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terre avec ce qui est dedans pour passer les chutes d’eau qui se trouvent dans quelques fleuves, tel qu’est celui de Saint-Laurent, où il y a des chutes d’eau qui empêchent de remonter en canot.

Portage, (terme des îles d’Amérique.) c’est un trajet que les coureurs de bois, & ceux des habitans de la nouvelle France à qui on accorde la traite avec les sauvages, qu’ils font ordinairement avec des canots ou petits bateaux sur les rivieres & étangs, aux bords desquels se trouvent les habitations de ces sauvages, sont obligés de faire à pié, lorsqu’ils trouvent des sauts & des endroits difficiles dans leur chemin ; pendant cette course ils doivent porter sur leurs dos leurs canots, hardes, marchandises & provisions. (D. J.)

PORTAIL, s. m. (Archit.) c’est la façade d’un grand bâtiment où est la principale porte ; on l’entend néanmoins plus particulierement des églises. Cette partie est très-susceptible du bon goût de l’Architecture, mais les François y ont prodigué les colifichets, comme au portail des grands Jésuites de Paris ; ou bien ils ont chargé mal-à-propos leurs portails de plusieurs ordres d’Architecture, comme par exemple, le portail de S. Gervais.

Nous avons de beaux intérieurs d’églises, tels que le dôme des Invalides & du Val-de-Grace, celui des chapelles de Fresne & de Versailles ; mais nous n’avons point encore réussi à la composition des portails. Nos plus habiles architectes françois ont affecté d’élever plusieurs ordres d’architecture les uns au-dessus des autres dans la décoration de leurs portails. Cette ordonnance qui a passé comme en usage depuis la réputation du portail de S. Gervais, ne paroît pas naturelle ; elle semble donner au-dehors de nos églises l’air d’un édifice ordinaire : car les différens ordres extérieurs ont coutume d’annoncer les différens étages de l’intérieur d’un bâtiment, ce qu’il est ridicule de supposer dans une église.

Outre cela, cette décoration est tout-à-fait contraire à tout ce que l’antiquité nous a laissé de modeles en ce genre. Un seul ordre colossal formant péristile, & couronné par un fronton du côté de l’entrée, est l’unique décoration qui puisse donner au frontispice d’un temple l’air noble & majestueux qui lui convient. C’est ainsi qu’étoient décorés les plus baux temples de la Grece & de l’Italie. C’est ainsi que Michel Ange & Palladio, les deux plus habiles architectes modernes, ont exécuté les différens portails qu’ils ont fait élever à Rome, à Venise & en d’autres lieux.

On pourroit objecter que la grande élévation des couvertures de nos églises oblige d’élever ainsi plusieurs ordres d’architecture, pour pouvoir les cacher ; mais on répondra qu’il n’y a qu’à supprimer ces énormes charpentes, qui ne sont qu’un usage abusif sans aucune nécessité. La voûte plein-ceintre de la nef d’une église couverte de pierres à recouvrement, est le seul toît qui convienne au sanctuaire de la divinité. Ainsi étoient couverts les temples des anciens.

Enfin, il résulteroit d’un ordre colossal dans nos portails, qu’en le faisant regner à l’entour de nos églises, leur extérieur qui a coutume d’être si fort négligé, seroit décoré naturellement, & cacheroit les arcs-boutans qui font toujours à l’œil un effet désagréable ; & quoique par la même raison les croisées de la nef ne s’apperçussent pas en-dehors, l’intérieur de nos églises n’en seroit pas bien moins éclairé, comme on peut le remarquer dans celle de St. Pierre de Rome. (Le Chevalier de Jaucourt.)

PORTA SANTA, (Hist. nat.) nom que les Italiens donnent à un marbre d’un gris plus ou moins foncé, rempli de taches blanches & d’un rouge pâle ; il prend un très-beau poli, & se trouve en Italie.

