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lation des pleïades il y en a quarante ; douze dans l’étoile du milieu de l’épée d’orion ; cinq cens dans l’étendue de deux degres de la même constellation, & deux milles cinq cens dans la constellation entiere. Chambers.

En se servant de lunettes plus fortes que les lunettes ordinaires, on a découvert que du-moins plusieurs de ces apparences, non-seulement n’étoient point causées par ces amas d’étoiles qu’on avoit imaginés, mais même n’en renfermoient aucune, & ne paroissoient être que de grandes aires ovales, lumineuses, ou d’une lumiere plus claire que celle du ciel. Hevelius a donné une table des nébuleuses, ou taches répandues dans le ciel. M. de Maupertuis, dans son discours sur les différentes figures des astres, a proposé une nouvelle conjecture sur ce sujet. Selon lui, il peut y avoir dans les cieux des masses de matiere, soit lumineuses, soit réfléchissant la lumiere, dont les formes sont des sphéroïdes de toute espece, les uns approchant de la sphéricité, les autres fort applatis. De tels astres, dit-il, doivent causer des apparences semblables à celles dont il s’agit. Il ne décide point si la matiere dont ces corps sont formés est aussi lumineuse que celle des étoiles, & si elle ne brille moins que parce qu’elle est plus éloignée. On ne peut pas non plus s’assurer si les astres, qui forment ces taches, sont plus ou moins éloignés que les étoiles fixes. L’immensité des cieux offre, & offrira encore dans la suite des siecles, matiere à des observations perpétuelles, & à des conjectures sans fin. Mais il y aura toujours une infinité de choses qu’on ne pourra pousser au-delà de la conjecture. L’éloignement prodigieux de tout ce qui est au-delà des planetes, ne sera probablement jamais surmonté par aucun instrument, & toute l’industrie des hommes ne viendra pas à bout de rapprocher les étoiles fixes, & les objets qui sont à-peu-près dans la même région, au point de déterminer quelque chose de précis sur leur grandeur, leur figure, & leur éloignement. Au fond, à n’envisager les découvertes que du côté de l’utilité, le malheur n’est pas grand. Ce qui est le plus à notre portée en tout genre, est en même tems, par une sage disposition, ce qui est le plus intéressant, & nos lumieres sont reglées sur nos besoins. On ne sauroit pourtant trop estimer ces hommes, qui s’élevant au-dessus de notre sphere, semblent vouloir embrasser tout l’univers. Article de M. Formey.

NEBULGEN, mot arabe, ou de la composition de Paracelse, par lequel il désignoit un sel concret formé de l’humidité du brouillard qui tomboit & se ramassoit sur une pierre, & qui étoit condensé ensuite par la chaleur du soleil. Paracels. schol. in libr. de grad. & compos. Castell. lexic. Cette espece de sel, supposé que c’en fût réellement une, est aujourd’hui dans l’oubli ; & l’on ne voit plus les pierres chargées de pareilles crystallisations : Paracelse nous en a laissé ignorer la nature, les qualités, & les usages.

NECANÉES, s. f. pl. (Comm. des Indes.) ce sont des toiles rayées de bleu & blanc, qui se fabriquent dans les Indes orientales ; il y en a de larges & d’étroites. Les larges qu’on nomme nécanées-brouard, ont onze aunes de long sur trois quarts de large. Les étroites qu’on appelle nécanées-naron, ont dix aunes sur deux tiers. Dict. du Comm. (D. J.)

NÉCAUS, (Géog.) ancienne ville d’Afrique au royaume d’Alger, dans la province de Bugie sur les confins de la Numidie. Ptolomée, l. IV. c. iij. la nomme Vaga ; elle est à 20 lieues de Tetztéza, 50 de Constantine. Long. 21. 45. lat. 35. 20. (D. J.)

