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& les frais de notre établissement ; c’est par conséquent 135000 livres à partager. Dictionnaire de Commerce.

PRÉLIBATION, Droit de, (Hist. du Droit.) C’étoit ce droit que les seigneurs s’arrogerent avant & dans le tems des croisades, de coucher la premiere nuit avec les nouvelles mariées, leurs vassales roturieres. On nommoit aussi populairement ce droit le droit de cuisage en France, & de marchette en Angleterre. Des évêques, des barons s’attribuerent ce droit en qualité de hauts-barons ; & quelques-uns se sont fait payer dans le dernier siecle par leurs sujets, la renonciation à ce droit étrange, qui eut long-tems cours dans presque toutes les provinces de France & d’Ecosse. Voyez Marchette. (D. J.)

PRÉLIMINAIRES, s. m. pl. (Hist. mod. Politiq.) Lorsque des puissances sont en guerre, & pensent à terminer leur querelle par un traité de paix, on nomme préliminaires les articles principaux dont ces puissances sont convenues entr’elles ; ces articles sont signés par les ministres des puissances belligérantes, & ils précedent ordinairement un congrès où les ambassadeurs s’assemblent pour applanir les difficultés de détail qui peuvent encore s’opposer à la conclusion de la paix. La signature des préliminaires est ordinairement suivie d’une suspension d’armes ou d’une treve.

PRÉLUDE, s. m. (Musique.) est un morceau de symphonie qui sert d’introduction ou de préparation à une piece de musique. Ainsi les ouvertures d’opéra sont des especes de préludes, comme aussi les ritournelles qui sont au commencement de scenes.

Prélude est encore un trait de chant qui passe par les principales cordes du ton, ou une piece irréguliere que le musicien joue d’abord pour donner le ton, pour voir si son instrument est d’accord, & pour se préparer à commencer. (S)

PRÉLUDER, v. n. (Musique.) c’est chanter ou jouer quelque morceau de fantaisie irrégulier & assez court, pour donner le ton, ou bien pour poser sa main sur un instrument.

Mais sur l’orgue & le clavecin, l’art de préluder est quelque chose de plus considérable : c’est composer & jouer sur le champ des pieces chargées de tout ce que la composition a de plus savant en desseins, en fugues, en imitations & en harmonie. Pour y réussir, il ne suffit pas d’être bon compositeur, il ne suffit pas même de bien posséder son clavier & d’avoir la main bonne & bien exercée, il faut encore abonder de ce feu de génie & de cette présence d’esprit, qui font trouver sur le-champ les sujets les plus favorables à l’harmonie, & les chants les plus flatteurs à l’oreille. C’est par le prélude que brillent les excellens organistes, tels que les sieurs Daquin & Calviere ; & c’est par toute la profondeur de cet art, que M. le prince d’Ardore, aussi célebre parmi les plus fameux musiciens, qu’illustre & respectable parmi les plus grands seigneurs & les plus sages ministres, a fait long-tems à Paris l’admiration de tous les connoisseurs. (S)

PRÉMATURÉ, adj. (Langue françoise.) Ce terme tiré du latin, est utile, expressif & beau ; mais il faut remarquer qu’il se prend en deux sens différens. Quand il se dit des fruits, de l’esprit & de ses qualités, il signifie mûr, formé avant le tems ordinaire. Ce sont des fruits prématurés ; c’est un esprit prématuré, une sagesse prématurée. La mort ne peut être prématurée à un consulaire ; mais quand on dit, par exemple, qu’une affaire est prématurée, cela signifie qu’il n’est pas encore tems de l’entreprendre. Cette entreprise est prématurée, c’est-à-dire, il n’est pas encore tems de l’exécuter. (D. J.)

PRÉMÉDITATION, s. f. PRÉMÉDITÉ, participe, termes relatifs à un dessein, à une action, à une

démarche qu’on n’exécute qu’après une mûre réflexion. On ne peut douter, aux circonstances de cette aventure, qu’elle n’ait été préméditée.

