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Quelques botanistes prétendent que certaines plantes sont particulieres à certains lieux, comme le baume, par exemple, à la Judée, &c. mais M. Ray demande qu’il lui soit permis de s’éloigner de leur sentiment, jusqu’à ce qu’ils aient de meilleures preuves qu’un argument négatif. D’ailleurs, supposé qu’il y ait des plantes locales, on ne sauroit prouver qu’elles pussent périr, à moins qu’elles ne soient dans des îles englouties par la mer. Si les plantes locales étoient détruites par les hommes, ou par quelqu’accident, comme diverses graines resteroient dans le terroir où ces plantes croissent, ce terroir produiroit de nouveau les mêmes plantes ; & si le baume est une plante originaire de la Judée, supposé qu’on l’eût transporté en Egypte ou ailleurs, son ancien terroir l’auroit reproduit, à moins que la constitution de ce terroir n’eût été fort altérée par quelqu’accident, ou par quelque cause surnaturelle.

Secondement, si quelques especes de plantes périssoient, il seroit moralement impossible de s’en assurer. On ne peut savoir qu’il y ait des plantes locales, à moins qu’on n’ait visité toute la surface de la terre, ou qu’on n’en soit informé par des personnes très-intelligentes qui connoissent sans exception les plantes de tous les pays ; mais ces deux choses sont absolument impossibles. S’il n’y a point de plantes locales, comme M. Ray en est fortement persuadé, il est presqu’impossible que certaines causes concourent pour faire périr quelque espece de plante que ce soit ; & supposé que cela arrivât, personne ne pourroit le savoir, à cause de la vaste étendue de la terre, dont une très-grande partie est ou deserte ou habitée par des nations barbares qui n’ont aucune connoissance de la Botanique. Bibl. angl. tom. IV. p. 27-40. (D. J.)

Plante capillaire, (Botan.) On appelle plantes capillaires, celles qui n’ont point de tiges principales, & qui portent leurs semences sur le dos de leurs feuilles. Ce nom leur a pû être donné, par ce que leurs racines sont garnies de fibres chevelues ; la fougere, le polypode, la langue de cerf, l’osmonde & autres, sont des plantes capillaires. L’adiante de Montpellier, celui du Canada, l’adiante noir, le blanc, le rouge, le jaune, la sauvevie, le céterac, sont les plantes capillaires des boutiques de Pharmacie. L’Amérique est féconde en plantes capillaires, & tous les Botanistes savent que le P. Plumier en a fait une excellente histoire qu’il a intitulée, hist. des fougeres. Dans le repli de leurs feuilles sont contenues des capsules membraneuses, très-petites, qui s’ouvrent par la contraction d’un anneau élastique ; & on a découvert par le microscope, qu’elles sont pleines d’une fine poussiere, mais on dispute encore si cette poussiere est la semence, ou une poussiere d’étamines semblable à celle qui se trouve dans les sommets des étamines des autres fleurs. (D. J.)

Plantes eschynomeneuses, voyez Æschynomeneuses.

Plantes étoilées sont celles dont les feuilles naissent sur la tige à de certaines distances, en forme d’étoiles avec des rayons : ou ce sont des fleurs qui ressemblent à des étoiles, ou qui sont remplies de boutons semblables à des étoiles sur le bord. Voyez Plantes.

M. Ray range ces sortes de plantes dans la dixieme classe des plantes d’Angleterre : telles sont les plantes appellées cross-wort, mollugo, garance sauvage, asperula ou woodruff, gallium ou ladies bed-straw, aparine ou cleavers, rubia tinctorum, ou garance des teinturiers, auxquelles il ajoute, comme approchantes de ce genre, le nasturtium indicum, le cresson des Indes ou pié d’allouette jaune.

