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au ton, soit par rapport à la mesure, qu’ils fassent un tout bien lié, lequel aille se résoudre sur une des cordes essentielles du mode.

Dans l’harmonie, la phrase est une suite réguliere d’accords, tous liés entr’eux par des dissonnances exprimées ou sous-entendues. Cette suite se résout sur une cadence, & selon l’espece de cette cadence, selon que le sens est plus ou moins achevé, le repos est aussi plus ou moins parfait.

C’est dans l’invention des phrases musicales, surtout dans leur liaison entr’elles & dans leur ordonnance selon de belles proportions, que consiste la véritable beauté de la musique. Mais cette derniere partie a été presque entierement abandonnée par nos compositeurs modernes, sur-tout dans les opéra françois de ce tems, où l’on n’apperçoit plus que des rapsodies de petits morceaux durs, étranglés, mal cousus, & qui ne semblent faits que pour jurer ensemble. (S)

PHRATRIARQUE, s. m. (Antiq. greq.) φρατρίαρχος, magistrat d’Athènes qui présidoit sur les φρατρία, c’est-à dire sur la troisieme partie d’une tribu ; il avoit le même pouvoir sur cette partie de la tribu, que le phylargue avoit sur la tribu entiere. Potter, Archæol. græc. t. I. p. 78.

PHRATRIUS, mois, (Mois des Grecs.) φράτριος, mois particulier à la ville de Cumes en Eolie ; il étoit composé de 30 jours, on ne trouve le nom de ce mois que sur un seul marbre tiré des ruines de la ville de Cumes, & dont l’inscription est en dialecte éolien ; vous la pourrez lire toute entiere dans les antiquités de M. de Caylus, tome II. C’est assez de remarquer ici que le mot φράτριος vient du nom de φρατρίαι, qui signifie des sociétés ou confrairies établies en différentes villes de la Grece, & qui s’assembloient en des tems réglés pour la célébration des fêtes ou de certaines cérémonies ; le lieu de l’assemblée s’appelloit φράτριον ; peut-être que le mois où ces assemblées se tenoient à Cumes en reçut son nom. (D. J.)

PHRÉATIS, le, (Antiq. grec.) le phréatis ou phréatium qui faisoit un des quatre anciens tribunaux d’Athenes ; il étoit établi pour juger ceux qu’on poursuivoit à l’occasion d’un second meurtre, sans s’être réconciliés avec les parens du citoyen qu’ils avoient tué involontairement. L’exilé accusé paroissoit sur la mer à un endroit appellé le puits, d’où ce tribunal reçut son nom ; là il se défendoit sur son bord sans jetter l’ancre, ni aborder à terre ; s’il étoit convaincu, on lui infligeoit les peines imposées au meurtrier volontaire ; s’il étoit innocent, il retournoit à son exil, à cause de son premier meurtre. Teucer fut le premier qui se justifia de cette maniere, & qui prouva qu’il n’étoit point coupable de la mort d’Ajax. (D. J.)

PHRÉNÉSIE, s. m. (Médecine.) délire continuel ou dépravation des fonctions du cerveau, causée par une inflammation dans les vaisseaux de ce viscere, accompagnée d’une fievre synoche ou putride. La paraphrénésie se dit d’une maladie qui en approche, & qui est causée par l’inflammation du diaphragme.

La cause a toujours été regardée comme propre au cerveau & à ses membranes. Ces parties sont alors affectées d’une inflammation produite par un sang échauffé, desseché & bouillant, comme l’ont reconnu Hippocrate, les plus grands Médecins ensuite, & avec eux les plus simples d’entre le peuple ; ils ont pensé qu’elle venoit d’un sang épais qui se portoit à la tête, & que l’urine tenue & aqueuse dans un fébricitant, annonçoit une phrénisie prochaine. Ainsi il semble que la phrénésie a pour cause une métastase qui se fait de quelque humeur d’une partie sur une autre, ou un transport de la matiere fébrile dans le cerveau.

