disposition, ou l’en excepter.

10°. Il connoît du privilege qu’ont les bourgeois de Paris, de faire arrêter leurs débiteurs forains ; il est le conservateur des privileges de l’université ; il a la connoissance du sceau du châtelet, attributif de jurisdiction ; & c’est de lui que plusieurs communautés tiennent leurs lettres de garde gardienne.

11°. Il est installé dans ses fonctions par un président à mortier & quatre conseillers de grand’chambre, deux laïcs & deux clercs, tant au parc civil qu’au présidial, en la cambre du conseil & au criminel. Il doit faire présent d’un cheval au président qui l’a installé. Les cérémonies qui s’observent à sa réception & installation, sont au long détaillées dans le dictionn. des arrêts au mot châtelet.

M. de Segur, actuellement prevôt de Paris, le jour de sa réception en la grand’chambre, qui fut le 7 lévrier 1755, vint au palais en carrosse avec deux autres carrosses de suite, accompagné de ses douze hoquetons, de tout le guet à pié, & de la compagnie de robe-courte. Après sa réception en la grand’chambre, il alla avec le même cortege au châtelet pour y être installé. Après la lecture de ses provisions, M. le président Molé qui l’installoit, lui dit de prendre place. Il se mit après les deux conseillers laïcs, qui étoient à la droite du président : le lieutenant civil & les conseillers au châtelet restent en place. Le président fait appeller deux placets, & continue les causes au lendemain en ces termes, la cour a continué la cause à demain au parc civil.