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& la beauté du serti dépendent de l’ajustage de la portée. Il faut que le feuilleti de la pierre repose bien également, que la pierre ne soit pas trop enfoncée, & que l’ajustage ne soit pas trop lâche : sans ces conditions il peut résulter nombre d’inconvénient au serti, tel que celui de courir risque de casser la pierre losqu’elle porte à faux en quelqu’endroit de la portée, de n’avoir pas assez de matiere pour remplir les entre-deux des pierres lorsque l’ajustage est trop lâche, &c.

Portées, s. f. pl. terme de Plombier. Les Plombiers nomment les portées d’un moule à fondre les tuyaux sans soudure, deux petits tuyaux de cuivre de deux pouces de long ou environ, & de l’épaisseur que l’on veut donner aux tuyaux de plomb qui traversent les rondelles qui sont aux deux bouts du moule. (D. J.)

Portée, s. f. (Manufact. de lainage.) C’est un certain nombre de fils qui font partie de la chaîne d’étoffe.

La chaîne d’une étoffe de laine doit être composée d’une certaine quantité de portées, & chaque portée d’un certain nombre de fils. Le nombre des portées que chaque étoffe doit avoir, est fixé par les réglemens du lieu où elle se fabrique, suivant la largeur, son espece & sa qualité. Ainsi lorsque l’on dit que la chaîne d’une étoffe aura soixante-sept portées de quarante fils chacune, cela doit s’entendre que cette chaîne doit contenir en tout deux mille six cens quatre-vingt fils.

Les chaînes des étoffes de laine s’ourdissent ordinairement par demi-portées, c’est-à-dire, que chaque portée est partagée en deux, & cela pour avoir plus de facilité à les mettre sur le métier. Il y a des lieux de manufactures où les demi-portées sont appellées cuissette. Savary.

Portée, s. f. (Manufact. de soirie.) Ce mot signifie, comme dans la manufacture de lainages, un certain nombre de fils de soies, qui font une portion de la chaîne d’une étoffe ; ensorte que lorsque l’on dit qu’un taffetas de onze vingt-quatriemes d’aune de largeur entre les lisieres, aura vingt-quatre portées de vingt-quatre fils chacun, cela doit s’entendre que toute la chaîne qui est employée à faire ce taffetas, doit être composée de dix-neuf cens vingt fils.

En fait de velours, les portées se distinguent en portées de poil, & en portées de chaîne. Un velours à trois poils doit avoir soixante portées de chaîne, & chacune de ces portées doit être de quatre-vingt fils.

Les portées que doivent avoir toutes sortes de velours, taffetas, & tabis, suivant leurs différentes largeurs, especes & qualités, sont réglées par les statuts des ouvriers en draps d’or, d’argent & de soie, des villes de Paris, Lyon & Tours, faits en 1667 ; on y devroit changer bien des choses. (D. J.)

Portée, (Ruban.) s’entend dans l’ourdissage du ruban, de la descente & de la remontée du blin. Pour entendre ceci, il faut savoir que l’on ourdit ordinairement à 16 rochets, ce qui produit la demi-portée. Cette demi-portée est en croisée en haut. en commençant par deux fils de soie à la fois, voyez Encroiser. L’on descend ainsi, & lorsqu’on est arrivé à l’encroisure d’en-bas, on encroise seulement tous les 16 brins à la-fois, c’est-à-dire, qu’on les tourne à l’entour des boutons de cette encroisure, puis l’on remonte comme l’on étoit descendu pour encroiser encore par deux fils, comme il vient d’être dit, & voilà ce qu’on appelle une portée : ainsi on dit du ruban à 16, 18 ou 20 portées, selon la largeur que l’on veut lui donner. Voyez Encroiser, & Encroisure.

Portées, s. f. pl. terme de Chasse ; action du cerf, qui passant dans un bois épais, jeune & tendre, fait plier & tourner les branches avec sa tête. Salnove dit que le cerf de dix cors commence à faire des

portées de la tête à la mi-mai. (D. J.)

Portée, en Fauconnerie. On dit l’oiseau a bonne portée ; il faut tirer le filet, c’est-à-dire, l’oiseau est attaché avidement à l’appât.

PORTELOTS, s. m. pl. (Charpent.) Ce sont des pieces de bois qui regnent au pourtour d’un bateau-foncet au-dessus des plat-bords. (D. J.)

PORTER, APPORTER, TRANSPORTER, EMPORTER, (Gramm.) Porter n’a précisément rapport qu’à la charge du fardeau ; apporter renferme l’idée du fardeau, & celle du lieu où l’on le porte ; transporter a non-seulement rapport au fardeau & au lieu où l’on doit le porter, mais encore à l’endroit d’où on le prend ; emporter enchérit par-dessus toutes ces idées, en y ajoutant une attribution de propriété à l’égard de la chose dont on se charge.

Nous faisons porter ce que, par foiblesse, ou par bienséance, nous ne pouvons porter nous-mêmes ; nous ordonnons qu’on nous apporte ce que nous souhaitons avoir ; nous faisons transporter ce que nous voulons changer de place ; nous permettons d’emporter ce que nous laissons aux autres, ou ce que nous leur donnons.

Les crocheteurs portent les fardeaux dont on les charge ; les domestiques apportent ce que leurs maîtres les envoyent chercher ; les voituriers transportent les marchandises que les commerçans envoyent d’une ville dans une autre ; les voleurs emportent ce qu’ils ont pris.

Virgile a loué le pieux Enée d’avoir porté son pere Anchise sur ses épaules, pour le sauver du sac de Troie. Saint Luc nous apprend, que les premiers fideles apportoient aux apôtres le prix des biens qu’ils vendoient. L’histoire nous montre que la Providence punit l’abus de l’autorité, en la transportant en d’autres mains. Si un de nos traducteurs avoit bien fait attention aux idées accessoires qui caractérisent les synonymes, il n’auroit pas dit que le malin esprit emporta, au lieu de dire transporta Jesus-Christ.

Porter, transporter, emporter, se disent figurément en choses morales & spirituelles ; ainsi on dit porter son jugement sur quelque chose, porter impatiemment un affront. Saint Paul fut transporté au troisieme ciel, où il vit des choses ineffables ; Cyrus transporta l’empire des Medes aux Perses, & Alexandre l’empire des Perses aux Grecs ; les Stoïciens l’emportent sur tous les autres Philosophes ; la perte d’une bataille emporte la désolation du pays ; le sublime & le pathétique entraînent & emportent toute notre admiration. (D. J.)

Le verbe porter a un grand nombre d’acceptions différentes. Voyez les articles suivans, & le mot Portée.

Porter, (Critiq. sacrée.) ce terme pris au figuré dans l’Ecriture, signifie mener, conduire, protéger, se charger ; portasti eum in fortitudine tuâ, Exod. xv. 13. « Dieu a conduit son peuple avec les marques de sa puissance divine, dans la terre qu’il lui avoit promise » : porter l’iniquité des autres, Exod. xij. 38. c’est se charger de leurs fautes, ou en supporter la peine.

Porter, v. n. terme de teneur de livres, c’est la même chose qu’écrire, ou mettre un article, une partie, une dette, un payement à l’endroit d’un registre ou d’un compte qui leur convient, suivant leur différente nature. On dit porter sur le grand livre, porter sur le journal, porter à compte, porter en débit, porter en crédit, porter en recette, en dépense, en reprise, &c. Ricard. (D. J.)

Porter parole, Porter la parole, (Commerce.) porter parole, c’est faire des offres ; on m’a porté parole de cent mille livres pour ma part dans le retour du vaisseau l’Amphitrite : porter la parole, c’est parler