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Voyez Fondant, Miroirs ardents, Pierres précieuses, & Vitrescibilité.

Pierre, (Médec.) on n’a rien de plus grave en Médecine que la formation de la pierre dans le corps humain, & les observations particulieres en ce genre, méritent d’être recueillies. Je n’en citerai pour exemple que quelques-unes.

1°. En ouvrant le corps d’un gentil-homme mort en Angleterre en 1750, on lui a trouvé 42 pierres dans les reins, 14 dans la vésicule du fiel, & 10 dans la vessie, qui pesoient 8 onces .

2°. On ne connoît que trop les pierres contenues dans la capacité de la vessie, mais qu’il s’en puisse trouver dans sa substance, dans ses parois, entre les membranes dont elle est formée, & des pierres qui soient dangereuses, c’est un accident assez extraordinaire en Medecine ; cependant M. Litre en dissequant le corps d’un jeune homme, a vû deux pierres, qui ayant percé l’uretere dans sa partie comprise entre les parois de la vessie, avoient passé par ce trou, s’étoient faites chacune un petit conduit dans la substance de la vessie & entre ses membranes, depuis le trou jusqu’à l’endroit ou elles s’étoient arrêtées, & même avoient du grossir en cet endroit, parce qu’elles étoient plus grandes que le trou par où elles avoient passé. Hist. de l’acad. année 1702.

3°. M. Dodart a fait voir à l’acad. des Sciences 12 pierres le diverses formes & grosseurs, toutes tirées d’un cadavre ; la plus grosse étoit du diametre d’un petit œuf, & la plus petite de celui d’une noix.

4°. Un chirurgien de Brest, trouva dans le cadavre d’un homme de 28 ans, un rein qui renfermoit une grosse pierre du poids de six onces & demie ; le corps de la pierre formé à l’ordinaire par couches, remplissoit la capacité du bassin, & par son bout inférieur enfiloit la route de l’uretere. Hist. de l’acad. année 1730.

5°. Un enfant de trois ans ne pouvant uriner par un étrange phimosis, le même M. Litre fit faire une incision au prépuce par le côté, & ensuite en fit retrancher la partie qui excédoit l’extrémité du gland. D’une grande cavité que ce prépuce formoit, il en sortit un peu d’urine & un nombre incroyable de pierres, les plus petites, grosses comme des têtes d’épingles, & les plus grosses étoient comme des pois, unies, grisâtres & friables. Il n’y a presque pas de doute, qu’elles ne se fussent formées des parties les plus grossieres de l’urine qui étoit retenue, tandis que la petite ouverture du prépuce, ne permettoit qu’aux plus subtiles de sortir, & ce qui le confirme encore, c’est qu’après l’opération, l’enfant ne rendit plus de pierres. Hist. de l’acad. année 1706.

6°. Passons en Italie, Dominica B. fille de basse condition, âgée d’environ 20 ans, couchoit avec une autre fille, qui auroit voulu faire avec elle les fonctions dont elle étoit incapable. Elle se servoit donc d’une grosse aiguille d’os à tête, de la longueur d’un doigt, qui dans une action particuliere entre les deux compagnes, entra par l’uretere de Dominica, & tomba dans la vessie. Dominica commença à n’uriner que goutte à goutte, & avec douleur. La honte de déclarer son avanture, lui fit cacher son mal pendant cinq mois ; mais enfin maigrissant & ayant de la fievre, elle eut recours à un chirurgien, qui ayant introduit le doigt dans le vagin, & ayant senti une dureté, découvrit avec un instrument un bout de l’aiguille, emporta les matieres pierreuses qui étoient à l’endroit, & crut avoir fait une belle opération ; mais la malade continuant d’être dans le même état, & n’ayant eu par cette manœuvre aucun soulagement, un autre chirurgien fut appellé.

