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Quis tumulos moriens hos occupet, hoste perempto
Quæritur, & sterili tantum de pulvere pugna est.

Ces vers furent traduits en françois par Duvair, par Nicolas Rapin & par Malherbe ; mais aucune de ces traductions ne vaut l’original. (D. J.)

Ostende, compagnie d, (Com. marit.) fameuse compagnie des Pays-bas autrichiens qui se forma en 1718, & dont personne un peu instruit des affaires de commerce, n’ignore le sort.

Rien n’étoit mieux conçu que le plan de cette société. Le fonds fut arrêté à six millions de florins argent de change, divisé en 6 mille actions, de mille florins chacune. Les directeurs fixés au nombre de 8, furent choisis parmi les plus riches & les plus habiles négocians du pays, pour rester seulement six ans en direction. Le principal établissement aux Indes devoit être à Sandraspatan, frontiere des royaumes de Gingi & de Carnate, sur la côte de Coromandel, & l’empereur du Mogol avoit permis à la compagnie de bâtir un fort dans ses états. Le retour des marchandises devoit aborder à Bruges ou à Ostende, & être vendu dans une de ces deux villes.

Cette société formée dans l’espérance assurée d’obtenir la concession du prince, arma d’abord quelques vaisseaux pour l’Orient. Son crédit augmentant, elle multiplia le nombre de ses vaisseaux, elle en envoya cinq en 1720, six autres en 1721, & fit une vente en 1722, qui la mit en état de continuer son commerce avec succès. En 1723 elle eut son octroi gratis de l’empereur pour trente ans, avec les privileges les plus nobles & les plus amples qu’aucune compagnie de commerce ait encore reçue de son souverain. Non-seulement L. M. I. firent pour trois années la remise des droits d’entrée & de sortie, mais elle y ajouta un don gratuit de 300 mille écus pour favoriser ses premier commencemens. Aussi-tôt après l’enregistrement des lettres patentes, les livres furent ouverts pour les souscriptions, & elles furent remplies en un seul jour ; sur la fin du même mois elles gagnoient déja 12 à 15 pour cent.

Ces brillans avantages causerent la chute de cette compagnie ; car en même tems qu’ils enflerent le cœur de toutes les personnes qui y étoient intéressées, ils augmenterent la jalousie des compagnies hollandoises des Indes orientales & occidentales, qui ne pouvant plus voir de si puissans & de si voisins compétiteurs, prêts à partager leur commerce, demanderent aux Etats-Généraux la liberté de le maintenir par la force, assurés du succès de leur requête, du soutien de l’Angleterre, & tout au-moins de la neutralité de la France.

Lorsque l’empereur gagna la bataille de Belgrade, on ne fut point inquiet des conquêtes qui pouvoient en être la suite ; mais quand on le vit disposé à soutenir la compagnie d’Ostende, on en fut alarmé : la France même défendit à ses sujets de s’intéresser dans cette compagnie. Ce fut bien pis après l’expédition des lettres-patentes, revêtue de toutes les graces qui pouvoient leur donner du poids ; alors les puissances maritimes ne garderent plus de ménagement ; elles menacerent l’empereur de la guerre la plus opiniâtre, & leurs menaces devinrent l’objet de l’agitation de l’Europe en 1725 ; enfin, comme tout étoit prêt à s’armer, l’empereur prit le parti qu’impose la nécessité, celui de céder à la force, & de suspendre son octroi. On comprend bien que l’inaction de la compagnie d’Ostende depuis ce tems-là jusqu’à ce jour 1760, est une suppression réelle sous un nom plus adouci ; & les négocians des Pays-bas autrichiens ne sauroient encore s’en consoler.

Il est vrai que l’empereur n’étoit pas trop fondé dans ses prétentions. On avoit stipulé dans les trai-

tés d’Utrecht, & dans celui de la Barriere, conclu à Anvers en 1715, qu’il ne posséderoit les Pays-bas espagnols, qu’avec les mêmes droits & les mêmes prérogatives que Charles II. les avoit possédés. Or ce prince ne pouvoit pas établir dans ses domaines une compagnie pour le commerce des Indes ; d’où il résulte que son successeur étoit astreint à la même clause ; mais quand Charles VI. auroit pu, avec justice, défendre sa compagnie d’Ostende, il est vraissemblable que cet établissement auroit allumé le feu d’une guerre ruineuse, & que sa nouvelle compagnie n’auroit jamais pû se soutenir. (D. J.)

OSTENSIF, adj. (Gram.) qui peut être montré. Il y a des lettres secrettes qui ne sont que pour celui à qui elles sont adressées ; & des lettres ostensives, qu’il faut montrer comme les seules qu’on ait reçues.

OSTENTATION, s. f. (Morale.) parade de ses qualités, de ses talens, ou de ses actions. Si cette parade est fausse, elle nous rend le jouet de nos folies, & nous couvre de ridicule. Si elle est fondée, mais sans faste injurieux pour les autres, c’est un vernis qui a la propriété d’embellir & de conserver ce qui en est digne. La vertu, faut-il le dire, a quelquefois besoin de se faire valoir pour être remarquée. Cicéron se trouva dans des conjonctures où il lui convenoit de parler de lui-même & de ses services avec quelque ostentation. Elle réussit d’ordinaire dans les républiques, rarement à la cour des rois, ou dans un corps de sénateurs aristocratiques. Elle ne sied pas mal à un général couronné de lauriers. Pour faire aimer la belle gloire aux troupes, il y faut mêler un peu de la fausse. La bravoure des soldats est toute dans les yeux ou dans la voix de celui qui les commande. Ils ont besoin pour marcher qu’on leur enfle le cœur de vaines promesses & de magnifiques projets. (D. J.)

OSTEOCOLLE, s. f. (Hist. nat.) c’est ainsi qu’on nomme une substance fossille, qui ressemble parfaitement à des racines d’arbres pétrifiées. Elle est ordinairement inégale & raboteuse, d’un blanc jaunâtre, cependant dans quelques parties elle est quelquefois blanche comme de la neige, tandis que d’autres parties sont grises ou noirâtres. Cette substance ne se trouve que dans des terreins arides & sablonneux ; elle est d’une forme cylindrique ; on en trouve depuis la grosseur d’une plume, jusqu’à celle du bras ou de la cuisse. Le tissu de cette substance est moins compacte au centre que vers l’extérieur ou l’écorce : quelques morceaux paroissent avoir leur centre rempli de petits trous comme l’intérieur des os. Les gros morceaux ou racines ont moins de consistance & de solidité que les petits. En général l’ostéocolle est tendre & fragile tant quelle est en terre, ce qui fait qu’on a beaucoup de peine à la tirer en grands morceaux, mais elle acquiert de la consistence lorsqu’elle a été exposée à l’air.

Les naturalistes ont été très-embarrassés pour connoître la nature & l’origine de l’ostéocolle, quelques-uns l’ont pris pour une concrétion spathique, d’autres l’ont regardé comme une espece de tuf ou d’inscrustation ; d’autres ont cru que c’étoit des ossemens calcinés ou pétrifiés à cause de sa forme & de son tissu. Ferrante Imperato en a très-bien jugé lorsqu’il a dit que c’étoit une racine changée en une pierre tendre & mélée de sable. En effet cela est conforme aux observations & aux expériences les plus récentes qui ont été faites sur l’ostéocolle ; elles sont dûes à M. Gleditsch de l’académie de Berlin ; il a examiné cette substance qui se trouve très-communément dans la Marche de Brandebourg, & le célebre M. Marggraff en a fait l’analyse chimique. Voyez les mémoires de l’académie royale de Berlin, année 1748.