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été rendue réelle. Les premieres lettres que l’on trouve d’érection en pairie sont celles qui furent données en 1002 à Philippe le Hardi, chef de la seconde maison de Bourgogne. Le roi Jean son pere le créa pair de ce duché.

Plusieurs des anciennes pairies laïques étant réunies à la couronne, telles que le comté de Toulouse, le duché de Normandie, & le comté de Champagne, on en créa de nouvelles, mais par lettres patentes.

Ces nouvelles érections de pairies ne furent d’abord faites qu’en faveur des princes du sang. Les deux premieres nouvelles pairies furent le comté d’Artois & le duché de Bretagne, auxquels Philippe le Bel attribua le titre de pairie en 1297, en faveur de Robert d’Artois, & de Jean duc de Bretagne.

Ce qui est remarquable dans l’érection du duché de Bretagne en pairie, c’est que la Bretagne n’étoit pas contente de cette érection, craignant que ce ne fût une occasion au roi de s’emparer de ce pays ; tellement que le roi donna une déclaration à Yolande de Dreux, veuve du duc Artus, que l’érection en pairie ne préjudicieroit à elle, ni à ses enfans, ni aux pays & coutumes. Boulainv. Hist. des parlemens, tom. I. p. 226.

On érigea dans la suite plusieurs autres nouvelles pairies en faveur des princes du sang, notamment le duché de Normandie, qui fut rétabli par le roi Jean en 1355, en faveur de Charles son fils, dauphin de France, qui fut depuis le roi Charles V.

On érigea de même successivement en pairies pour divers princes de la maison de France, le duché d’Alençon en 1268, celui de Bourbon en 1308, celui d’Orléans en 1345, celui de Normandie, qui fut rétabli en 1355. Il y en eut encore d’autres par la suite. Les princes du sang ne jouissoient point alors du titre ni des prérogatives de la pairie, à moins qu’ils ne possédassent quelque terre érigée en pairie. Les princes non pairs étoient précédés par les pairs, soit que ceux-ci fussent princes ou non, & les princes mêmes qui avoient une pairie, n’avoient à la cour & au parlement d’autre rang que celui de leur pairie ; mais présentement tous les princes sont pairs nés, sans qu’ils ayent besoin de posséder de pairie ; ils précédent tous les autres pairs, ils jouissent tous du titre de pair & des prérogatives qui y sont attachées quoiqu’ils ne possedent point de terre érigée en pairie ; ce fut Henri III. qui leur donna ce titre de pair né. Ce sont les seuls pairs nés que l’on connoisse parmi nous. Voyez l’hist. de la pairie par Boulainv. tom. I. pag. 58.

Lorsque l’on érigea de nouvelles pairies pour des princes du sang, il subsistoit encore quatre des anciennes pairies laïques ; mais sous Charles VII. il y en eut trois qui furent réunies à la couronne ; savoir, le duché de Normandie en 1465, celui de Bourgogne en 1467, & celui de Guienne en 1468 ; de sorte qu’il ne resta plus que le comté de Flandres qui dans la suite des tems a été partagé entre plusieurs souverains, & la portion qui en est demeurée à la France, a été réunie à la couronne ; c’est pourquoi lors du second procès qui fut fait au duc d’Alençon, Louis XI. créa de nouveaux pairs pour représenter la pairie de France assemblée.

Il ne subsiste plus présentement aucune des six anciennes pairies laïques, & conséquemment les six pairies ecclésiastiques sont sans contredit les plus anciennes de toutes les pairies qui subsistent présentement.

Long-tems après les nouvelles créations de pairies faites pour des princes du sang, on en fit aussi en faveur de princes étrangers ; le premier qui obtint cette faveur fut le duc de Nevers en 1549.

Enfin on en créa aussi en faveur d’autres seigneurs,

qui n’étoient ni princes du sang, ni princes étrangers.

La premiere qui fut érigée pour un autre qu’un prince, fut celle de Roannes par François I. en Avril 1519, pour Artus de Gouffier, seigneur de Boissy ; mais comme il mourut au mois de Mai suivant, l’érection n’eut pas lieu ; ce qui a fait dire à plusieurs que Guise étoit la premiere terre érigée en pairie en faveur d’un autre que d’un prince du sang, quoique son élection ne soit que de 1527. Mais l’érection du duché de Guise en pairie étoit en faveur d’un prince étranger, & même issu originairement du sang de France. La premiere érection de pairie qui eut lieu en faveur d’un simple seigneur non prince, fut, selon quelques-uns, celle de la baronnie de Montmorency en 1551 (Henaut) ; mais il s’en trouve une plus ancienne, qui est celle du duché de Nemours, en faveur de Jacques d’Armagnac en 1462. Le parlement n’enregistra ses lettres qu’après plusieurs jussions. Duclos, hist. de Louis Xl.

Depuis ce tems, les érections de duchés-pairies en faveur de simples seigneurs non princes, ont été multipliées à mesure que nos rois ont voulu illustrer quelques-uns des seigneurs de leur cour.

Présentement les pairs de France sont :

1°. Les princes du sang, lesquels sont pairs nés lorsqu’ils ont atteint l’âge de 20 ans, qui est la majorité féodale.

2° Les princes légitimés, lesquels sont aussi pairs nés.

3°. Les pairs ecclésiastiques, qui sont présentement au nombre de sept ; savoir, les six anciens pairs, & l’archêveque de Paris, duc de S. Cloud ; mais le rang de cette pairie se regle par celui de son érection, qui n’est que de 1622.

4°. Les ducs & pairs laïques : ces pairs, suivant la date de leur érection, & l’ordre de leur séance au parlement, sont :

1572 Usès. 1665 Aumont.
1582 Elbeuf. 1672 Béthune.
1595 Montbazon. 1710 Villars.
1599 La Trémoille. 1710 Harcourt.
1616 Sully. 1710 Fitz-James.
1619 Luynes. 1711 Chaulnes.
1620 Brissac. 1714 Rohan-Rohan.
1631 Richelieu. 1716 Villars-Brancas.
1634 Fronsac. 1716 Valentinois.
1637 La Rochefoucauld.    1720 Nevers.
1637 La Force. 1723 Biron.
1648 Rohan Chabot. 1723 La Valliere.
1652 Bouillon. 1731 Aiguillon.
1662 Luxembourg. 1736 Chastillon.
1663 Gramont. 1736 Fleury.
1663 Villeroi. 1755 Duras.
1663 Mortemart. 1757 Duras
1663 Saint-Aignan. 1758 La Vauguyon.
1663 Tresmes. 1758 Choiseul.
1663 Noailles. 1762 Praslin.

Il y a en outre quelques ducs héréditaires vérifiés au parlement, & quelques ducs par simple brevet, mais les uns les autres n’ont point le titre de pair, ni aucune des prérogatives attachées à la pairie.

Pairs ecclésiastiques, sont des archevêques & évêques qui possedent une terre érigée en pairie, & attachée à leur bénéfice. Le roi est le seul en France qui ait jamais eu des pairs ecclésiastiques ; les autres seigneurs avoient chacun leurs pairs, mais tous ces pairs étoient laïcs.

Les six anciens pairs ecclésiastiques sont présentement les plus anciens de tous les pairs : il n’y a eu aucun changement à leur égard, soit pour le titre de leurs pairies, soit pour le nombre.

L’article 45. de l’édit de 1695 maintient les pairs ecclésiastiques dans le rang qui leur a été donné jus-