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Prêtres d’Achaïe, (Hist. ecclés.) L’histoire ecclésiastique a nommé prêtres d’Achaie ceux qu’on dit avoir été présens au martyre de l’apôtre S. André, en l’an 59, & qui en rédigerent des actes adressés à toutes les églises du monde. Cette piece se trouve en latin dans Lipoman & Surius, histoire des Saints, ad diem 30 Novembris. Quelques savans de l’église romaine, tels que Bellarmin & le P. Labbe, reçoivent ces actes comme légitimes : Baronius au contraire paroît douter de leur autorité ; & MM. Tillemont & Dupin les rejettent absolument, comme le fruit d’une fraude pieuse, & la production peu sensée de quelque moine zélé.

En effet, il s’y trouve plusieurs choses qui ne conviennent en aucune maniere au siecle des apôtres ; le tour du titre même est nouveau & singulier : Ab universis ecclesiis, quæ sunt in oriente & occidente & meridiano, & septentrione ; c’est-à-dire, de toutes les églises d’orient & d’occident, du septentrion & du midi. Outre cela, il est peu croyable que saint André en parlant au proconsul, se soit servi de ces antithèses recherchées, l’arbre de transgression, & l’arbre du paradis, la terre immaculée, dont le premier homme a été formé, & la vierge immaculée, dont Christ est né homme parfait ; ou qu’il ait avancé tant de choses affectées & absurdes sur le sujet de la croix. Peut-on encore raisonnablement supposer que toute une province se soit assemblée pour tuer Egée, & pour tirer un apôtre de prison ? On ne peut guere concevoir aussi que l’apôtre ait parlé à un proconsul séant sur son tribunal en termes si peu mesurés, que de l’avoir appellé fils de la mort, tison d’enfer, filium mortis, & stipulam æternis paratam incendiis ; & qu’il ait osé lui reprocher son imprudence : ce sont-là des traits incompatibles avec la douceur de l’apôtre.

Je n’insisterai point sur les étranges circonstances qui accompagnerent, dit-on, son crucifiement ; je remarquerai seulement que le mystere de la Trinité se trouve expliqué dans cette piece d’une maniere qui donne juste sujet de soupçonner qu’elle a été forgée après le concile de Nicée. L’auteur paroît aussi être dans le sentiment des Grecs modernes au sujet du S. Esprit, qu’il dit procéder du pere & demeurer dans le fils : question à laquelle on ne pensa que plusieurs siecles après les Apôtres. (D. J.)

Prêtre des Chrétiens, (Critiq. sacrée.) pasteur de l’église chrétienne ; en grec πρεσϐύτερ, en latin presbyter, dignité ecclésiastique. Ce mot πρεσϐύτερ signifie également dans le nouveau Testament un prêtre & un évêque ; ensorte que presbyterium qui est dans le grec & dans le latin, se prend pour l’assemblée de ceux qui présidoient aux églises ; cependant il est certain qu’il y avoit un premier prêtre, ἐπίσκοπος, qui présidoit au presbytere sur les autres prêtres ; mais il ne s’appelloit pas évêque à l’exclusion des prêtres ; il n’avoit point une ordination particuliere ; il ne faisoit rien dans l’église qu’avec le conseil de ses prêtres. La premiere place, le premier rang lui appartenoit, & les prêtres avoient le second. Enfin au commencement les titres de pasteurs, conducteurs, prêtres, évêques, étoient synonymes.

Le titre de sacrificateur n’est jamais donné aux prêtres dans l’Ecriture. Quand il est parlé d’un sacerdoce sous le nouveau Testament, il s’agit d’un sacerdoce commun à tous les fideles, parce qu’ils ont tous le droit d’offrir à Dieu par Jesus-Christ des sacrifices d’actions de graces, & de s’approcher de Dieu par lui. Les prêtres de Dieu, dit Clément d’Alexandrie, sont ceux qui vivent saintement. Mais dès le tems de Tertullien, c’est-à-dire vers la fin du second siecle, le nom de sacrificateurs se donnoit aux prêtres, & celui de souverain sacrificateur ou de grand prêtre, à l’évêque, le tout à l’imitation des Juifs, dont on emprunta en même tems les ornemens. (D. J.)