NÉCESSAIRE, adj. (Métaphysiq.) nécessaire, ce dont le contraire est impossible & implique contradiction. L’être en général & considéré par abstraction est nécessaire ; car les essences ne sauroient cesser

d’être possibles, & elles sont immuables. Tout ce que l’on démontre des nombres dans l’Arithmétique, & des figures dans la Géométrie, convient nécessairement aux nombres & aux figures. La source de cette nécessité se trouve dans l’unique déterminabilité dont les choses nécessaires sont susceptibles. Voici ce qu’il faut entendre par cette expression : une chose nécessaire, qui est d’une certaine maniere, ne peut jamais être d’une maniere opposée ; toute détermination contraire à sa détermination actuelle implique. Un triangle rectiligne a ses trois angles égaux à deux droits ; cela est vrai aujourd’hui, cela le sera éternellement, & le contraire n’aura jamais lieu. Au lieu qu’une chose contingente est déterminée à présent d’une maniere, un instant après d’une autre, & passe par de continuels changemens.

Il faut bien prendre garde à ne pas confondre la nécessité d’essence avec celle d’existence. Pour que la derniere ait lieu, il faut que l’être nécessaire ait en soi-même la raison suffisante de son existence. La possibilité nécessaire des essences n’influe en rien sur leur actualité. Un homme n’existe pas, parce qu’il répugneroit à l’homme de ne pas exister ; mais l’être nécessaire, c’est-à-dire Dieu, existe, parce qu’il est Dieu, & qu’il impliqueroit qu’il n’existât pas.

NÉCESSITANT, adj. (Théologie.) terme dogmatique qui contraint & qui ôte la liberté. Ainsi, s’il y avoit une grace nécessitante, la créature n’auroit plus de mérite ; si la grace pouvoit manquer son effet, elle ne seroit plus efficace : c’est par quelque tour de main particulier, que nous n’avons pas encore bien saisi que l’action de Dieu sur la créature a son effet assuré sans nuire à la liberté.

NÉCESSITÉ, s. f. (Métaphysiq.) Nécessité, c’est en général ce qui rend le contraire d’une chose impossible, quelle que soit la cause de cette impossibilité. Or, comme l’impossibilité ne vient pas toûjours de la même source, la nécessité n’est pas non plus partout la même. On peut considérer les choses, ou absolument en elles-mêmes, & en ne faisant attention qu’à leur essence ; ou bien on peut les envisager sous quelque condition donnée qui, outre l’essence, suppose d’autres déterminations qui ne sont pas un résultat inséparable de l’essence, mais aussi qui ne lui répugnent point. De ce double point de vûe résulte une double nécessité ; l’une absolue, dont le contraire implique contradiction en vertu de l’essence même du sujet ; l’autre hypothétique, qui ne fonde l’impossibilité que sur une certaine condition. Il est absolument nécessaire que le parallélograme ait quatre côtés, & qu’il soit divisible par la diagonale en deux parties égales : le contraire implique en tout tems, aucune condition ne sauroit le rendre possible. Mais si ce parallélograme est-tracé sur du papier, il est hypothétiquement nécessaire qu’il soit tracé, la condition requise pour cet effet ayant eu lieu : cependant il n’impliqueroit pas qu’il eût été tracé sur du parchemin, ou même qu’il ne l’eût point été du-tout. La certitude, l’infaillibilité de l’événement suivent de la nécessité hypothétique, tout comme de la nécessité absolue.

On confond d’ordinaire la nécessité avec la contrainte : néanmoins la nécessité d’être homme n’est point en Dieu une contrainte, mais une perfection. En effet la nécessité, selon M. de la Rochefoucault, differe de la contrainte, en ce que la premiere est accompagnée du plaisir & du penchant de la volonté, & que la contrainte leur est opposée. On distingue encore dans l’école, nécessité physique & nécessité morale, nécessité simple & nécessité relative.

La nécessité physique est le défaut de principes ou de moyens naturels nécessaires à un acte, on l’appelle autrement impuissance physique ou naturelle.

Nécessité morale signifie seulement une grande diffi-