Les dissections apprennent que la phrénésie n’est

pas causée par l’inflammation des meninges, non plus que la paraphrénésie par celle du diaphragme, mais par l’engorgement variqueux des vaisseaux du cerveau & des meninges ; elle est quelquefois avec une inflammation dans les formes, & d’autres fois sans inflammation.

Ainsi toutes les causes qui disposent à l’engorgement de ces parties, sont celles de la phrénésie. Ainsi le chagrin, la forte & continuelle application de l’esprit à un même sujet, la douleur, les passions vives, telles que la colere, la fureur, l’amour, les excès de la fureur utérine, sont autant de causes de la phrénésie.

Quelle que soit sa cause, elle se connoît par les signes suivans, selon Lommius ; savoir, une fievre aiguë & continue, accompagnée d’un délire continuel, concernant tantôt les unes, tantôt les autres des actions vitales, le malade est disposé à entreprendre tout ce qu’une audace effrenée peut lui inspirer ; il est travaillé tour-à-tour par des insomnies cruelles, ou par des sommeils fâcheux & turbulens ; ensorte qu’étant éveillé, il sort inopinément de son lit, il fait de grands cris, il agit en furieux, tantôt il pleure, tantôt il chante, ou fait des discours sans ordre & sans suite ; quand il est interrogé, il fait des réponses qui n’ont aucun rapport aux demandes qu’on lui fait ; ses yeux sont toujours en mouvement, étincellans, rouges & malpropres ; le malade les frotte sans cesse, & ils sont tantôt secs, & tantôt larmoyans ; sa langue est rude & noire, il grince les dents, & il lui sort souvent des narines une sérosité sanglante ; il ressent assez souvent de la douleur au derriere de la tête, il démêle entre ses doigts des floccons de laine qu’il tire de ses couvertures ; son urine est tenue & enflammée, & ce qui est de plus fâcheux, c’est qu’elle est quelquefois limpide, tenue, & souvent blanchâtre. La phrénésie se termine en peu de tems, conjointement avec la fievre par le retour de la santé, ou par la mort du malade ; ou si elle dure long-tems, ou qu’elle subsiste après la fievre, alors ou elle guérit, ou elle dégénere en d’autres maux, comme sont la léthargie, la manie, la méancholie, où les malades tombent dans une folie perpétuelle, leur cerveau étant, comme l’on dit, tout détraqué ; la phrénésie qui succede à la péripneumonie, ou au misereré, est mortelle, les hémorrhagies la guérissent quelquefois.

Curation. Si la fievre accompagne la phrénésie dans le commencement, on a recours à la saignée, aux lavemens, aux purgatifs & aux émétiques, aux bains & demi-bains, aux douches sur la tête ; on applique aux piés des cataplasmes avec les feuilles de oue, de camomille, de verveine, la racine de brionne, les fleurs de pavot champêtre & le savon ; ou bien en leur place on peut appliquer aux mêmes parties des pigeons ou des poulets coupés selon leur longueur.

Pour appaiser la soif, que les malades boivent d’une tisane délayante & calmante, & de la potion divine de Palmarius, qui est proprement une limonnade faite avec l’eau de fontaine, le sucre de limon, & le sucre ; ou bien qu’il prenne des émulsions ordinaires adoucies avec le sucre, ou bien les délayans nitreux & antiphlogistiques.

On peut appliquer sur la tête ou sur les tempes, le marc ou chapeau de roses, ou bien un bandeau chargé de fleurs de pavot, arrosé de vinaigre, & soupoudré de muscade.

Les lotions & le rasement de la tête, les vésicatoires & les ventouses appliquées aux parties inférieures.

Les saignées du pié & de la gorge, faites consécutivement, sont excellentes dans cette maladie, & dans la plûpart des maladies de la tête.

Les emplatres de poix, d’ail, de graine de mou-