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neaux n’auroit pas faites ; mais un alchimiste n’en seroit pas plus avancé ; car au feu du soleil, ou le mercure, ou le souffre des métaux qui seroient les principes les plus actifs & les plus précieux, s’envolent, & le reste demeure vitrifié, & inhabile à toute opération.

Quand même on auroit un soufre d’or bien séparé, & qu’on l’appliquât à de l’argent, par exemple ; il ne feroit que changer en or une masse d’argent, égale à celle d’or, d’où il auroit été tiré. Je suppose qu’il lui auroit donné le poids, & toutes les autres qualités originaires ; mais malgré tout cela, il valoit autant laisser ce souffre où il étoit nécessairement ; on n’a rien gagné, si ce n’est une expérience très curieuse, & certainement on a fait des frais.

J’avoue que les Alchimistes entendent que ce soufre agiroit à la maniere, ou d’une semence qui végete, & devient une plante, ou d’un feu qui se multiplie, dès qu’il est dans une matiere combustible ; & c’est à cela que reviennent les contes de la poudre de projection, dont quelques atomes ont produit de grosses masses d’or ; mais quelle physique pourroit s’accommoder de ces sortes d’idées ?

J’avoue aussi que si de quelque matiere qui ne fût point or, comme de la rosée, de la manne, du miel, &c. on pouvoit, ainsi qu’ils le disent, tirer quelque portion de l’esprit universel, propre à changer de l’argent ou du cuivre en or, il pourroit y avoir du profit ; mais quelles propositions, quelle espérance !

Une chose qui donne encore beaucoup de crédit à la pierre philosophale, c’est qu’elle est un remede universel ; ceux qui la cherchent, comment le savent-ils ? Ceux qui la possedent, que ne guérissent-ils tout ? Et s’ils veulent, sans découvrir leur secret, ils auront plus d’or que tous leurs fourneaux n’en pourroient faire. Quand on recherchera ce qui a fait donner à l’or des vertus physiques si merveilleuses, on verra bientôt que leur origine vient de ses vertus arbitraires & conventionnelles, dont les hommes sont si touchés. (D. J.)

Pierres poreuses, (Hist. nat.) porus, undulago, incrustatum, tophus, stalactites, &c. nom générique donné par les naturalistes à toutes les pierres formées par le dépôt des eaux. De ce genre sont le tuf, les incrustations, les stalactites, &c. Voyez ces différens articles. Les pores varient par la nature & par la forme, en raison des différentes terres que les eaux ont déposées ; mais le plus communément ces pierres sont calcaires, parce que la terre calcaire a plus de facilité que toute autre à s’incorporer avec les eaux & à être mises en dissolution. Voyez Calcaire.

Pierre-ponce, (Hist. nat.) pumices ; ce sont des pierres très-poreuses, & semblables à des éponges ; elles paroissent composées de filamens ; elles sont rudes au toucher, d’une figure irréguliere & informe : leur légéreté est si grande, qu’elles nagent à la surface des eaux.

Les pierres-ponces varient pour la couleur, & l’on en compte de blanches ou grises, de jaunâtres, de brunes & de noirâtres. Ces pierres se trouvent dans le voisinage des volcans ou montagnes qui jettent du feu, comme l’Ætna & le Vésuve ; ou dans des endroits où il y a eu autrefois des embrasemens souterreins ; ou enfin dans des endroits ou les pierres-ponces ont été poussées par les vents, lorsqu’elles nageoient à la surface des eaux de la mer.

MM. Stahl & Pott ont regardé la pierre-ponce, comme de l’asbeste que l’action du feu a mis dans l’état où nous le voyons ; mais M. Wallerius croit que sa formation est due a une espece de charbon de terre consommé, & devenu spongieux par l’action du feu. Quoi qu’il en soit de ces différentes opinions, M.

Henckel a observé que la pierre-ponce entroit en fusion à un feu violent, & formoit une scorie ou un verre assez dur pour faire feu, lorsqu’on le frappe avec l’acier ; ce fait a été confirmé par l’expérience de M. Pott. C’est pour cette raison que quelques auteurs ont mis la pierre ponce au rang des pierres que l’on nomme vitrifiables.

On trouve la pierre-ponce, comme nous l’avons fait observer, dans le voisinage des volcans, & l’on en rencontre dans toutes les parties du monde en Europe, près du mont Hecla en Islande, en Sicile, & au royaume de Naples ; en Asie, dans l’île d’Ormus où il y a eu anciennement un volcan, dans l’île de Ternate, &c. Les voyageurs nous apprenent avoir quelquefois vu la mer toute couverte de pierres-ponces dans des endroits souvent fort éloignés des volcans qui les ont produits ; ce sont les vents qui les poussent alors au loin ; en se heurtant les unes les autres, & étant roulées par les eaux contre le rivage, elles s’arrondissent & s’usent, comme on le remarque sensiblement à de certaines pierres-ponces.

Les anciens ont cru que la pierre-ponce étoit formée de l’écume de la mer ; & ils l’appelloient pumax du mot spuma.

Cette pierre est d’un grand usage dans les arts & métiers ; elle sert à polir les pierres & les métaux. On l’a vantée autrefois dans la Médecine ; mais aujourd’hui l’on sait que l’usage en est très-inutile. (—)

Pierres, (Mat. méd.) on a attribué des vertus médicinales à un grand nombre de pierres, qui ne different point à cet égard des terres, & auxquelles convient par conséquent ce que nous avons dit des remedes terreux. Voyez Terreux, (Mat. méd.)

Les pierres méritent cependant cette considération particuliere, que celles qui ont une vertu médicamenteuse réelle ; savoir, les calcaires & les argilleuses sont très-inférieures dans l’usage, aux terres proprement dites, en ce qu’elles sont d’un tissu plus compacte, plus serré que ces dernieres substances. D’où l’on peut prononcer définitivement que les pierres simples ou homogenes des autres especes primitives sont destituées de toute vertu medicamenteuse ; que celles qui ont quelques vertus ne la possedent que dans un degré plus foible que des substances analogues, tout aussi communes qu’elles ; & par conséquent, que les pierres doivent être bannies de la liste des remedes.

Ces pierres qui sont ainsi inutiles, & que les pharmacologistes ont mis au rang des medicamens, sont outre les pierres précieuses, & principalement celles qu’on trouve dans les pharmacies, sous le nom de fragmens précieux, sont, dis-je, le crystal, le caillou, le bol, le talc, la pierre néphrétique ou le jade, la pierre-ponce, l’ochre, l’ardoise, la pierre d’aigle, la pierre d’aimant, &c. toutes substances absolument dépourvues de vertus médicinales ; & la belemnite, la pierre judaïque, la pierre d’éponge, l’ostéocol, le glossopetre ou langue de serpent, &c. toutes matieres qui, quoique possédant en effet la vertu absorbante, étant composées en tout ou en partie de terre calcaire, doivent être pourtant rejettées, par les considérations que nous venons d’exposer ci-dessus.

Mais outre ces pierres inutiles, on trouve encore dans les listes des remedes, deux pierres dangereuses ; savoir, la pierre d’azur, & la pierre d’Arménie, l’une & l’autre recommandées par les anciens, comme purgatives. Voyez Pierre d’Arménie, & Pierre d’azur.

La pierre hématite qui n’est presque qu’une substance ferrugineuse, doit être renvoyée à la classe des remedes martiaux. Voyez Mars & Martiaux, (Mat. méd.)

Au reste, la principale célébrité de la plûpart de ces pierres leur est venue de l’opinion qu’on a eu de