PREMERY, (Géog. mod.) petite ville ou, si l’on veut, bourg de France dans le Nivernois, avec titre de chatellenie. Lévêque de Nevers en est seigneur. (D. J.)

PREMESSE, (Jurisprud.) est un terme usité dans quelques coutumes, pour exprimer la proximité de lignage. Voyez ci-après Proesme. (A)

PRÉMICES, s. f. pl. (Histoire.) On donnoit ce nom aux présens que les Hébreux faisoient au Seigneur, d’une partie des fruits de leur récolte, pour témoigner leur soumission & leur dépendance, & pour reconnoître le souverain domaine de Dieu, auteur de tout bien.

On offroit ces prémices au temple d’abord, avant que de toucher aux moissons, & ensuite après les moissons, avant que les particuliers commençassent à en user ; & c’est pour cela qu’on les appelloit prémices.

Les premieres prémices qui s’offroient au nom de toute la nation, étoient une gerbe d’orge que l’on cueilloit le soir du 15 de Nisan, & que l’on battoit dans le parvis du temple. Après l’avoir bien vanné & nettoyé, on en prenoit environ trois pintes que l’on rôtissoit & concassoit dans le mortier : on jettoit par-dessus un log d’huile : on y ajoutoit une poignée d’encens ; & le prêtre prenant cette offrande, l’agitoit devant le Seigneur vers les quatre parties du monde. Il en jettoit une poignée sur le feu, & le reste étoit à lui. Après quoi chacun pouvoit mettre la faucille dans sa moisson.

Lorsque la moisson du froment étoit achevée, c’est-à-dire le jour de la Pentecôte, on offroit encore au Seigneur des prémices d’une autre sorte au nom de toute la nation, lesquelles consistoient en deux pains de deux assarons, c’est-à-dire de trois pintes de farine chacun : ces pains étoient de pâte levée. Josephe, antiquit. l. III. c. x. ne met qu’un pain ; & il dit qu’on le servoit aux prêtres à souper le soir même avec les autres offrandes, & qu’il falloit les manger ce jour-la, sans qu’il en restât rien pour le lendemain.

Outre ces prémices qui s’offroient au nom de toute la nation, chaque particulier étoit obligé d’apporter ses prémices au temple du Seigneur. L’Ecriture n’en prescrit ni le tems ni la quantité ; mais les rabbins enseignent qu’il falloit apporter au temple au-moins la soixantieme partie de sa récolte & de ses fruits, quoiqu’il ne fût pas défendu d’être plus libéral. On s’assembloit par troupes de vingt-quatre personnes, pour apporter en cérémonie ces prémices. Cette troupe étoit précédée d’un bœuf destiné pour le sacrifice, couronné d’une couronne d’olivier, & ayant les cornes dorées. Un joueur de flûte marchoit devant eux à Jérusalem. Les prémices étoient de froment, d’orge, de raisins, de figues, d’abricots, d’olives & de dattes. Chacun portoit son panier : les plus riches en avoient d’or, d’autres d’argent ; les plus pauvres en avoient d’osier. Ils marchoient en pompe jusqu’au temple, en chantant des cantiques ; lorsqu’ils approchoient de la ville sainte, les bourgeois alloient au-devant d’eux, & les saluoient civilement.

Quand ils arrivoient à la montagne du temple, chacun, même le roi, s’il y étoit, prenoit son panier sur son épaule, & le portoit jusqu’au parvis des prêtres : alors les lévites entonnoient quelques paroles du pseaume xxx ; & celui qui apportoit les prémices disoit : Je reconnois aujourd’hui publiquement devant le Seigneur votre Dieu, que je suis entré dans la terre qu’il avoit promise avec serment à nos peres de nous donner. Alors il mettoit le panier sur sa main ; & le prêtre le soutenant par-dessous, celui qui l’offroit récitoit une espece de priere où il faisoit mention de l’entrée & de la sortie d’Israël en Egypte, des merveilles que