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ce presque ronde, qui a la couleur, le poli luisant & la douceur de la graine de lin.

Cet arbrisseau croît naturellement dans les haies, en Italie, en Provence, en Languedoc ; il se plait aux lieux champêtres, incultes, humides ; il fleurit en Mai & Juin ; son fruit mûrit en autonne, & tient à l’arbre tout l’hiver.

Jean Bauhin & Ray ne sont pas éloignés de penser que notre paliure ne soit le paliure de Théophaste & de Dioscoride. Il n’est guere d’usage dans la médecine ; mais comme il n’y a peut-être aucune espece de rhamnus ou d’arbrisseau armé d’épines plus roides & plus pointues, l’on en fait des haies vives, bonnes pour empêcher les incursions des hommes & des animaux. (D. J.)

PALIXANDRE, s. m. (Marquetterie) espece de bois de violet, propre au tour & à la marquetterie. Ce sont les Hollandois qui envoient cette sorte de bois aux marchands épiciers & droguistes de Paris. Il est ordinairement débité en de grosses bûches : le plus beau est celui qui est le plus plein de veines, tant dehors que dedans, & qui a le moins d’obier.

PALLA, s. f. (Hist. anc.) c’étoit chez les anciens romains, un manteau que les femmes portoient par-dessus la robe appellée stola. Voyez Stola.

Horace, dans l’art poëtique, dit qu’Eschile habilla le premier ses acteurs d’un long manteau qu’il nomme palla. C’étoit un manteau de théâtre, fort long & fort ample, inventé pour donner un air plus noble & plus majestueux à ceux qui jouoient les premiers rôles, soit en hommes, soit en femmes. Mais à Rome, cet habillement ne passa qu’assez tard au théâtre, & lorsque les femmes de condition s’en furent dégoûtées. Voyez Mante.

On portoit ce manteau sur l’épaule gauche, & le faisant passer de l’autre côté sous le bras droit, on en attachoit les deux bouts sous le bras gauche, sans couvrir la poitrine ni le bras.

Il faisoit beaucoup de plis & de replis, c’est de-là que lui est venu son nom, au sentiment de Varron ; c’est-à-dire qu’il vient du mot πάλλω, vibro, je frémis, je tremble.

Parmi les Gaulois, les hommes portoient aussi une espece de palla, appellée gallica palla.

PALLADES, s. f. pl. (Littérat.) jeunes filles que l’on consacroit à Jupiter dans la ville de Thebes en Egypte. On les choisissoit dans les plus nobles familles de la ville, du nombre des plus belles ; & la consécration qu’on en faisoit étoit honteuse, au rapport de Strabon.

Parmi les pallades consacrées par les Thébains à Jupiter ; on distinguoit une jeune fille vierge, des plus nobles & des plus belles, à laquelle il étoit libre d’accorder ses dernieres faveurs à qui elle vouloit jusqu’à ce qu’elle fût nubile ; alors on la marioit : mais jusqu’à son mariage, on la pleuroit comme si elle eût été morte. (D. J.)

PALLADIUM, s. m. (Littérature.) le mot est grec, latin & françois. C’étoit une statue de Minerve, taillée dans la posture d’une personne qui marche. Elle tenoit une pique levée dans sa main droite, & avoit une quenouille dans sa main gauche ; c’est la description qu’en fait Apollodore : Tzetzès & Eustathe, en parlent à-peu-près de même. On dit qu’elle étoit descendue du ciel près de la tente d’Ilus, dans le tems qu’il bâtissoit la forteresse d’Ilium, & que l’oracle, consulté sur cette statue, ordonna qu’on élevât un temple à Pallas dans la citadelle, & qu’on y gardât soigneusement cette statue ; parce que la ville de Troyes seroit imprenable tant qu’elle conserveroit ce précieux dépôt. Aussi les Grecs instruits de cet oracle, se vanterent d’avoir enlevé le palladium ; cependant Enée éveillé par un songe, dans lequel Hector