Prêtre égyptien, (Antiq. égypt.) Les antiquaires les ont souvent confondus avec les dieux dont ils étoient les ministres. Dans les monumens qui nous en restent, on rencontre dans leur coëffure & dans leurs autres attributs, des variétés qui marquoient apparemment le rang, la dignité de chacun, & l’espece de culte auquel ils étoient destinés. Les uns sont assis, & dans l’attitude de lire ; d’autres sont à genoux, les mains élevées comme les Musulmans ; d’autres sont debout, & tiennent le bâton fourchu des deux mains. On en voit debout, & ayant une coëffure coupée quarrément ; d’autres sont représentés debout prêts à marcher, ayant les épaules ornées, & les cuisses couvertes depuis la ceinture jusqu’aux genoux d’une étoffe rayée ; quelquefois ils ont la plante persea attachée au bonnet, qui prend exactement toute la tête, depuis les sourcils jusqu’au-dessous des oreilles, qu’il laisse découvertes. Cette coëffure est très-singuliere par sa forme : son sommet sur le haut de la tête est coupé dans sa largeur par une rainure qui servoit peut-être à placer des ornemens, que l’on changeoit selon l’objet des cérémonies religieuses. Voyez M. de Caylus, antiquit. égypt. tome II. (D. J.)

Prêtre, bonnet de, (Fortification.) On nomme bonnet-de prêtre un ouvrage dont la tête est formée de trois angles saillans, qui dans leur prolongation du côté de la place se rapprochent l’un de l’autre.

PRÊTRESSE, (Antiquit. grecq. & rom.) femme consacrée au culte de quelque dieu du paganisme. La discipline que les Grecs observoient dans le choix des prêtresses, n’étoient pas uniforme ; en certains endroits on prenoit de jeunes personnes qui n’avoient contracté aucun engagement ; telles étoient entr’autres la prêtresse du temple de Neptune, dans l’île Calauria ; celle du temple de Diane à Egire en Achaïe, & celle de Minerve à Tégée en Arcadie. Ailleurs, comme dans le temple de Junon en Messénie, on revêtoit du sacerdoce des femmes mariées. Dans un temple de Lucine, situé auprès du mont Cronius en Elide, outre la prêtresse principale, on voyoit des femmes & des filles attachées au service du temple, & occupées tantôt à chanter les louanges du génie tutélaire de l’Elide, & tantôt à brûler des parfums en son honneur. Denis d’Halicarnasse observe aussi que les temples de Junon dans la ville de Falere en Italie, & dans le territoire d’Argos ; étoient desservis par une prêtresse vierge nommée Κανηφόρα, Cistophore, qui faisoit les premieres cérémonies des sacrifices, & par des chœurs de femmes qui chantoient des hymnes en l’honneur de cette déesse. L’ordre des prêtresses d’Apollon amycléen, étoit vraissemblablement formé sur le même plan que celui des prêtresses de Junon à Falere & à Argos : c’étoit une espece de société où les fonctions du ministere se trouvoient partagées entre plusieurs personnes. Celle qui étoient à la tête des autres prenoit le titre de mere ; elle en avoit une sous ses ordres à qui on donnoit le titre de fille ou de vierge ; & après cela venoient peut-être toutes les prêtresses subalternes, dont les noms isolés paroissent dans quelques inscriptions. (D. J.)

PRETTIGÆU, (Géog. mod.) en latin regio Rucantiorum ; pays chez les Grisons dans la Ligue des dix Jurisdictions, au nord-est de la communauté de Davos. Son nom est corrompu de Rhetigæw (Rhetigoja), & vient de celui du mont Rhætico, qui s’étend dans toute la longueur du pays, & le couvre du côté du Tirol.

Le Prettigæu est proprement une longue vallée au pié du mont Rhætico, arrosée dans toute sa longueur par une riviere nommée Lauquart (Laugarus), qui sort du sommet du mont Rhaetur, & qui va se jetter dans le Rhin. Ce pays en hiver est presque entierement fermé par les neiges, & souvent les avalanches