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reçue par les sénateurs, & par la plûpart des grands qui haïssoient Metellus.

Cet affranchissement subsista néanmoins dans l’Italie jusqu’à la destruction de la république & de la liberté ; car au rapport de Suétone, Jules-César renouvella tous ces subsides, qu’Auguste ne manqua pas de confirmer. Il est vrai que si nous en croyons Tacite, Néron eut quelque envie d’éteindre le tribut appellé portorium, mais cette envie ne dura guere, il l’étouffa presque dans sa naissance.

Au reste, on comprend aisément que portorium étoit originairement un tribut imposé sur tout ce qui entroit dans les ports de la république ; a portu, portorium dictum. (D. J.)

Péage, s. m. (Jurisprud.) est un droit qui se paye au roi, ou à quelqu’autre personne, par permission du roi, pour le passage des personnes, bestiaux, marchandises, sur un pont, chemin, ou riviere, ou à l’entrée de quelque ville, bourg, ou autre lieu.

Les péages reçoivent différens noms, selon l’objet particulier pour lequel ils se perçoivent, comme barrage, pontonage, passage, travers : on appelle aussi le péage billete ou branchiete, à cause du billot ou branche d’arbre où l’on attache la pancarte.

Le roi peut seul établir des péages, & les seigneurs hauts-justiciers n’ont pas ce droit ; & si quelques-uns ont des péages dont on ne rapporte pas le titre primitif, c’est que la longue possession fait présumer qu’il y en a eu originairement une concession du roi, & tous ceux qui ne sont pas établis de l’autorité du roi, doivent être abolis.

L’ordonnance des eaux & forêts, tit. des péages, a supprimé tous les droits de cette espece qui ont été établis depuis cent ans sans titre ; & à l’égard de ceux qui étoient établis avant les cent ans, par titres légitimes, & dont la possession n’aura pas été interrompue, elle a ordonné que les seigneurs propriétaires justifieroient de leur droit & possession.

L’article 5. de ce même titre rejette les droits de péage, même avec titre & possession, si les seigneurs qui les levent ne sont obligés à aucune dépense pour l’entretien des chemins, bacs, ponts, & chaussées.

Celui qui a droit de péage dans un lieu, ne peut, sans permission du roi, transférer le bureau de son péage en un autre endroit, ni établir de nouveaux bureaux sans permission.

Les seigneurs qui ont droit de péage sont obligés d’avoir une pancarte contenant le tarif du droit, & de la faire mettre en un lieu apparent, afin que le fermier ne puisse exiger plus grand droit qu’il n’est dit, & que les passans ne puissent prétendre cause d’ignorance du péage.

Il y a un bureau du conseil établi pour l’examen & la représentation des titres des propriétaires des droits de péages, passages, pontonages, travers, & autres qui se perçoivent sur les ponts, chaussées, chemins, rivieres navigables, & ruisseaux y affluans, dans toute l’étendue du royaume.

Les droits de péage ont été établis, dans l’origine, pour l’entretien des ponts, ports, passages, & chemins, & même pour y procurer aux marchand, & voyageurs la sureté de leurs personnes & effets : c’est pourquoi anciennement, lorsque quelqu’un étoit volé sur un chemin où le seigneur haut justicier avoit droit de péage, ce seigneur étoit tenu de rembourser la perte ; cela fut ainsi jugé par arrêt donné à la Chandeleur 1254 contre le sieur de Crevecœur ; & en 1269 contre le seigneur de Vicilon ; en 1273 contre le comte de Bretagne ; & en 1285 contre celui d’Artois.

On voit aussi, par un arrêt de la Toussaint 1295, que le roi faisoit rembourser de même le détroussement fait en sa justice.

Mais quand le meurtre ou vol arrivoit avant soleil

levé, au après soleil couché, le roi ou autre seigneur n’en étoit pas responsable.

Cette garantie n’a plus lieu depuis que les seigneurs n’ont plus la liberté de mettre sous les armes leurs vassaux & sujets, & que le roi a établi des maréchaussées pour la sureté des chemins.