Plantes à plusieurs cosses sont les mêmes qu’on appelle autrement corniculatæ plantæ, & qui après chaque fleur ont diverses cosses pareilles à celles des lé-

gumes, toutes distinguées les unes des autres, menues

& fréquemment courbées, où leur graine est renfermée. Quand ces cosses sont mûres, elles s’ouvrent d’elles-mêmes, & laissent tomber la graine. Voyez Corniculate & Action de semer. Voyez aussi Plante.

Plantes marines, productions de la mer qui sont formées par des insectes, & qui doivent par conséquent faire partie du regne animal. Cependant ces productions ont tant de ressemblance par leur forme avec les végétaux, qu’on les a prises pour des plantes, & qu’on les a placées pendant long-tems dans le regne végétal. Il n’est pas surprenant qu’il y ait dans la nature des especes de choses d’un même genre, ou des genres d’une même classe dont les caracteres distinctifs soient équivoques ; mais on croiroit que l’on ne pourroit pas se tromper dans la division générale des trois regnes de l’Histoire naturelle, au point de prendre des animaux pour des minéraux ou des végétaux. Tous les Naturalistes ont pourtant été pendant long-tems dans cette erreur ; on a cru que le corail, les madrepores, &c. étoient des pierres, des substances qui s’endurcissoient lorsqu’elles étoient hors de l’eau, ou des plantes qui devenoient pierreuses ; & en observant de plus près, on se persuada de plus en plus que c’étoit de vraies plantes. En 1706, M. le comte de Marsigli sembla en donner des preuves convaincantes, lorsqu’il découvrit sur le corail de petits corps organisés & découpés en plusieurs parties, dans lesquels il cru trouver tous les caracteres des fleurs : ces prétendues fleurs avoient environ une ligne & demie de longueur, & étoient soutenues par un calice blanc, duquel partoient huit rayons de la même couleur ; ces rayons étoient de la même longueur & à la même distance l’un de l’autre, formant une espece d’étoile. Il suivit ces recherches, & il vit encore de ces prétendues fleurs sur des productions de même nature que le corail, appellées plantes pierreuses, & sur beaucoup d’autres, dont quelques-unes sont molles, & qui toutes ont été mises au rang des vraies plantes. On ne doutoit plus que le corail, les madrepores, les litophites, &c. ne fussent des plantes, & même des plantes qui portoient des fleurs apparentes, lorsque M. Peissonnel, médecin botaniste du roi à la Guadeloupe, « désirant que l’idée qui résultoit de la découverte ingénieuse du comte de Marsigli, par rapport aux fleurs du corail, se vérifiât, s’embarqua étant à Marseille dans l’année 1723, alla en mer avec les pêcheurs du corail, bien instruit de ce que le comte de Marsigli avoit observé, & de la maniere dont il s’y étoit pris pour faire ses observations. Aussi-tôt que le filet avec lequel les pêcheurs tirent le corail fut près de la surface de l’eau, il y plongea un vase de verre dans lequel il fit entrer quelques branches de corail ; il remarqua quelques heures après qu’il paroissoit un grand nombre de petits points blancs de tous les côtés de cette écorce ; ces points répondoient aux trous qui perçoient l’écorce, & formoient une figure terminée par des rayons jaunes & blancs, dont le centre paroissoit creux, mais ensuite s’étendoit & présentoit plusieurs rayons ressemblans à la fleur de l’olivier : ce sont les fleurs du corail décrites par M. de Marsigli. Ayant tiré le corail hors de l’eau, les fleurs rentrerent dans l’écorce & disparurent ; mais ayant été remis dans l’eau, elles reparurent quelques heures après : elles ne lui sembloient pas aussi larges que le comte de Marsigli le rapporte, leur diametre excédant à peine celui de la tête d’une grosse épingle ; elles étoient molles, & leurs pétales disparoissent lorsqu’on les touche dans l’eau, formant alors des figures irrégulieres. Ayant mis quelques-unes de ces fleurs sur du papier blanc, elles perdirent leur transparence, & devinrent rouges à mesure