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mais une seule Personne sous trois noms, & qui étoit autant le Pere que le Fils, & le Fils que le Pere. Tertulien a écrit expressément contre Praxéas.

Hermogene ayant adopté l’erreur des patripassiens, on donna à ceux-ci le nom d’Hermogéniens, puis de Noétiens, de Noétus autre hérésiarque ; ensuite celui de Sabelliens, de Sabellius le Libyen son disciple ; & parce que ce dernier étoit de Pintapole dans la Libye, & que son hérésie y fut fort répandue, on l’appella l’herésie, ou la doctrine pintapolitaine.

PATRIQUES, s. m. pl. (Hist. anc.) sacrifice que faisoient autrefois les Perses à l’honneur du dieu Mythra. Les patriques étoient la même chose que les mythriaques. V. Mytriaques. Ces fêtes s’appellerent patriques, du sacrificateur auquel on donnoit le nom de pater.

PATROCLE, Géog. anc.) île de Grece sur la côte de l’Attique. Pausanias, liv. I. ch. j. qui la met près de Laurium, dit qu’elle étoit petite & déserte : il ajoute qu’on la nommoit Patrocli insula, parce que Patrocle général des galeres d’Egypte, la surprit, & la fortifia lorsqu’il fut envoyé au secours des Athéniens par Ptolomée fils de Lagus. Etienne le géographe connoît aussi cette île. On la nomme aujourd’hui Guidronisa, c’est-à-dire l’île aux ânes. Elle est à une lieue & demie du cap Colonne, (l’ancien promontoire de Sunium.) Wheler dit qu’il croît dans cette île beaucoup d’ébène, & c’est pourquoi on l’appelle aussi Ebanonsii. (D. J.)

PATRON, s. m. (Jurisp.) cette qualité se donne en général à celui qui en prend un autre sous sa défense.

C’est en ce sens que les orateurs & avocats ont été appellés patroni, de même que les seigneurs dominans à l’égard de leurs vassaux.

Quand la qualité de patron est relative à celle d’affranchi, on entend par-là celui qui a donné la liberté à quelqu’un qui étoit son esclave, lequel par ce moyen devient son affranchi.

Quoique l’affranchi soit libre, celui qui étoit auparavant son maître conserve encore sur sa personne quelques droits, qui est ce que l’on appelle patronage. Ce droit est accordé au patron en considération du bienfait de la liberté qu’il a donnée à son esclave.

Ce droit s’acquiert en autant de manieres que l’on peut donner la liberté à un esclave.

Le patron doit servir de tuteur & de défenseur à son affranchi, & en quelque façon de pere ; & c’est delà qu’on a formé le terme de patron.

L’affranchi doit à son patron soumission, honneur & respect.

Il y avoit une loi qui autorisoit le patron à reprendre l’affranchi de son autorité privée, lorsque celui-ci ne lui rendoit pas ses devoirs assez assidument ; car il devoit venir au moins tous les mois à la maison du patron lui offrir ses services, & se présenter comme prêt à faire tout ce qu’il lui ordonneroit, pourvu que ce fût une chose honnête & qui ne fût pas impossible ; il ne pouvoit aussi se marier que suivant les intentions de son patron.

Il n’étoit pas permis à l’affranchi d’intenter un procès au patron, qu’il n’en eût obtenu la permission du préteur, il ne pouvoit pas non plus le traduire en jugement par aucune action fameuse.

Le droit du patron sur ses affranchis étoit tel qu’il avoit le pouvoir de les châtier, & de remettre dans l’état de servitude ceux qui étoient réfracteurs ou ingrats envers lui ; & pour être réputé ingrat envers son patron, il suffisoit d’avoir manqué à lui rendre ses devoirs, ou d’avoir refusé de prendre la tutelle de ses enfans.

Les affranchis étoient obligés de rendre à leur patron trois sortes de services, opera ; les unes appellées officiales vel obsequiales ; les autres fabriles : les pre-

mieres étoient dûes naturellement en reconnoissance

de la liberté reçue ; il falloit pourtant qu’elles fussent proportionnées à l’âge, à la dignité & aux forces de l’affranchi, & au besoin que le patron pourroit en avoir : les autres appellées fabriles, dépendoient de la loi, ou convention faite lors de l’affranchissement ; elles ne devoient pourtant pas être excessives au point d’anéantir en quelque sorte la liberté.

Les devoirs, obsequia, ne pouvoient pas être cédés par le patron à une autre personne, à la différence des œuvres serviles qui étoient cessibles.

Le patron devoit nourrir & habiller l’affranchi pendant qu’il s’acquitoit des œuvres serviles, au lieu qu’il n’étoit tenu à rien envers lui pour raison des simples devoirs, obsequia.

Il ne dépendoit pas toujours du patron de charger d’œuvres serviles celui qu’il affranchissoit, notamment quand il étoit chargé d’affranchir l’esclave, ou qu’il recevoit le prix de sa liberté, ou lorsque le patron avoit acheté l’esclave des propres deniers de celui-ci.

Le patron qui souffroit que son affranchie se mariât, perdoit dès ce moment les services dont elle étoit tenue envers lui, parce qu’étant mariée elle les devoit à son mari, sans préjudice néanmoins des autres droits du patronage.

Celui qui celoit un affranchi étoit tenu de faire le service en sa place.

C’étoit aussi un devoir de l’affranchi de nourrir le patron lorsqu’il tomboit dans l’indigence, & réciproquement le patron étoit tenu de nourrir l’affranchi lorsqu’il se trouvoit dans le même cas, autrement il perdoit le droit de patronage.

Le patron avoit droit de succéder à son affranchi lorsque celui-ci laissoit plus de cent écus d’or ; il avoit même l’action calvisienne pour faire révoquer les ventes qui auroient été faites en fraude de son droit de succéder.

Le droit de patronage s’éteignoit lorsque le patron avoit refusé des alimens à son affranchi, ou lorsqu’il avoit remis l’affranchi dans la servitude pour cause d’ingratitude, ou enfin lorsque le prince accordoit à l’affranchi le privilege de l’ingénuité, ce qui ne se faisoit que du consentement du patron : cette concession d’ingénuité s’appelloit restitutio natalium ; quelquefois on accordoit seulement à l’affranchi le droit de porter un anneau d’or, jus aureorum annulorum, ce qui n’empêchoit pas le patronage de subsister.

Mais dans la suite cela tomba en non-usage ; tous les affranchis furent appellés ingenui, sauf le droit de patronage.

Le patronage se perdoit encore lorsque le fils ne vengeoit pas la mort de son pere, l’esclave qui découvroit les meurtriers avoit pour récompense la liberté.

La loi alia sentia privoit aussi du patronage celui qui exigeoit par serment de son affranchi qu’il ne se mariât point.

Enfin le patronage se perdoit lorsque le patron convertissoit en argent les services qu’on lui devoit rendre, ne pouvant recevoir le prix des services à venir, sinon en cas de nécessité & à titre d’alimens. Voyez au ff. & au code les titres de jure patronatus, & au ff. le tit. de operis libertorum, &c.

En France où il n’y a plus d’esclave, il n’y a plus de patronage.

Dans les îles de l’Amérique où il y a des esclaves, les maîtres peuvent les affranchir ; & l’édit du mois de Mars 1685, appellé communément le code noir, ordonne à ces affranchis de porter un singulier respect à leurs anciens maîtres, à leurs veuves & à leurs enfans ; en sorte que l’injure qu’ils auront faite soit punie plus griévement que si elle étoit faite à une autre personne : du reste, l’édit les déclare francs & quittes envers eux de toutes autres charges, services