Quelques coutumes prononcent une amende au profit du seigneur contre ceux qui ont fraude le péage ; cela dépend des titres & de la possession.

Les péages sont droits domaniaux & non d’aides & de subsides. Voyez les coûtumes d’Anjou, Maine, Lodunois, Touraine, Bourbonnois, la Marche ; le Gloss. de Lauriere au mot péage ; des Pommiers sur l’article 154. de la coûtume de Bourbonnois. (A)

PEAGER, s. m. (Jurisprud.) est celui qui fait la recette du droit de péage. Voyez ci devant Péage. (A)

PEAKS, (Hist. mod. Commerce.) les sauvages de la Virginie se servent au lieu de monnoie, de différentes parties de coquilles polies, & formées en petits cylindres percés, d’une couleur brune ou blanche, de la longueur de quatre ou cinq lignes, & enfiles. Il y a de ces cylindres qu’ils nomment runtis ; les roenokes sont des fragmens de petoncles. Les Anglois reçoivent le peak brun, qui est le plus cher, sur le pié de 18 sols ou pennys, la verge ou l’aune.

PEAN ou PÆAN, s. m. (Belles Lettres.) c’étoit originairement un cantique en l’honneur d’Apollon & de Diane, qui renouvelloit le souvenir de la victoire remportée sur le serpent Python par ce dieu, dont παιαν étoit aussi l’un des surnoms, emprunté de la force de ses rayons ou de ses traits, exprimée par le verbe παιειν frapper. Ces cantiques étoient caracterisés par cette exclamation ἰὴ παιαν qui en étoit comme le refrain, & qui signifie proprement décoche tes fleches, Apollon. On les chantoit pour se rendre ce dieu favorable dans les maladies contagieuses, que l’on regardoit comme des effets de sa colere.

Cette notion des péans est relative à toutes les étymologies qu’on donne de ce nom, Festus le faisant venir de παιειν, frapper. Hesychius de παιω, θεραπευω je guéris ; & d’autres de cette exclamation ἰὴ παι, ἰὴ παι, courage, mon fils, que Latone répétoit à Apollon pendant qu’il combattoit le serpent Python.

Dans la suite on fit de ces peans ou cantiques pour le dieu Mars, & on les chantoit au son de la flûte en marchant au combat. Il y en a divers exemples dans Thucidide & dans Xenophon, sur quoi le scholiaste du premier observe, qu’au commencement d’une action l’on invoquoit dans ces peans le dieu Mars ; au lieu qu’après la victoire, Apollon devenoit le seul objet du cantique. Mais enfin, ces cantiques ne furent plus renfermés dans l’invocation de ces deux divinités ; ils s’étendirent à celle de quantité d’autres & dans Xenophon, hist. græc. lib. IV. Les Lacédémoniens entonnent un pean à l’honneur de Neptune.

On en fit même pour illustrer les grands hommes ; Athenée parle de ceux où l’on célébroit les louanges de Lysandre le Lacédémonien, & qu’on chantoit à Samos, & celles de Cratere le Macédonien qu’on chantoit à Delphes. Aristote honora d’un pareil cantique l’eunuque Hermias son ami ; & il fut, dit-on, mis en justice pour avoir prodigué à un mortel un honneur qui n’étoit dû qu’aux dieux. Ce pean nous reste encore aujourd’hui, & Jules-César Scaliger ne le trouve point inférieur aux odes de Pindare ; mais Athenée qui nous a conservé ce cantique d’Aristote, ne tombe point d’accord que ce soit un véritable pean, parce que l’exclamation ἰὴ παιαν qui devroit le caracteriser ne s’y rencontre en aucun endroit ; au lieu qu’elle ne manque point dans les peans composés en l’honneur de Ptolomée, fils de Lagus, roi d’Egypte, d’Antigone, & de Démetrius Poliorcete. Nous sommes redevables au même Athenée de la