Celui-ci introduisit la sonde dans la vessie qui étoit déchirée & ulcérée du côté du vagin, & il

sentit un corps dur ; pour soulager les vives douleurs, il fit prendre à la malade beaucoup d’huile d’olive, & s’en tint là ; quelques jours après, la pierre qui s’étoit formée autour de l’aiguille, parut à l’orifice du vagin, par le trou fait à la vessie, & on la tira avec la main sans l’aide d’aucun instrument. La jeune fille se rétablit, mais il lui en est resté une incontinence d’urine, & de tems en tems de légeres inflammations dans ces parties. Hist. de l’acad. année 1735. Je laisse aux gens de l’art à recueillir un grand nombre d’autres observations semblables qui ne sont pas quelquefois sans utilité. (D. J.)

Pierre, (Critiq. sacrée.) πέτρος, πέτρα, un rocher. La pierre de division ; c’est le rocher du désert de Maton ; la pierre d’Ethan, est le rocher où Samson se retiroit, lorsqu’il faisoit la guerre aux Philistins. La pierre d’Ezel est an rocher auprès duquel David devoit attendre la réponse de son ami Jonathas. La pierre du secours indique le lieu où les Philistins prirent l’arche du Seigneur.

La pierre sur laquelle Notre-Seigneur dit qu’il édifiera son Eglise, Matth. xvj. 28. est expliquée par S. Augustin, de la doctrine du Sauveur lui-même, πέτρα, dans S. Luc, viij. 6. se prend pour un lieu pierreux ; ce mot désigne un fort, une forteresse dans le IV. liv. des Rois, xiv. 17. La pierre du désert, c’est la ville de Pétra.

Pierre au figuré, se prend pour asyle, II. Reg. xxij. 2. Il se trouve au propre pour les poids d’une balance. Il veut dire encore un monument, au Deut. xxvij. 4. parce que dans les premiers tems, ceux qui avoient fait ensemble quelque traité, élevoient des monceaux de pierres pour en conserver la mémoire, au défaut de l’Ecriture.

La pierre de Zohaleth, III. Reg. j. 9. étoit une de ces pierres rondes, fort pesantes, que les jeunes gens pour éprouver leurs forces tâchoient de lever. Pierre signifie l’idolatrie. Juda, saur d’Israël, s’est corrompue avec la pierre & le bois, Jérém. iij. 5. il se met pour la grêle dans Josué : le Seigneur fit tomber du ciel de grosses pierres, c’est-à-dire de la grêle d’une grosseur & d’une dureté prodigieuse. Le psalmiste, ps. lxxx. 17. dit, que Moise a rassasié les Hébreux du miel qui sortoit de la pierre, c’est-à-dire du miel que les abeilles avoient fait dans les trous des rochers. (D. J.)

Pierres fines, graveur en, (Gravure.) artiste qui grave en creux ou en relief sur les pierres fines, & même jusque sur les diamans. MM. Vasari, Vettori & Mariette, ont donné l’éloge ou la vie des maîtres qui s’y sont le plus distingués. Voyez aussi le mot Pierre gravée.

Pierre gravée, s’il est vrai que les inventions qui ont le besoin pour principes, ont dû précéder celles qui n’ont pour objet que le plaisir, & qu’elles sont de toute antiquité ; l’on peut faire remonter assez haut l’origine de la gravure. Bientôt l’industrie jointe au besoin, imagina l’art de s’exprimer, prit le ciseau, traça des figures, des traits qui devinrent autant d’expressions & d’images de la parole ; telle fut l’origine de cet art.

On doit présumer que les Egyptiens qui gravoient avec tant de facilité sur des matieres aussi dures que sont le granite, le basalte, & tous les autres marbres des carrieres de l’Egypte, n’ignorerent pas long-tems l’art de graver en creux sur les métaux, & singulierement en petit sur les pierres fines & sur les pierres précieuses. Moïse, Exord. xxv. 30. & ch. xxxix. v. 6. 14. parle avec éloge de Beséléel, de la tribu de Juda, qui grava les noms des douze tribus sur les différentes pierres précieuses dont étoient enrichies l’éphod, & le rational du grand prêtre.

On ne peut contester que l’art de la gravure sur les pierres fines qui avoit pris naissance dans l’Orient,