lui conseilla de chercher un asyle, l’assurant qu’il seroit fondateur d’un grand empire, se rendit à la citadelle, prit le palladium & la déesse Vesta d’une main, & tenant de l’autre son cher Ascagne, il se sauva au-travers des flammes jusqu’au bord de la mer. Là il s’embarqua avec ces tristes dépouilles, & aborda après mille traverses au port de Lavinie. Dès qu’il y fut arrivé, il y déposa dans un temple le palladium & le feu sacré ; l’un & l’autre furent ensuite transportés à Albe, & finalement à Rome, où l’on établit les Vestales, pour garder avec soin des choses si précieuses. La ruine de Troyes sembloit être une bonne preuve de leur foiblesse ; mais pour cacher au peuple l’impuissance du feu sacré & du palladium, on en défendit la vûe :

Nullique adspecta virorum
Pallas in abstruso pignus memorabile templo.

Denis d’Halicarnasse confirme que les Grecs n’emporterent de Troyes qu’un faux palladium, fait par Dardanus sur le modele du véritable. Aussi les Romains étoient si persuadés qu’ils possédoient le vrai simulacre de Pallas, auquel ils attachoient le destin de Rome, que dans la crainte qu’on ne le leur enlevât, ils firent à l’exemple de Dardanus, plusieurs statues toutes semblables, qui furent déposées dans le temple de Vesta ; & l’original fut caché dans un lieu qui n’étoit connu que des ministres du temple & des prêtresses. Clément d’Alexandrie a embrassé ce sentiment dans des recherches assez curieuses qu’il a mise au jour sur le palladium, & qu’il seroit trop long de transcrire ici.

Quoique les Romains se vantassent d’avoir la statue de Pallas tombée du ciel, & qu’ils la regardassent comme le gage de la durée de leur empire, fatale pignus imperii, plusieurs villes leur contestoient la gloire de posséder ce même palladium. La premiere étoit Liris, ancienne ville de la Lucanie, que Strabon croit avoir étéune colonie de Troyens, par la raison qu’on y voyoit la statue de la Minerve iliade, αθηνᾶν τὴν Ἰλίαδα. Lavinie, Luccrie, Daulis, Argos, Sparte, & plusieurs autres villes, se glorifioient du même avantage ; mais les Iliens le leur disputerent toujours. Ils prétendoient que le palladium n’avoit jamais été enlevé de Troyes ; & que s’il étoit vrai qu’Enée pour le garantir de l’incendie, l’eût porté à Palaescepsis, il l’avoit bientôt après remis en sa place. Enfin lorsqu’on leur objectoit que suivant Homere, Diomede, & Ulysse l’avoient enlevé, ils répondoient que ces deux capitaines n’avoient trouvé dans le temple de Minerve qu’un faux palladium, qu’on avoit mis à la place du véritable, qui dès le commencement du siege de Troyes, avoit été caché dans un lieu inconnu.

Mais une chose fort curieuse sur le palladium, c’est le fait qui est rapporté par Appien d’Alexandrie, par Servius, par Julius Obsequens, & par S. Augustin, qui cite à ce sujet un passage de Tite-Live, qu’on ne trouve plus dans ce qui nous reste de ses ouvrages. Ce fait est que, sous le consulat de L. Sylla, & de L. Pompeius, Fimbria lieutenant de L. Valerius Flaccus, ayant pris & brûlé Ilion sans aucun respect pour ses dieux, on trouva dans les cendres du temple de Minerve, le palladium sain & entier ; prodige dont les Iliens charmés conserverent long-tems le souvenir sur leurs médailles.

Le palladium étoit encore un lieu d’Athènes, où l’on jugeoit les meurtres fortuits & involontaires ; le nombre des juges se montoit à cent. Tout le monde convient que Démophon y fut jugé le premier ; mais on ignore pour quel crime. (D. J.)

PALLAGE ou PELLAGE, s. m. (Jurisprud.) est un droit dû à quelques seigneurs pour chaque bateau qui aborde en leur seigneurie : quelques-uns veulent que ce droit ait été appellé pellage, quasi ap-