PORTALEGRE, (Géog. mod.) ville de Portugal, dans la province d’Alentejo, au pié d’une haute mon-

tagne, dans une belle campagne, à 20 lieues au nord-est

d’Evora, & à 37 au nord-est de Lisbonne. Elle est environnée de bonnes murailles. Le pape Paul III. y érigea un évêché suffragant de Lisbonne. Long. 10. 20. lat. 39. 11. (D. J.)

PORTANT, s. m. terme de Ceinturier, c’est la partie du baudrier & du ceinturon qui pend depuis la fin d’un des côtés de la bande jusqu’aux pendans, & qui sert à raccourcir ou à alonger soit le baudrier, soit le ceinturon.

Portant, terme de porteur de chaise ; fer courbé & attaché au côté des chaises des porteurs, où l’on met les bâtons pour porter les chaises.

Portant, terme de Bahutier ; c’est un fer en forme d’anse attaché aux côtés des coffres, des malles, des cassettes & des bahuts, dont on se sert pour les soulever & les porter où l’on veut. (D. J.)

PORTATIF, adj. se dit de ce qui est aisé à porter. On dit, cette machine est d’autant meilleure, qu’elle est portative. On fait à l’armée des ponts, des moulins, des fours portatifs.

Portatif, (Commerce.) On nomme ainsi à Bordeaux une espece d’agenda ou journal manuel que portent les visiteurs tant d’entrée de mer que d’issue, sur lequel ils mettent un état abrégé des visites qu’ils font sur les vaisseaux qui entrent ou qui sortent du port de cette ville, pour ensuite les mettre tout au long sur leur registre. Dictionn. de Commerce.

Portatif se dit aussi parmi les commis & employés aux aides, d’un petit registre long & étroit sur lequel ils font leurs extraits lorsqu’ils vont faire la visite dans les caves & celliers des vendans vin. Ces portatifs doivent être signés de deux commis en chaque exercice qui se fait sur chacun desdits vendans vin. Il faut de plus qu’il y soit fait mention que les feuilles ont été delivrées & laissées aux cabaretiers & taverniers chez lesquels le dit exercice a été fait. Dict. de Comm.

PORTE, s. f. (Architecture.) ouverture pratiquée dans un mur pour entrer dans un lieu clos & pour en sortir.

On appelle proprement porte l’assemblage de menuiserie ou de charpenterie qui ferme cette ouverture.

Les premieres portes étoient quarrées, & les anciens ne donnoient une figure ronde qu’aux arcs de triomphe & aux grands passages publics. Vignole fait la hauteur des portes double de leur largeur ; comme Vignole est suivi, cette proportion est presque généralement adoptée. Cependant les dimensions des portes doivent être réglées par les ordres d’architecture qui les accompagnent. D’après cette observation, on a trouvé que dans l’ordre toscan les portes en plein ceintre doivent avoir de hauteur deux fois leur largeur, deux fois & un sixieme dans l’ordre dorique, deux fois & un quart dans l’ordre ionique, deux fois & demi dans l’ordre corinthien, & deux fois & un tiers dans l’ordre composite. A l’égard des portes à plate bande, on détermine leur proportion en divisant leur largeur en douze parties, dont on donne 23 à la hauteur de la porte toscane, 24 à la dorique, 25 à l’ionique, 26 à la corinthienne, & 25 & demie à la composite. Ainsi la porte toscane sera moins haute que le double de la largeur, d’un douzieme ; la porte dorique aura sa hauteur double de sa largeur ; l’ionique aura un douzieme plus que le double ; la corinthienne un sixieme, & la composite un huitieme.

Le mot porte vient de porter ; & voici comment Donat le prouve. Anciennement lorsqu’on faisoit le dessein & l’alignement des murs d’une ville, ce qui se faisoit avec observation des cérémonies religieuses, celui qui tenoit le manchereau de la charrue tirée par un taureau & une vache, dont le soc alloit marquant d’une raie le lieu & le contour de la muraille future ; quand il étoit arrivé aux endroits où