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siere sont des lames qui ont différentes figures, non seulement sur des aîles de papillons de différentes especes, mais aussi sur divers endroits d’une même aîle. On a donné fort improprement à ces lames le nom de plumes, sans doute parce qu’elles sont placées sur des aîles : le nom d’écaille leur convient mieux. Elles sont plus ou moins alongées ; elles tiennent à l’aîle par un pédicule : l’autre bout est arrondi, ou échancré, ou dentelé plus ou moins profondément ; cependant il y a de ces molécules de poussiere qui ressemblent mieux à des poils qu’à des écailles, car ils ont une tige longue, déliée & divisée par le bout en 2 ou 3 filets. Toutes les lames des aîles des papillons sont régulierement alignées, & se recouvrent en partie les unes les autres, comme les écailles de poissons. Si on enleve les écailles de l’aîle d’un papillon, elle devient transparente, & elle perd ses couleurs ; on y voit des nervures, & il paroît que sa substance a quelque rapport avec les taies des crustacées.

Le corps des papillons a la forme d’une olive, plus ou moins allongée ; il est composé d’anneaux qui sont souvent cachés sous les grands poils & sous les plumes qu’ils portent ; mais outre ces poils ou ces plumes, ils sont couverts d’écailles semblables à celles des aîles : le corcelet est placé au-devant du corps ; les aîles & les jambes y tiennent. Tous les papillons ont chacun 6 jambes, mais il y en a qui ne se servent que des 4 dernieres pour marcher ou pour se soutenir : les 2 premieres, une de chaque côté, au lieu d’avoir un pié terminé par des crochets comme les 4 autres, l’ont que des poils au bout du pié ; elles sont souvent appliquées contre le corps du papillon, & cachées entre de longs poils.

Les yeux des papillons sont placés de chaque côté de la tête, où ils forment une portion de sphere saillante, qui n’est que la moitié d’une sphere, ou un peu plus ou un peu moins de la moitié ; ils sont plus ou moins gros à proportion de la tête. L’enveloppe extérieure de ces yeux est une sorte de cornée luisante ; on y voit souvent des couleurs variées comme celles de l’arc-en-ciel, sur un fond noir, brun, gris, &c. On reconnoit à l’œil simple que la cornée est pointillée ; mais par le moyen du microscope, toute la surface de la cornée paroit un réseau à mailles régulierement symétrisé, & le milieu de chaque maille au lieu d’être vuide comme dans un vrai réseau, est relevé en bosse comme une petite lentille : chaque lentille est encadrée dans une maille de matiere pareille à la sienne, & de figure rectiligne à 4 côtés dans quelques yeux, & à 6 dans d’autres. Il est vraissemblable que ces lentilles sont des vrais cristallins, & même il y a quelqu’apparence qu’ils sont accompagnés de tout ce qui est nécessaire à un œil complet. Les yeux des mouches, des scarabées, & de divers autres insectes, ne different en rien d’essentiel de ceux des papillons. On a calculé qu’il y avoit 3181 cristallins sur une cornée d’un scarabé, plus de 8000, sur celle d’une mouche ; on en a compté 17325 sur chaque cornée d’un papillon : ce papillon auroit donc eu 34650 yeux.

Tous les papillons, & la plupart des autres insectes aîlés, ont sur la tête deux cornes auxquelles on a donné le nom d’antennes ; elles sont mobiles sur les bases, & elles se courbent en différens sens, parce qu’elles ont grand nombre d’articulations. Les antennes des papillons sont implantées sur le dessus de la tête, près du bord extérieur de chaque œil.

On peut diviser les papillons en 6 classes, par des caracteres tirés de la forme des antennes. Celles de la premiere classe ont un diametre assez égal depuis leur origine jusqu’à leur extrémité, & elles sont terminées par une grosse tête, assez semblable à celle d’une masse d’armes : les naturalistes les ont appellées en latin antennæ clavatæ. M. de Reaumur les a

nommées antennes à masses ou à boutons. Un grand nombre de papillons qui se posent pendant le jour sur des fleurs, ont de ces antennes.

Celles de la seconde classe sont communément plus courtes, par rapport à la longueur du corps du papillon, que celles de la classe précédente ; elles augmentent insensiblement de diametre depuis leur origine jusque tout auprès de leur extrémité ; là elles diminuent tout-à-coup de grosseur, & se terminent par une pointe, d’où sort une espece de petite houpe composée de quelques filets. M. de Reaumur a donné à ces antennes le nom d’antennes à massue : des papillons qui se soutiennent en volant au-dessus des fleurs sans qu’on les voye jamais s’appuyer dessus, & qui font un bourdonnement continuel avec leurs aîles, ont de ces antennes en massue.

Les antennes de la troisieme classe different de celles de la seconde, en ce qu’elles sont plus larges qu’épaisses, au lieu que les autres sont plus épaisses que larges ; leur extrémité forme une pointe plus longue, & n’a point de bouquet de poils : d’ailleurs elles sont contournées, & ressemblent à des cornes de bélier. Il y a des papillons communs dans les prairies, qui ont de ces antennes en cornes de bélier.

Les antennes de la quatrieme classe sont terminées par une pointe aiguë, assez semblable à celle des antennes de la troisieme classe ; mais elles en different en ce que peu au-dessus de leur origine elles prennent subitement une augmentation de grosseur qu’elles conservent dans la plus grande partie de leur étendue, c’est-à-dire jusques assez près de leur bout, où elles se contournent un peu pour se terminer en une pointe, qui quelquefois porte elle-même une autre pointe composée de plusieurs filets ou poils extrémement déliés. Plusieurs especes de très-gros papillons ont de ces antennes, qui sont grosses aussi, mais courtes à proportion de la longueur du corps de l’insecte ; M. de Reaumur les a nommées antennes prismatiques, parce que la plus grande partie de leur étendue est une espece de prisme, qui a pour base un secteur de courbe.

Les antennes de la cinquieme classe sont toutes ce les qui ont une figure conique très-alongée, dont la base tient à la tête de l’insecte, ou celles qui au moins ne sont pas plus grosses près de leur extrémité que dans le reste de leur étendue. M. de Réaumur les a nommés antennes à filets coniques & grénés, parce qu’elles sont formées par une file de grains plus ou moins gros & plus ou moins ronds : ces antennes sont aussi plus ou moins longues.

Les antennes de la sixieme classe ressemblent à des plumes, aussi les a-t-on appellées antennes en plumes. Elles sont composées d’une tige qui diminue de grosseur depuis son origine jusqu’à son extrémité ; cette tige a sur deux côtés opposés des branches latérales : celles qui sont environ au milieu de la tige ont plus de longueur que celles qui se trouvent à l’origine ; celles de l’extrémité sont les plus courtes de toutes : ces branches sont inclinées vers la pointe de la tige. En les voyant au microscope, on les trouve semblables aux barbes d’une plume. Les antennes en plumes sont plus belles sur les mâles que sur les femeles ; elles sont plus fournies de barbes qui se soutiennent mieux, & qui sont plus longues. Le grand paon de nuit a des antennes en plumes.

Plusieurs especes de papillons ont une trompe avec laquelle ils sucent les fleurs ; cet organe manque aux autres, ou au-moins ils n’ont point de trompe apparente. Dans les papillons qui en sont pourvus, elle est placée entre les deux yeux, & roulées comme un ressort de montre ; il y en a de courtes qui ne forment qu’un tour & demi, ou deux tours de spirale ; les plus longues font plus de huit ou dix tours ; mais ce rouleau est en partie caché dans la